Découvre cette prédication basée sur Ecclésiaste 6.1-12. Elle est la sixième d’une série de 11 prédications sur le livre de l’Ecclésiaste. Clique ici pour accéder au sommaire de cette série.
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Notes écrites de la prédication:
L’homme de la Mancha
Johnny Hallyday chante La quête, issu de la comédie musicale américaine l’homme de la mancha. C’est Jacques Brel qui l’a adaptée puis chanté le premier…
Rêver un impossible rêve Porter le chagrin des départs Brûler d’une possible fièvre Partir où personne ne part
Aimer jusqu’à la déchirure Aimer, même trop, même mal Tenter, sans force et sans armure D’atteindre l’inaccessible étoile
Telle est ma quête Suivre l’étoile Peu m’importent mes chances Peu m’importe le temps Ou ma désespérance Et puis lutter toujours Sans questions ni repos Se damner Pour l’or d’un mot d’amour
Je ne sais si je serai ce héros Mais mon cœur serait tranquille Et les villes s’éclabousseraient de bleu Parce qu’un malheureux
Brûle encore, bien qu’ayant tout brûlé Brûle encore, même trop, même mal Pour atteindre à s’en écarteler Pour atteindre l’inaccessible étoile
Et bien en fait, cette étoile est vraiment inaccessible! Nous continuons notre parcours de l’Ecclésiaste. C’est peut-être le chapitre le plus triste, le plus dépité de tous.
Salomon trouve que la vie est éphémère, sans substance, sans stabilité. Il nous laisse quelques pistes pour vivre, et pour bien vivre.
Accueillir et accepter l’idée que la vie terrestre sera décevante dans certains aspects. Le savoir limite les déceptions. Les embouteillages nous décevront, les relations humaines nous décevront, nos cœurs nous décevront…
Se réjouir consciemment des joies quotidiennes que sont l’activité du jour, le manger, et le boire. Le bonheur de vivre se cueille chaque jour dans les instants agréables que l’on choisit de repérer et dont on profite. Jacques Ellul:
C’est tout à fait remarquable: Qohelet donne une sorte d’ordre au jeune homme comme au vieillard:« Mange, bois, réjouis-toi… » – « Au jour du bonheur, sois heureux ». Donc, et ceci me paraît essentiel: Ne te laisse pas ronger, pendant les jours de bonheur, par tout ce qui pourrait survenir, qui t’enlèverait le bonheur, qui fait que ce bonheur n’est pas complet, ne te laisse pas abattre par le fait qu’il est vanité.
Quand tu es heureux, sois-le sans réserve, livre-toi à ce bonheur simple. La fête est la fête, pas de pensée morose. La cuisine est bonne, le vin est bon, ne va pas chercher au-delà. Maintenant est le jour du bonheur. Vis ce « maintenant » avec plénitude. Demain viendra le jour du malheur. Ne te préoccupe pas du lendemain. « Chaque jour prendra soin de lui-même » et c’est Jésus qui le confirme! Donc, « sous le soleil » (pas dans l’absolu!), reçois ce commandement singulier dans la Parole de Dieu: Sois heureux avec les moyens simples du simple bonheur des hommes. p. 128
Mesurer le sens d’une vie à la 2e personne du singulier ou du pluriel. Dans sa longue liste de tentatives de recherche de sens, Salomon dit: « Moi je … moi je » et à la fin il remarque que c’était nul. Par extension, ce qui va porter du sens, c’est « quand je te donne, quand tu comptes ou bien quand je vous donne, quand vous comptez… » La satisfaction s’épelle AUTRUI.
Accepter les cycles de vie, et qu’il y a des temps pour tout, des saisons opportunes, et attacher son action à ces saisons. C’est cela qui construit la stabilité d’une vie et qui donne du sens à l’ensemble. Observer et vivre pleinement les cycles de la vie…
La contribution du chapitre 4 souligne l’importance de l’amitié. Vivre sur cette terre invite à développer des relations amicales fortes et aimantes. La solidarité humaine de deux ou trois compagnons est l’un des plaisirs qui aident à faire passer la pilule de la vie. Parce que la vie est difficile.
