Des réflexions après avoir prêché Lévitique

Sainteté de DieuHerméneutiquePentateuque

Nous avons récemment prêché le livre de Lévitique dans notre Église à Bruxelles. Voici quelques réflexions pour nous aider à mieux comprendre et apprécier ce livre qui semble parfois difficile.

On entend parfois dire que la plupart des plans de lecture de la Bible tombent à l’eau lorsqu’ils atteignent le livre de Lévitique. Ce n’est pas une statistique vérifiée, mais j’imagine que l’on peut confirmer cela avec notre propre expérience, n’est-ce pas? Lévitique nous semble souvent compliqué et très loin de notre contexte actuel.

Pourtant, Dieu a choisi de se révéler à nous au travers des 66 livres de la Bible, et chacun de ces livres est essentiel pour nous donner une vision complète de Dieu. Cela inclut le livre de Lévitique. Donc, plutôt que de mettre le livre de Lévitique de côté, il faut l’étudier!

Dans notre Église, nous venons de terminer une série de 9 prédications pour parcourir Lévitique. Ce n’était pas facile: c’était un défi pour les prédicateurs (étudier les passages plus longs et faire l’effort de bien les expliquer) et c’était un défi pour les auditeurs (des textes plus longs à lire, avec parfois un "poids émotionnel" plus fort, par exemple sur les questions de peine de mort). Ce n’était pas facile, mais ça valait largement la peine. Nous avons tous été confrontés à la richesse de ce livre.

Dans cet article, j’aimerais partager quelques réflexions importantes, qui sont ressorties de nos prédications, à avoir en tête en étudiant le livre de Lévitique. Il ne s’agit pas d’une introduction complète au livre, ni d’un résumé du livre. Je vise simplement à partager quelques clés pour nous aiguiller dans l’étude de ce livre, et nous montrer qu’il vaut la peine d’être étudié et prêché.

À la fin de l’article, je partage la structure que nous avons suivie et quelques détails concernant notre manière de prêcher le livre.

La présence de Dieu plus que la sainteté

Lorsque l’on pense au livre de Lévitique, on pense naturellement aux sacrifices et à la sainteté. Cependant, il me semble que pour bien comprendre Lévitique, il ne faut pas voir uniquement les sacrifices et la sainteté. Il faut plutôt réaliser que ces deux thèmes (sacrifices et sainteté) sont au service d’un thème bien plus grand et bien plus important, que ce soit dans le livre de Lévitique, dans le Pentateuque, et même dans le récit biblique tout entier. Ce thème, c’est la présence de Dieu.

Dans son livre Who Shall Ascend the Mountain of the Lord, Michael Morales explique comment le livre de Lévitique se trouve au cœur du Pentateuque (les cinq premiers livres de la Bible, écrits par Moïse). Dans Genèse, nous voyons l’être humain créé dans le jardin d’Éden pour vivre en communion avec Dieu. Puis, en raison de sa rébellion, l’être humain est chassé de la présence de Dieu. De là commence une quête qui durera tout le long du récit biblique: comment retourner dans le jardin d’Éden? Comment vivre à nouveau dans la présence bienheureuse de Dieu?

Dans le livre de l’Exode, après avoir racheté son peuple de l’esclavage en Égypte, Dieu donne des instructions pour construire le tabernacle. Cette tente dans le désert est un moyen pour que Dieu habite parmi son peuple: son projet n’a pas changé, malgré la désobéissance du peuple! Par le tabernacle, Dieu promet de vivre parmi son peuple (Exode 29.43-46).

Cependant, la fin de l’Exode présente une certaine tension, alors que la gloire de Dieu remplit le tabernacle. Moïse, celui qui est habituellement le plus proche de Dieu, est empêché d’y entrer (Exode 40.34-35). C’est ainsi que le livre de l’Exode se termine. La question se pose: Est-ce que le peuple va pouvoir un jour s’approcher de Dieu à nouveau? Peut-on retourner en Éden? Si oui, comment?

