Que penser de la loi sur la vente d'une fille en esclavage dans Exode 21?

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L’esclavage est l’un des sujets les plus épineux avec lesquels un Occidental peut se débattre lorsqu’il étudie les Écritures. Ajoutez-y l’idée d’un homme vendant sa propre fille comme esclave et vous obtenez un véritable buisson de ronces!

Exode 21.7-11

Si un homme vend sa fille pour être esclave, elle ne sortira point comme sortent les esclaves. Si elle déplaît à son maître, qui s’était proposé de la prendre pour femme, il facilitera son rachat; mais il n’aura pas le pouvoir de la vendre à des étrangers, après lui avoir été infidèle. S’il la destine à son fils, il agira envers elle selon le droit des filles. S’il prend une autre femme, il ne retranchera rien pour la première à la nourriture, au vêtement, et au droit conjugal. Et s’il ne fait pas pour elle ces trois choses, elle pourra sortir sans rien payer, sans donner de l’argent.

À première lecture, cela semble effroyable. Il n’y a aucun doute là-dessus. Mais c’est parce que nous vivons à une époque très différente de l’histoire. Nous devons essayer autant que possible de mettre temporairement de côté nos cadres culturels et de regarder le texte avec des yeux nouveaux.

Voici quelques principes à garder à l’esprit:

Filles et esclavage dans l’Ancien Testament

1. L’intention de cette loi est de protéger une telle fille. Si son père la vendait comme esclave pour accomplir de simples tâches serviles sans prévoir de mariage, il la privait de ses droits fondamentaux au mariage et à la procréation.

2. Le mot hébreu employé ici fait référence à une servante qui deviendrait éventuellement une concubine ou une épouse. La transaction comprend le montant pour son service ainsi que la dot. L’arrangement reconnaît son honneur en tant que femme israélite, une femme qui pourrait devenir une épouse, même si elle rejoint la maisonnée en tant que servante. Le mariage n’est pas automatique, mais son traitement est sauvegardé quoi qu’il arrive.

3. Alors qu’au XXIe siècle, nous pouvons nous sentir mal à l’aise à l’idée que nos parents choisissent un conjoint pour nous, les mariages arrangés étaient la norme à cette époque. Il n’y a donc pas beaucoup de différence entre un tel arrangement contractuel, au sens large, et celui d’une famille désespérément pauvre qui choisit un mari riche pour sa fille. L’intention derrière cet échange est de rechercher une vie meilleure pour leur fille. Il peut très bien s’agir d’une question de vie ou de mort dans une société agraire où les famines, les sécheresses et les guerres rendent la survie précaire.

4. Il s’agit d’un choix d’une famille pauvre pour assurer la survie de sa fille et lui assurer un époux. Le v. 10, où il est question de la manière dont son nouvel époux doit subvenir à ses besoins, évoque la "nourriture" en français. Mais en hébreu, le terme utilisé est "viande". Cela implique fortement qu’elle est vendue à une famille riche qui peut lui fournir une alimentation comprenant de la viande.

5. Nous devons comprendre qu’il la prend pour lui comme épouse ou qu’il la donne à son fils. Dans tous les cas, il doit lui accorder les droits familiaux d’une épouse ou d’une belle-fille. Cela contraste fortement avec ce que nous savons être une pratique courante dans l’histoire du Sud des États-Unis à l’époque de l’esclavage: des femmes que leurs maîtres utilisent pour leur propre plaisir n’ont aucun droit. À cet égard, la loi mosaïque, loin de traiter les femmes comme des objets, leur accorde de la dignité, du respect et de la protection.

6. Les conditions de son rachat sont différentes de celles de l’esclave mâle, car il est de son intérêt de rester dans la maisonnée, à condition que ses droits soient respectés. La raison pour laquelle elle ne doit pas être libérée (comme l’esclave masculin) est qu’une femme sans protection à cette époque est très vulnérable et a besoin de faire partie d’un foyer. Si elle est relevée de ses fonctions (si pour une raison quelconque, elle ne plaît pas à sa nouvelle famille), ses parents peuvent la racheter.

Mais si sa nouvelle famille ne respecte pas sa part du contrat, si elle ne s’occupe pas d’elle comme l’exige la loi, ses parents peuvent la récupérer sans avoir à restituer la somme reçue lors de l’échange initial. Ils n’ont pas besoin de la racheter. Au lieu de cela, elle reçoit une liberté totale. Cette loi, loin de dégrader la femme, protège la fille d’un pauvre Israélite d’être transmise d’une famille riche à une autre comme un vulgaire morceau de viande.

Conclusion

Ce genre de lois nous semble tout à fait étranger et insolite. Lorsque nous étudions la Bible, nous devons accepter que, bien qu’elle soit largement applicable à toutes les époques et parmi tous les peuples, elle est à l’origine destinée à servir une nation dans un contexte spécifique. Que le Seigneur nous accorde la sagesse de comprendre et d’appliquer ces vérités à nos propres réalités.


Angie Velasquez Thornton

En équipe avec son mari Daniel, Angie a servi le Seigneur au Sénégal pendant 10 ans, dans la formation des leaders. Installés à Montréal avec leurs 2 filles depuis août 2017, ils servent à l'Église Baptiste Évangélique Emmanuel et dans l'AEBEQ. Angie est titulaire d'un MDiv de Moody Theological Seminary. Depuis mai 2021, elle coanime le podcast Chrétienne, avec Aurélie Bricaud. Elle est également Responsable du ministère féminin de SOLA (TGC Québec) et blogueuse sur le site The Gospel Coalition Canada.

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