Au chapitre précédent, Salomon rappelle qu’en aucun cas la religion, ou la religiosité, ou les superstitions ne sauraient donner du sens à l’existence. Dieu cherche des adorateurs, pas des grenouilles de bénitier! Des femmes, des hommes passionnés de vivre en Dieu et avec Dieu…
Lecture: Ecclésiaste 6.1-12
Avoir tout sans l’apprécier (Ec 6.1-2)
1 Il est un malheur que j’ai vu sous le soleil, et qui accable l’homme. 2 Il y a tel homme à qui Dieu a donné richesse, ressources et gloire, à qui rien ne manque de tout ce qu’il désire, mais Dieu ne l’a pas laissé maître de s’en nourrir, car c’est un étranger qui s’en nourrira. C’est là une vanité et un grand malheur – Ec 6.1-2
Salomon observe un « malheur », un « mal » particulièrement terrible. Avoir beaucoup et ne pas en profiter. On trouve un leitmotiv dans le cœur humain: Avec plus, ça ira mieux.
- Avec un peu plus d’argent, je pourrais accomplir mes rêves et être tranquille.
- Avec un peu plus de respect de mes enfants, je serais un père accompli.
- Avec un peu plus de responsabilité dans l’entreprise, je serais un homme apaisé.
- Avec une santé meilleure, je serais une femme comblée.
- Avec un enfant de plus, ma famille sera complète et comblée.
- Avec un conjoint différent, je serai comblé.
Cette quête du « toujours plus » est source de créativité, d’action. Mais elle est aussi à l’origine de bien des tourments. C’est un malheur que cette pensée, parce qu’elle peut être obsessionnelle. C’est l’idée de l’accablement dont parle Salomon. « Cela pèse lourdement sur les humains », pourrait être une autre traduction (Romerowski).
Et Salomon cite deux situations pour étayer son propos. La première est celle d’un homme qui reçoit de Dieu « richesse, ressources et gloire » mais qui n’en profite pas. Alors bien sûr, il faut déjà recevoir des richesses! Vous savez comment on peut gagner beaucoup d’argent? Il y a trois méthodes.
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En réduisant ses dépenses. Je connais une personne qui était technicienne de surface dans une université américaine. Elle n’a jamais rien dépensé sinon le strict nécessaire. Elle a sagement investi ses économies.
À sa mort, elle a légué plusieurs millions de dollars à son université. Un cas typique de l’observation que fait Salomon.
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En travaillant plus et mieux. En ajoutant un! salaire, ou en faisant des études qui permettent de se qualifier pour d’autres jobs. On a plus d’argent. Je connais un homme qui est devenu responsable dans la grande distribution. Il travaillait 70 heures par semaine et gagnait beaucoup d’argent. Mais comme il travaillait beaucoup, il ne profitait pas de son argent. Un cas typique de l’observation que fait Salomon.
Jouer au Loto. J’ai trouvé une méthode pour gagner systématiquement un petit gain au Loto. Je vous la livre gratuitement ce matin. Si vous suivez cette méthode, vous pourrez offrir le tour du monde à toute votre famille. Vous êtes prêt? Trois fois par semaine, vous partez pour jouer deux grilles, soit 12″ par semaine. Chaque semaine, vous prenez vos 12″, et vous vous dirigez vers le buraliste. Vous faites cent mètres de plus, et vous les placez sur un compte d’épargne à votre banque. Au bout de 30 ans, vous aurez, grâce aux intérêts, le modeste pactole de 50.000″!
Plus sérieusement, notez bien que Dieu est à l’origine de tous les biens. Il est celui qui tient dans sa main gauche la richesse et la gloire (Pr 3.16, Ps 112.3). Dieu est la source directe ou indirecte, par des causes implicites ou explicites, de notre situation, et de nos ressources, de notre richesse, ou de notre gloire.
Il y a une doctrine qui était très importante pour les générations précédentes de chrétiens: celle de la providence de Dieu. La compréhension que Dieu dirige d’une main invisible les affaires de ce monde, y compris par le biais d’agents qui lui déplaisent.
Dieu accomplit un projet incompréhensible, mais bien conduit au travers des gouvernements, au travers de toutes les autorités, même les mauvaises.
Dieu accomplit un projet missionnaire pour sauver ceux qui lui appartiennent déjà dans son projet, mais au travers de ceux qui proclament l’Evangile, de ceux qui prient pour les perdus.
