Comment comprendre la peine de mort dans Lévitique 24?

Textes difficilesPentateuque

Lorsque Dieu instaure la peine de mort pour le peuple d’Israël, cela fait-il de lui le dictateur d’une nation barbare? Comment comprendre ces règles en tant que chrétiens?

Dans notre Église, nous sommes actuellement en train de prêcher le livre du Lévitique. Dimanche dernier, nous avons lu le chapitre 24, qui rapporte, entre autres, différentes règles concernant la peine de mort.

Voici un extrait:

17 Celui qui frappera un homme mortellement sera puni de mort; 18 celui qui frappera un animal mortellement le remplacera: vie pour vie. 19 Si quelqu'un blesse son prochain, on lui fera comme il a fait: 20 fracture pour fracture, œil pour œil, dent pour dent; on lui infligera la même blessure que celle qu'il a infligée à son prochain. 21 Celui qui tuera un animal le remplacera, mais celui qui tuera un homme sera puni de mort. 22 Vous aurez la même règle pour l'étranger que pour l'Israélite, car je suis l'Éternel, votre Dieu.

Lévitique 24.17-22, S21

Ce n’est pas la première fois que Lévitique mentionne la peine de mort: c’était déjà le cas de manière détaillée au chapitre 20, et à d’autres reprises dans le livre. Peut-être que lire ces instructions choque nos esprits modernes: est-ce que cela dépeint une société barbare? N’est-ce pas encore plus choquant que ce soit Dieu lui-même qui ordonne cela?

Cet article ne vise pas à répondre à ces questions en détail, mais à simplement apporter quelques pistes de réflexion concernant la peine de mort telle qu’elle est prescrite dans Lévitique 24. (Les lignes qui suivent sont extraites d’une prédication: le style oral a été conservé.)

Voici quatre choses à garder en tête alors que nous considérons la peine de mort dans Lévitique 24.

1. Qui Dieu est

Il faut d’abord garder en tête qui Dieu est. Il est le seul vrai Dieu. Non seulement Dieu est le Dieu unique, mais aussi, il est Dieu. C’est-à-dire qu’il n’est pas un être humain. Dieu n’est pas une version améliorée de nous-mêmes: il est dans une autre catégorie. C’est l’être suprême, celui qui mérite la gloire, celui qui a tout pouvoir, celui qui est la perfection même. Dieu est le créateur des êtres humains, c’est grâce à lui qu’ils existent. Ils lui doivent la vie. Et Dieu est le rédempteur de son peuple. C’est lui qui a racheté et délivré son peuple, comme le livre de l’Exode le montre.

On ne parle donc pas ici d’un dictateur humain, mais du Dieu de l’univers qui est bon, généreux et digne de toute notre adoration. S’attaquer à ce Dieu-là, ce n’est pas rien. C’est offensant, c’est indigne, c’est inapproprié.

C’est cela que le péché est, chaque péché: une offense envers Dieu. Pécher, c’est transgresser les bons commandements de Dieu pour le bien de ses créatures.

Si l’on a en tête qui Dieu est, on doit donc réaliser qu’il n’y a pas de "petite" offense. Il n’y a pas de péché "mignon". Et donc, il n’y a pas de petite punition. Le jugement pour le péché doit être sérieux.

2. La valeur de la vie humaine

Ensuite, il faut comprendre que ces règles telles qu’exprimées dans Lévitique 24 mettent en avant la valeur de la vie humaine. La vie humaine est précieuse, elle ne doit pas être prise à la légère. Il y a donc un principe: si quelqu’un met à mort un autre être humain, s’il commet un meurtre, alors il doit payer de sa propre vie. C’est un principe que Dieu avait déjà instauré après le déluge (Gn 9.6).

L’homme est créé à l’image de Dieu, il est porteur de l’image de Dieu. L’être humain pointe vers son créateur, il reflète son créateur. Cela veut dire que s’attaquer à l’être humain, c’est s’attaquer à Dieu lui-même, parce que c’est s’attaquer à son image. Ce n’est pas rien! La peine de mort est donc instituée dans l’Ancien Testament en partie pour souligner la valeur de la vie humaine. La vie humaine ne doit pas être prise à la légère1.

3. La mort que nous méritons tous

Pour comprendre pourquoi Dieu peut ordonner la mise à mort d’autres êtres humains, il faut comprendre ce que nous méritons tous, chacun de nous, devant Dieu: personne n’est innocent, tous sont coupables.