La tension est résolue par le livre de Lévitique. Dans le premier verset de ce livre, nous voyons l’Éternel qui appelle Moïse à le rencontrer (Lv 1.1). Lévitique offre en particulier la solution pour qu’un Dieu saint habite parmi son peuple qui est pécheur, sans que cela n’éclate en jugement. La solution, ce sont les sacrifices. Et ce que les sacrifices permettent, c’est que Dieu continue d’habiter parmi son peuple, et que son peuple bénéficie de sa présence. C’est cela le but final (voir ce qu’il se passe dans Lévitique 9.22-24 après l’inauguration du système sacrificiel).

Ainsi, lorsque nous pensons au livre de Lévitique, il ne faut pas voir uniquement les sacrifices et la sainteté, mais il faut voir la présence de Dieu parmi son peuple. Si l’on rate cela, on rate ce vers quoi les sacrifices mènent et la raison pour laquelle la sainteté est requise. La sainteté n’est pas le thème principal du livre de Lévitique. Comme l’écrit Michael Morales, c’est plutôt à considérer comme “un moyen de parvenir à un but”, le but étant le thème de “la vie abondante de joie avec Dieu, dans la maison de Dieu”1.

L’imperfection des sacrifices

Les sacrifices sont cependant bel et bien présents dans Lévitique. En étudiant le livre, nous sommes particulièrement confrontés à leur imperfection. Tout le système très détaillé qui est mis en place ne suffit pas à régler le problème du péché. Cela ne suffit pas à apporter un vrai pardon (cf. Rm 3.25). Même le jour des expiations décrit dans Lévitique 16, qui offrait un grand pardon à tous, ne suffisait pas. Il fallait le répéter chaque année, sans fin. Le sang coulait, encore et encore, sans que rien ne change.

Lévitique nous amène donc à apprécier davantage la valeur du sacrifice de Christ. La lettre aux Hébreux offre d’une certaine manière un commentaire sur le livre de Lévitique (surtout les chapitres 8 à 10). C’est très précieux! Hébreux nous montre que Jésus est le prêtre parfait, celui qui n’a pas besoin d’offrir de sacrifices pour lui-même. Mais il est aussi le sacrifice parfait, celui qui s’est offert une fois pour toutes, dont le sang ôte réellement le péché. Il offre le vrai pardon, celui qui dure pour toujours.

Comment retourner dans le jardin d’Éden? Comment vivre à nouveau dans la présence de Dieu? Il faut un sacrifice. Jésus est ce sacrifice – unique et définitif.

D’autres enseignements de Lévitique

Sans les détailler, voici d’autres vérités importantes que le livre de Lévitique nous enseigne:

  • Le salut par substitution. C’est présent dans les sacrifices eux-mêmes, mais en particulier explicite dans Lévitique 16, lors du jour des expiations. Un bouc paie à la place du peuple. Ce sont les péchés du peuple, mais c’est lui qui meurt. C’est ainsi que le salut a lieu. C’est ainsi que Jésus nous sauve: en se substituant à nous. C’est notre peine, mais c’est lui qui la porte.
  • Rien ne peut enlever le péché. Le sang a beau couler sans arrêt dans le tabernacle, le péché ne disparaît pas pour autant. Le péché est comme une trace indélébile. Jusqu’à ce que Jésus vienne et verse son sang, donne sa vie. Il règle le problème du péché une fois pour toutes. C’est fini.
  • Le rappel de la chute. Les chapitres 11 à 15 détaillent en longueur les règles concernant ce qui est pur et ce qui est impur. Ce qui est impur n’est pas forcément un péché (car beaucoup de choses de la vie rendent impur), mais ce qui est impur est relié, d’une manière ou d’une autre, à la chute. Cela aide à comprendre qu’il ne s’agit pas de règles arbitraires, mais d’un rappel "visuel" de la réalité de la chute, du péché humain, de la distance qui existe entre l’homme et Dieu, et du besoin de sainteté.
  • La sainteté humaine. Le livre présente une autre distinction, celle entre ce qui est saint et ce qui est profane. Pour que quelque chose soit catégorisé comme saint, il faut qu’il soit (1) pur (et pas impur), et (2) consacré à Dieu ou à son service.
  • La sainteté de Dieu. Ces différents points mettent en avant la réalité d’un Dieu saint, que nous ne pouvons prendre à la légère. C’est une vérité que nous avons facilement tendance à oublier.
  • Le danger de la présence de Dieu. Nous le voyons en particulier dans Lévitique 10, avec la mort de Nadab et Abihu. On ne se présente pas n’importe comment devant Dieu. Sa présence est dangereuse pour ceux qui n’y sont pas préparés.
  • La joie de la présence de Dieu. Pour ceux qui se présentent devant Dieu selon les conditions qu’il établit, alors sa présence est ce qu’il y a de meilleur. C’est frappant de voir comment ce thème revient, depuis la Genèse jusqu’à l’Apocalypse. C’est ça le grand but de l’histoire biblique toute entière: vivre en communion avec Dieu pour toujours.