Dieu accomplit un projet géopolitique même au travers des guerres, et des tyrans. Un projet qui se concrétisera un jour avec l’avènement d’un Antichrist qui forcera le monde à choisir entre deux messies: le vrai et le faux!
Dieu accomplit aussi un projet personnel pour chacune de nos vies. Là encore pas toujours compréhensible, surtout lorsqu’il passe par la souffrance, mais où il nous assure que « toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8.1).
C’est donc Dieu qui donne, ou pas, la richesse. C’est donc Dieu qui donne, ou pas, la gloire. C’est donc Dieu qui donne, ou pas, les ressources.
L’Éternel dit à Moïse: Qui a donné une bouche à l’être humain? Et qui rend muet ou sourd, voyant ou aveugle? N’est-ce pas moi, l’Éternel? Ex 4.11
L’Éternel ouvre les (yeux des) aveugles; l’Éternel redresse ceux qui sont courbés; l’Éternel aime les justes. Ps 146.8
Tu te souviendras de l’Éternel, ton Dieu, car c’est lui qui te donne de la force pour acquérir ces richesses, afin de confirmer, comme il le fait aujourd’hui, son alliance qu’il a jurée à tes pères. Dt 8.18
L’Éternel a privé Israël son peuple, de toutes les facilités de la vie pendant sa marche dans le désert, pour l’éprouver. Puis il lui promet ces mêmes facilités:
7 Car l’Éternel, ton Dieu, va te faire entrer dans un bon pays, pays de cours d’eau, de sources et de nappes souterraines qui jaillissent dans les vallées et dans les montagnes; 8 pays de froment, d’orge, de vignes, de figuiers et de grenadiers; pays d’oliviers et de miel; 9 pays où tu mangeras du pain sans avoir à te rationner, où tu ne manqueras de rien; pays dont les pierres sont du fer, et des montagnes duquel tu extrairas le bronze. 10 Lorsque tu mangeras et te rassasieras, tu béniras l’Éternel, ton Dieu, pour le bon pays qu’il t’a donné. Dt 8.7-10
Je tremble d’émerveillement quand je vois la réaction de Job, qui perd tout ce qui lui est cher, et qui s’exprime:
20 Alors Job se leva, déchira son manteau et se rasa la tête, puis, se jetant par terre, il se prosterna 21 et dit: Nu je suis sorti du sein de ma mère, et nu j’y retournerai. L’Éternel a donné, et l’Éternel a ôté; que le nom de l’Éternel soit béni! 22 En tout cela, Job ne pécha pas et n’attribua rien de scandaleux à Dieu. Jb 1.20-22
Finalement, Salomon met le doigt sur la question de la satisfaction. Sommes-nous satisfaits de ce que Dieu nous a donné? Cultivons-nous un esprit de reconnaissance, de profit pour ce que nous avons? Pour ce que nous sommes, pour ce que nous faisons? Non avec orgueil, comme le dit l’apôtre Paul: « Qu’as-tu que tu n’aies reçu? »
C’est vraiment, vraiment vraiment triste d’ignorer tout ce qu’on a.
Dans les chapitres précédents Salomon a montré que nos désirs étaient véritablement insatiables.
Vous connaissez ces symboles? → > < ≠
Salomon a montré, par son expérience, que: désirs > satisfaction. Mais ce qu’il montre ici, c’est que: posséder ≠ apprécier…
Il parle d’une personne qui voit tous ses désirs comblés. Quelqu’un « à qui rien ne manque de tout ce qu’il désire ». Et que se passe-t-il? Il n’en profite pas. Vous savez pourquoi?
Parce qu’il faut aussi que Dieu donne la capacité d’en profiter. On peut tout avoir de Dieu, et ne jamais en profiter pleinement.
Je connais l’histoire d’un homme qui a travaillé pendant 10 ans 7 jours sur 7, 360 jours par an, pour monter des restaurants chaque fois un peu plus grands. Et puis un jour, il a réussi son plus grand pari: Acheter un restaurant qui pouvait servir jusqu’à 300 personnes. D’énormes investissements pour aménager une cuisine aux normes. D’énormes investissements pour acheter une vaissellerie adaptée. Pour rendre le restaurant joli et accueillant. Et puis la crise de 2008 est passée par là. Plus personne ne venait au restaurant. En deux semaines, c’était le dépôt de bilan. Deux semaines plus tard, tout était vendu par le liquidateur. L’économie de 10 années de travail bradée au vingtième de sa valeur. Au moins, cela a fait un heureux: le repreneur.
