Si Dieu est hors de notre portée et que sa connaissance nous dépasse, peut-on vraiment prétendre parler de lui avec justesse? Ne devrions-nous pas nous taire pour respecter cette grande distance qui existe entre Dieu et nous?
D’une certaine manière, la théologie peut être définie comme l’étude de Dieu, et de toutes choses qui sont en relation avec Dieu. Cependant, cela peut amener à soulever une question. Dieu est hors de notre portée: il nous dépasse. Il est le créateur, nous sommes des créatures. Il est infini, nous ne le sommes pas. Comme nous l’avons vu dans un précédent article, il est "incompréhensible", c’est-à-dire que sa connaissance est hors de notre portée.
Alors, à quoi bon faire de la théologie? N’est-ce pas même arrogant de prétendre pouvoir étudier Dieu?
Tandis que nous affirmons la transcendance de Dieu, nous devons aussi affirmer que ce Dieu, même s’il est majestueux et au-delà de la compréhension humaine, peut réellement être connu. Voici quelques raisons brèves, à partir de l’Écriture, qui prouvent cela.
Premièrement, l’Écriture présente un Dieu qui est exalté haut dans les cieux, infini et majestueux dans sa transcendance, et qui pourtant désire avoir une relation personnelle avec ses créatures. L’Écriture révèle un Dieu qui est transcendant et immanent, dans une unité parfaite.1 Ésaïe 57.15 met en avant cela avec merveille:
Car ainsi parle le Très-Haut dont la demeure est éternelle et dont le nom est saint: je demeure dans les lieux élevés et dans la sainteté, mais aussi avec l’opprimé et celui qui est humilié dans son esprit, afin de ranimer les esprits humiliés, afin de ranimer les cœurs opprimés.
Notre doctrine doit donc concilier l'idée d'un Dieu qui “demeure dans les lieux élevés et la sainteté” et qui, en même temps, est avec l’opprimé, afin de ranimer son cœur. Ces deux vérités vont ensemble et ne doivent pas être utilisées l’une contre l’autre, car elles décrivent le même Dieu, révélé par l’Écriture.
Deuxièmement, le fait que Dieu désire être connu est évident du fait de l’existence d’une révélation. L’existence d’une révélation naturelle (la création) et d’une révélation surnaturelle (l’Écriture) est la preuve que Dieu veut se faire connaître par ses créatures.
Par exemple, dans Romains 1.19, en parlant des êtres humains, Paul écrit que “ce qu’on peut connaître de Dieu est manifeste pour eux, car Dieu le leur a manifesté”. Certaines vérités à propos de Dieu peuvent être connues par les humains, et Dieu leur a révélé ces choses. Si Dieu s’est révélé à nous, c’est bien la preuve qu’il désire être connu et que nous pouvons le connaître.
Troisièmement, l’Écriture encourage les chrétiens à grandir dans la connaissance de Dieu, montrant par là qu’une certaine connaissance de Dieu est possible (Ép 1.17-19; Ép 3.18-19; 2P 3.14-18).2 Il y a une connaissance de Dieu que les êtres humains peuvent avoir, et ils ont des impératifs venant de Dieu lui-même à poursuivre cette connaissance. Comme Steven Duby l’écrit, “c’est l’urgence de ces textes, et non pas la curiosité vaine ou l’ambition professionnelle, qui donne son impulsion à la théologie comme discipline discursive ou académique”3.
Quatrièmement, Éphésiens 3.8 présente le désir de Paul de prêcher la "richesse insondable de Christ". Ce verset montre bien que l’incompréhensibilité divine (le fait que l’on ne puisse pas tout comprendre de Dieu) n’implique pas l’inconnaissabilité divine (l’idée selon laquelle nous ne pourrions pas connaître Dieu). La richesse de Christ est "insondable", et pourtant le désir de Paul est de prêcher cette richesse. Cela présuppose, du moins en partie, la possibilité pour Paul de comprendre cette richesse, afin de la déclarer. Cela présuppose également, au moins en partie, la possibilité pour les païens, à qui Paul veut prêcher, de comprendre cette richesse.
Oui, Dieu est incompréhensible: sa connaissance est loin au-delà de notre portée. Oui, Dieu est dans une tout autre catégorie et sa grandeur nous dépasse. Et pourtant, cela ne met pas fin à notre volonté de le connaître, de l’étudier, et donc de faire de la théologie. Nous voyons au contraire que la Bible nous y encourage.