Comment prêcher Lévitique?

Il y a probablement plusieurs bonnes manières de faire! Voici comment nous l’avons fait:

Nous ne l’avons pas prêché de manière aussi détaillée que d’autres livres de la Bible. Généralement, la prédication portait sur plusieurs chapitres à la fois, et nous lisions seulement l’un de ces chapitres. Nous avons eu 9 prédications en tout.

  1. Chapitres 1-7: introduction concernant les différents types de sacrifices. Avec le recul, nous avons réalisé qu’il aurait été bien d’avoir une autre prédication avant celle-ci, d’introduction générale au livre de Lévitique. Sinon, cela fait beaucoup dans une seule prédication (1) d’introduire le livre et de donner des clés aux gens pour s’y retrouver, et (2) de prêcher 7 chapitres!
  2. Chapitres 8-10: ces chapitres mettent en avant l’instauration de la prêtrise, mais aussi un événement majeur du livre, avec la mort de Nadab et Abihu. Le chapitre 9 se termine comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes: Dieu est présent parmi son peuple! Mais ça ne va pas durer. Dès le tout début du chapitre 10, Nadab et Abihu gâchent tout. Nadab et Abihu sont jugés sur place. Le tabernacle est souillé. Le reste du livre semble donner des règles pour conserver le tabernacle pur, pour ne pas revivre ce qui est arrivé à Nadab et Abihu. Il faut non seulement distinguer ce qui est pur et impur (chapitres 11-15), mais aussi ce qui est saint et profane (chapitres 17-25), avec au milieu de cela le jour des expiations, dont l’un des buts est de purifier le tabernacle (chapitre 16).
  3. Chapitres 11-15: la distinction entre ce qui est pur et impur.
  4. Chapitre 16: le jour des expiations. Nous avons fait une prédication rien que sur ce chapitre, car c’est un chapitre clé dans la perspective du livre, mais aussi de l’histoire biblique en général.
  5. Chapitres 17-20: une première prédication qui portait surtout sur le chapitre 18, car les règles concernant la sexualité ont une importance particulière surtout aujourd’hui (cela permettait d’aller plus loin dans l’application).
  6. Chapitres 17-20: une deuxième prédication sur le chapitre 19, qui parlait plus de la sainteté en général.
  7. Chapitres 21-22: les règles concernant la sainteté des prêtres et leur perfection physique, ainsi que concernant les sacrifices. Pas facile à prêcher!
  8. Chapitres 23-25: les chapitres 23 et 25 donnent des règles concernant le calendrier du peuple d’Israël, mais le chapitre 24 est différent. Le début du chapitre (24.1-9) pointe, il me semble, vers la présence de Dieu de manière symbolique, alors que le reste du chapitre (24.10-23) rapporte le blasphème d’un homme qui est condamné à mort.
  9. Chapitres 26-27: la "double conclusion" du livre. Le chapitre 26 présente les bénédictions et malédictions liées à l’alliance que Dieu fait avec son peuple. Ce chapitre est particulièrement important dans un contexte où l’évangile de la prospérité est populaire: tellement de promesses sont tirées de ce chapitre et appliquées hors de leur contexte aux chrétiens aujourd’hui.

Benjamin Eggen

Benjamin est marié à Jessica, papa d'une petite fille, et pasteur-adjoint de l’Église Protestante Évangélique de Bruxelles-Woluwe. Il a fait ses études à l’Institut Biblique de Bruxelles, où il enseigne ponctuellement. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont Soif de plus? et Qu’est-ce que tu crois?. Vous pouvez le suivre sur sa chaîne YouTube.

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