Mais Dieu ne l’a pas laissé maître de s’en nourrir, car c’est un étranger qui s’en nourrira. C’est là une vanité et un grand malheur. Ec 6.2
Comme le souligne Romerowski:
On peut imaginer diverses raisons: de lourdes responsabilités trop prenantes et occasionnant un excès de soucis et de tracas, des problèmes de santé, ou même la mort. La vie d’un homme peut encore être empoisonnée par des conflits incessants avec des rivaux jaloux ou avec des ennemis menaçants, etc. p. 290
Il en est des richesses comme de la réputation. Salomon parle de « gloire ». Aimeriez-vous être une star? Être interviewé sur tous les plateaux, être pris en photos à chaque déplacement?
J’ai lu cette semaine le témoignage d’une femme vivant à Hollywood, qui connaissait plusieurs acteurs et actrices qui cherchaient à percer. Ils étaient charmants. De délicieuse compagnie. Vous les voudriez à l’apéro chaque dimanche après midi! Et puis ils sont devenus célèbres…. Cette femme a dit qu’ils étaient devenus « imbuvables ». Ils sont peu nombreux ceux qui connaissent la gloire et qui en profitent pour le bien, sans que cela les fasse tomber dans leur cœur.
Je pense souvent à ces reproches adressés à Saül, le premier roi d’Israël, qui a cru pouvoir ajouter à son pouvoir légal la prêtrise; Dieu dans sa sagesse a séparé l’autorité du roi, du prêtre et du prophète. Lorsque que Dieu le confronte, il lui dit:
Quand tu étais petit à tes yeux, n’es-tu pas devenu roi sur Israël? – 1 S 15.17
Et Saül a tout perdu. La royauté et son honneur, et la dynastie qu’il aurait pu lancer par son fils Jonathan.
Ce sera d’ailleurs le cas de Salomon. Lui qui a construit le temple, lui qui a transformé le royaume de David en royaume glorieux… À sa mort, deux fils voudront prendre l’héritage. Finalement, l’un sera roi du royaume du Nord, et l’autre du royaume du Sud, de Juda. C’était en 931 av. J.-C. Israël n’aura plus jamais l’unité péniblement conquise par David et Salomon…
Ainsi, « apprécier » est indépendant de « avoir ».
Est-ce que vous appréciez ce que Dieu vous a donné? Réellement?
Un auteur puritain britannique du nom de Jérémiah Burroughs a signé un livre plutôt dérangeant intitulé Le bijou rare du contentement Chrétien. Dans ce livre il observe que le contentement provient de l’intérieur, une sorte d’état de l’âme qui se soumet à Dieu et à sa providence.
Il dit que c’est un mystère parce que le Chrétien est insatisfait en même temps qu’il est rassasié. Et qu’il parvient à cette satiété en soustrayant à certaines de ses attentes, en se donnant au travail qui est le sien, en soumettant sa volonté à celle de Dieu, en buvant à la rosée de la volonté de Dieu, en transformant la frustration en quelque chose d’autre, en trouvant sa force en Christ, et notamment dans l’alliance qui est sienne.
Après avoir souligné l’excellence de cette attitude il dénonce les méfaits d’un esprit ronchonneur, râleur. Il évoque que cela corrompt l’âme, que c’est la marque d’un homme impie et que c’est aussi la caractéristique de la rébellion. C’est en deçà du chrétien, contraire à la grâce, nullifiant nos prières, engendrant la colère de Dieu, qu’une malédiction y est attachée, qu’elle contient beaucoup du malin…
Burroughs termine son livre avec une série de recommandations. Il y a bien sûr les nombreuses bénédictions reçues, mais aussi la réalisation que toute la création est dans un état d’esclavage, que Dieu agit aussi dans les afflictions, et qu’il nous faut à la fois marcher selon l’obligation du contentement, mais qu’il nous invite à la foi, à la confiance…
Réfléchissez à cela. Les personnes qui comptent systématiquement ce qui ne va pas ne font plus pleurer à la longue. Certes, les premières fois on leur prête une épaule compatissante. Les secondes, on leur propose de l’aide. Les troisièmes fois, on les regarde les yeux hagards en pensant au prochain film qu’on va voir à la télé!