Dieu avait prévenu Adam qu’une désobéissance de sa part allait entraîner la mort (Gn 2.17). On sait également que le salaire du péché, ce que le péché mérite, c’est la mort (Rm 6.23). La mort physique, et le jugement éternel: c’est ça que chaque être humain devrait recevoir en raison de sa rébellion envers Dieu.

Le fait qu’Adam ne soit pas mort immédiatement après avoir désobéi à Dieu, c’était une grâce de la part de Dieu. Ce n’était pas mérité. Dieu a suspendu son jugement. Le fait que l’on ne soit pas mort, à cause de notre péché, mais que l’on soit toujours en vie, malgré notre rébellion envers Dieu, c’est également une grâce. Ce n’est pas mérité.

Voyez-vous, nous avons tendance à penser que Dieu nous doit la vie. Nous pensons que la vie est un dû, quelque chose que l’on mérite. Cela nous amène à penser que lorsque Dieu juge, il est injuste, il exagère.

Mais c’est plutôt l’inverse: Dieu ne nous doit pas la vie. Ce que nous méritons, c’est la mort. Cependant, dans sa grâce, Dieu suspend son jugement, à tellement de reprises. L’Ancien Testament est rempli d’exemples où Dieu ne donne pas au peuple ce que le peuple mérite: il suspend son jugement, et donne sa grâce – sa faveur imméritée.

Cependant, parfois, Dieu suspend sa grâce, et il manifeste son jugement. Lorsqu’il le fait, nous devons réaliser que ce n’est pas de l’injustice, mais c’est plutôt la manifestation de sa justice. Dieu donne ce qui est mérité.

C’est dans ce cadre-là que la peine de mort pour les différentes fautes doit se comprendre. Dieu n’a jamais condamné quelqu’un qui était innocent… Ce ne sont pas des innocents qui meurent, mais des coupables.

4. Le contexte particulier du peuple d’Israël

Enfin, il faut garder en tête le contexte particulier du peuple d’Israël en tant que nation. Nous ne pouvons pas prendre les règles qui sont données ici et les copier-coller pour les appliquer telles quelles dans notre contexte.

Le but de cet article n’est pas de délimiter la position chrétienne concernant la peine de mort aujourd’hui2. Cependant, ce que je veux souligner, c’est que, peu importe notre position, nous devons réaliser que ces règles ont été données dans un contexte précis, c’est-à-dire le contexte d’Israël en tant que nation, dont Dieu était le roi. C’était une théocratie – une nation dirigée par Dieu.

Nous devons aussi réaliser que le but d’Israël en tant que peuple était d’être une lumière pour les nations, d’attirer les nations en leur montrant à quoi ressemblait le caractère de Dieu (cf. Ex 19.6). Par leur manière de vivre, les Israélites étaient appelés à refléter la sainteté de Dieu, pour montrer qui Dieu était. C’est pour cela que les comportements qui déshonoraient Dieu ne pouvaient pas être tolérés, et que différentes punitions y étaient associées, dont la peine de mort pour certains cas.

Conclusion

Je suis conscient qu’un tel article ne répond pas à toutes les questions et ne fait qu’effleurer la surface. J’espère que ces différents éléments montrent au moins que, lorsque Dieu met en place un principe de peine de mort dans l’Ancien Testament, il serait erroné d’y voir une nation barbare dirigée par un dictateur. Plutôt, il faut voir la sainteté et la justice de Dieu, qui prend le péché au sérieux, et qui montre cela à son peuple.

Résistons au danger de nous habituer trop facilement à la grâce de Dieu, et de penser qu’il doit suspendre son jugement. Sachons plutôt apprécier sa justice, en étant reconnaissant que le trône du juge de l’univers n’est pas vide. Dieu est celui "qui juge toute la terre", et il appliquera le droit (Gn 18.25). Sans aucune erreur. Nous pouvons lui faire confiance.


Benjamin Eggen

Benjamin est marié à Jessica, papa d'une petite fille, et pasteur-adjoint de l’Église Protestante Évangélique de Bruxelles-Woluwe. Il a fait ses études à l’Institut Biblique de Bruxelles, où il enseigne ponctuellement. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont Soif de plus? et Qu’est-ce que tu crois?. Vous pouvez le suivre sur sa chaîne YouTube.

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