Rien ne va bien durablement et complètement dans ce monde. Mais, au moins, les dons quotidiens de Dieu (que Salomon rappelle) sont-ils la source d’une reconnaissance et d’un esprit rassasié?
Vivre longtemps sans l’apprécier (Ec 6.3-6)
3 Si un homme engendrait cent fils, vivait un grand nombre d’années, quelque nombreux que soient les jours de sa vie, si son âme ne se rassasie pas de bonheur, et qu’il n’ait même pas de sépulture, je dis que l’avorton est plus heureux que lui. 4 Car celui-ci est venu en vain, il s’en va dans les ténèbres, et son nom reste couvert de ténèbres; 5 il n’a ni vu, ni connu le soleil; il y a plus de repos pour lui que pour l’autre. 6 Qu’est-ce que vivre deux fois mille ans, sans jouir du bonheur? Tout ne va-t-il pas dans un même lieu? – Ec 6.3-6
Autre calamité. À l’époque, avoir des fils était l’emblème de la bénédiction.
3 Voici que des fils sont un héritage de l’Éternel, le fruit des entrailles est une récompense. 4 Comme les flèches dans la main d’un héros, ainsi sont les fils de la jeunesse. 5 Heureux l’homme qui en a rempli son carquois! Ils n’auront pas honte, quand ils parleront avec des ennemis à la porte. Ps 127.3-5
Dans une société agraire, c’était la garantie de main-d’œuvre.
Dans une société souvent en proie aux attaques de bandes de voleurs, c’était la garantie d’une protection.
Dans une société où la promesse d’un rachat de l’humanité passait par un descendant d’Abraham, il y avait peut-être l’espoir que le salut passerait par un fils?!
On a donc le cas de cet homme comblé de 100 fils, on pense à un cas fictif, à moins d’imaginer que sa femme ait eu successivement 20 quintuplés!
On imagine que cet homme vive longtemps. Là encore signe de bénédiction dans le contexte de l’Ancien Testament:
La crainte de l’Éternel prolonge les jours, mais les années des méchants sont abrégées. Pr 10.27
Si cet homme comblé de tout, n’est pas heureux, n’est-ce pas idiot? Si cet homme, comblé de tout, s’en va sans même avoir d’obsèques, n’est-ce pas idiot? 100 fils sans qu’aucun ne s’intéresse aux obsèques, c’est vraiment triste. Cela montre qu’on a pas laissé beaucoup d’amour autour de soi…
Ce scénario conduit Salomon à cette conclusion: même la mort n’est pas préférable. Ce qui est préférable, c’est de ne jamais avoir vécu.
Quelqu’un qui meurt a le passé avec lui. Et un passé sans bonheur est plutôt contrariant.
Quelqu’un qui n’a jamais vécu n’a au moins aucun regret!!! Voilà un réconfort pour ceux dont les enfants n’ont pas grandi. De la conception, ils partent directement de ce monde-ci vers celui, éternel, de Jésus Christ. Sans connaître la terrible déconvenue de l’existence « sous le soleil ».
Vivre 2000 ans, deux fois plus que Mathusalem (Gn 5.25-27) ne change pas grand-chose. On meurt quand même et il ne reste plus rien.
Franchement, quelle différence entre vivre 120 ans ou 40 ans? Sur le moment, c’est différent. 1000 ans plus tard, c’est insignifiant.
Les maisons qui accueillent les personnes âgées sont parfois égaillées par une belle architecture, de bonnes animations… Mais il est difficile d’ignorer le fait qu’une vie plus longue ne rime pas nécessairement avec le bonheur.
Il est des hommes et des femmes qui sont morts « rassasiés »! Le père du fondateur de notre église locale était pasteur aux États-Unis. Un homme qui avait toujours le sourire aux lèvres. Ses médecins lui conseillaient de surveiller son alimentation mais il aimait tellement les bon plats gras d’Amérique! Il allait en manger secrètement dans les restaurants près de l’Église…
Et puis il y a eu des arrêts cardiaques répétés, et l’hospitalisation. Lorsqu’on lui rendait visite à l’hôpital, des perfusions pleins les bras, il retirait son masque à oxygène et citait tout sourire « que tout ce qui respire loue le Seigneur -je loue le Seigneur! »
Voilà ce que suggère l’Ecclésiaste. Vivre longtemps, avoir beaucoup, c’est nul en soi. Mais jouir de ce que l’on a, à chaque moment saisi, ça c’est la vie.
C’est cueillir des roses dans un champ de ruine.
C’est rentrer dans une parfumerie, juste pour aller sentir un parfum, et sortir dans les rues polluées, le sourire aux lèvres.
C’est reposer le téléphone après une conversation téléphonique pénible et douloureuse pour prendre le temps de prier, puis regarder la photo d’un être aimé et lui envoyer un texto encourageant.
C’est s’asseoir pour compter les grâces passées de Dieu et se dire qu’aujourd’hui encore, Dieu veille.
C’est regarder un enfant de l’église, le bénir dans son cœur, prier pour lui, même en sachant que beaucoup de jeunes ne suivront pas le Seigneur en grandissant…
Manger beaucoup sans se satisfaire (Ec 6.7-10)
7 Toute la peine de l’homme est pour sa bouche, et cependant son gosier n’est pas rempli. 8 Que reste-t-il au sage de plus qu’à l’insensé, et quel avantage a l’homme humble qui sait se conduire devant les vivants? 9 Mieux vaut voir de ses yeux, que de laisser aller son imagination: c’est encore là une vanité et la poursuite du vent. Ec 6.7-9
Dans les mots de Romerowski, voilà un autre problème de la vie:
On travaille pour vivre, mais comme l’on n’a pas satisfait son appétit une fois pour toutes, on ne cesse pas de travailler et l’on passe finalement sa vie au travail sans pouvoir profiter beaucoup de cette existence. On travaille pour manger et pour vivre, mais aussi on mange et on vit pour travailler.
Peut-être faut-il étendre la notion de bouche à tous les appétits du corps. Et ils sont insatiables.
C’est comme les cacahuètes de l’apéro. On a beau dire « plus qu’une »…
On ne peut jamais dire « je bois plus qu’une fois et j’en ai fini avec l’eau pour toujours ». Salomon observe plusieurs insatisfactions:
- Celle d’avoir toujours faim chaque jour!
- Celle d’avoir la retenue du pauvre ou de l’humble qui n’étale pas ses désirs, mais qui n’est finalement pas mieux logé.
Celui qui passe sa vie les yeux fermés, rongé par le désir de ce qu’il ne peut obtenir. L’idée du verset 9 correspond plus ou moins à cet adage français « un tiens vaut mieux que deux tu l’auras! » Mieux vaux avoir un hamburger en main que de rêver de manger chez Bocuse un jour…
Ce thème nous est familier. Nos appétits sont le révélateur du manque.
C’est déjà le prolongement de l’expérience d’Adam et Eve. Entourés de milliers de fruits succulents, environnés d’un jardin magnifique, entourés d’animaux divers et aimables… et un fruit interdit. C’est ce fruit qu’Adam et Eve choisissent de prendre ensemble.
Puis l’expérience incroyable des Juifs qui sortent d’Egypte où ils étaient esclaves, qui sont conduits dans le désert et nourris chaque nuit par une manne miraculeuse, et qui regrettent l’Egypte, ses poissons, ses oignons, ses cailles…
Jésus dit à une femme qui avait couru après plusieurs hommes que jamais elle ne serait « dé-soiffée » si elle ne venait pas boire à l’eau que Jésus donne. Une eau qui traverse le désert de nos vies et nous propulse dans une vie éternelle.
Le thème de la satiété et du désir revient très souvent sur le tapis. Dit simplement, le désir tue:
- Il a tué Abel lorsque Caïn voulut le même accueil que son frère.
- Il a tué la femme de Loth qui regardait en arrière avec tristesse les villes de Sodome et de Gomorrhe qu’elle affectionnait particulièrement.
- Il a tué Achan et toute sa famille lorsqu’il voulu préserver, contre l’ordre explicite de Dieu, un beau manteau et un lingot d’or.
Le 10e commandement nous dit de prendre garde aux désirs illégitimes. Les laisser s’implanter, c’est ensuite les laisser contrôler nos pensées, puis nos paroles, puis nos actes. Et voilà brisé le premier des dix commandements: ne pas avoir d’autres dieux que Dieu.
Comment faire face? Puisque la vie est frustrante, la tentation est grande de chercher à obtenir quelques satisfactions dans les excès et dans la satisfaction des sens. Salomon a testé pour nous et a constaté combien c’était creux et absolument inadéquat pour apporter le bonheur recherché. Je vous invite à lire avec moi un texte important de Paul en Éphésiens 4.20-24
20 Mais vous, ce n’est pas ainsi que vous avez appris (à connaître) le Christ, 21 si du moins vous avez entendu parler de lui, et si vous avez été instruits en lui, conformément à la vérité qui est en Jésus: c’est-à-dire vous dépouiller, 22 à cause de votre conduite passée, de la vieille nature qui se corrompt par les convoitises trompeuses, 23 être renouvelés par l’Esprit dans votre intelligence, 24 et revêtir la nature nouvelle, créée selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité. Ép 4.20-24
Lorsque quelqu’un vient à Jésus, son ancienne nature est tuée. Il reçoit une nouvelle nature, qui réoriente son amour, ses priorités, son intelligence.
Notre vieille nature est morte, mais… elle « gonfle », elle prend de la place, par la convoitise. Plus nous laissons le désir s’implanter, plus le désir gêne la nouvelle nature que Dieu nous donne. L’immense danger du désir non cadré, c’est qu’il prendra une place toujours plus grande, jusqu’à l’acte.
Contrer, contester cette place du désir immoral, nous dit Paul, c’est être renouvelé dans notre compréhension, et continuellement concentrer notre attention sur les choses de la vie nouvelle, qui elles, sont pures…
Le mécanisme consiste à enlever les vêtements des mauvaises habitudes, et à revêtir les vêtements des bonnes habitudes. Un mécanisme où j’apprends à vivre ce que Jésus dit à ses disciples:
Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre. Jn 4.34
C’est cela qui satisfait. Réaliser que les désirs les meilleurs sont liés à ce que Dieu met devant nous. Des occasions de service, de paroles, d’amitiés…
Parler beaucoup sans vraiment comprendre (Ec 6.10-12)
10 Ce qui existe a déjà été appelé par son nom; et l’on sait ce qu’est l’homme: il ne peut contester avec plus puissant que lui. 11 Quand il y a beaucoup de paroles, il y a beaucoup de vanités: qu’en reste-t-il à l’homme? 12 Qui donc sait ce qui est bon pour l’homme pendant la vie, pendant le nombre des jours de sa vaine existence, qu’il mène comme une ombre? Et qui peut annoncer à l’homme ce qui sera après lui sous le soleil?
Ec 6.10-12
Cette fois-ci c’est l’insatisfaction des prouesses intellectuelles.
Adam a nommé les animaux du Jardin, faisant preuve d’un discernement et de l’autorité que Dieu lui avait donné pour régner sur cette création.
Connaître les choses et pouvoir en parler. Connaître les mystères de la science et pouvoir l’expliquer. Salomon était un expert en cela. Un vrai geek qui pouvait parler des heures sur la grammaire de l’accadien, sur les subtilités maritimes des navires phéniciens, ou encore sur l’extraordinaire complexité de la gestion d’un harem de 700 femmes et 300 concubines!
Pouvoir parler de la vie, et même de savoir qu’elle n’est pas très réjouissante. Savoir débattre et avoir raison, pouvoir tenir une conversation, ne serait-ce pas génial?
Mais en fait, l’homme se heurtera toujours à la limite divine. « Il ne peut contester avec plus puissant que lui. » À un moment donné, l’homme est confronté à sa finitude, et le mystère de la vie s’épaissit. Comme Job, il est arrêté devant Dieu et se demande les « pourquoi » de l’existence. Il n’a eu que des questions pour toute réponse. Parce qu’en fin d’analyse, Dieu règne et qu’il n’a de comptes à rendre à personne.
Qui donc sait ce qui est bon pour l’homme pendant la vie, pendant le nombre des jours de sa vaine existence, qu’il mène comme une ombre?
Qui peut annoncer à l’homme ce qui sera après lui sous le soleil?
Bono, du groupe U2 chante:
Je n’ai toujours pas trouvé ce que je recherche.
J’ai escaladé les plus hautes montagnes J’ai couru à travers les champs Rien que pour être avec toi J’ai couru, j’ai rampé J’ai escaladé les murs de cette ville Les murs de cette ville Rien que pour être avec toi
Mais je n’ai toujours pas trouvé Ce que je cherche
J’ai embrassé des lèvres au goût de miel J’ai senti la guérison au bout de ses doigts Ça brûlait comme un feu, un désir brûlant J’ai parlé avec des anges J’ai tenu la main du diable Il faisait chaud dans la nuit J’étais aussi froid qu’une pierre
Mais je n’ai toujours pas trouvé Ce que je cherche
Je crois au paradis Toutes les couleurs ne feront qu’une Mais oui, je continue à courir Tu as coupé les liens Et desserré les chaînes Tu portais la croix Et toute ma honte Toute ma honte Tu sais que je le crois
Mais je n’ai toujours pas trouvé Ce que je cherche
U2achtung.com
Même au sommet, même dans les expressions de confiance en la croix, la vie sous le soleil a ce côté d’inachevé…
Conclusion
Tant de films et tant de chants, tant de poésies évoquent l’effort héroïque pour décrocher le ciel, ou parvenir à je ne sais quel nirvana terrestre, ou divinise l’amour comme la suprême étoile.
Oui, l’homme se promène comme une ombre, il s’agite, mais c’est un souffle! Il amasse et ne sait qui recueillera. Ps 39.7
L’Ecclésiaste s’approche lentement de la conclusion monumentale de son œuvre de réflexion: la crainte de Dieu. C’est Dieu qui colore l’existence et lui donne son sens. Et surtout, c’est Dieu qui sera le seul centre durable…
1. Connaître Dieu est la première des satisfactions
Augustin, ce théologien du 4ème siècle a écrit:
Tu nous as faits pour toi Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi.
Un Catéchisme protestant nous dit:
La fin principale de l’homme est de connaître Dieu et d’en jouir éternellement.
C’est cela la vie éternelle. Connaître Dieu. Le connaissez-vous? Est-il devenu le refuge d’une existence sans but, sans fondement?
2. Apprendre à profiter, c’est… un apprentissage!
L’apôtre Paul le dit ainsi:
En toute circonstance, rendez grâces; car telle est à votre égard la volonté de Dieu en Christ-Jésus. 1Th 5.18
Les gens se posent souvent la question de la volonté de Dieu. Est-ce que je dois épouser Marc ou Pierre? Est-ce que je dois prendre le train ou la voiture? Est-ce que je dois faire mes devoirs aujourd’hui?
L’un des cinq piliers de la volonté de Dieu, c’est de rendre grâce. De rassasier sa vie du bonheur de chaque jour.
3. Intégrer la providence de Dieu, c’est… un apprentissage!
C’est difficile d’intégrer la notion du règne de Dieu, dans un monde tordu et tortueux. Et pourtant, Dieu accomplit son plan. Bientôt nous serons dans la Maison du Père. En attendant, gardons nos cœurs confiants dans la direction qu’il donne à nos vies.
Dans la même série:
- La vie, ça frustre grave (Ecclésiaste 1.1-11)
- La satisfaction format XXL, ça frustre grave! (Ecclésiaste 1.12-2.26)
- L’écoulement du temps, ça frustre grave! (Ecclésiaste 3.1-15)
- La vie en société, ça frustre grave! (Ecclésiaste 3.16-4.16)
- La religiosité, ça frustre grave (Ecclésiaste 4.17-5.19)
- Avoir sans profiter, ça frustre grave! (Ecclésiaste 6)
- Le bien et le mal, ça frustre grave! (Ecclésiaste 7)
- La providence incompréhensible, ça frustre grave! (Ecclésiaste 8)
- La mort, ça frustre grave (Ecclésiaste 9.1-12)
- La bêtise, ça frustre grave! (Ecclésiaste 9.13-10.20)
- La tombée de rideau, ça frustre grave! (Ecclésiaste 11.1-12.14)