Une vision biblique des menstruations

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Discuter des menstruations en public semble être une entreprise risquée. Pourtant, nos règles ont un impact si important sur nos vies que nous gagnerions à avoir des conversations franches sur le sujet. De plus, il est utile pour nos frères de mieux comprendre ce que vivent leurs mères, leurs sœurs, leurs filles, leurs épouses et leurs amies.

Les règles dans l’espace

Considérez cette histoire de la première femme américaine dans l’espace: en 1983, alors que Sally Ride se préparait pour sa mission d’une semaine, les ingénieurs de la NASA lui ont demandé si 100 tampons suffiraient pour la semaine de ses règles. Cela aurait représenté plus de 70 tampons de plus que ce dont elle avait besoin! Bien que ces ingénieurs de la NASA fussent parmi les plus grands esprits des États-Unis, ils n’avaient que très peu d’idées sur la façon dont le corps d’une femme fonctionne!

Une requête d’une auditrice

La première personne à suggérer une discussion sur un tel sujet a été une auditrice de notre podcast Chrétienne. En examinant sa demande, je suis tombée sur la publication d’un livre intitulé A Brief Theology of Periods (en français: Aïe mes règles! Une perspective chrétienne) et sur une recension (en anglais) favorable du livre sur le blog de TGC. De plus, j’ai pris connaissance de trois articles publiés sur Évangile21 au sujet des règles. Je me suis donc dit que si The Good Book Company, TGC, et É21 étaient assez audacieux pour publier sur ce sujet, c’est qu’il y a un réel besoin, et que nos auditrices et auditeurs pourraient bénéficier d’une telle discussion.

Statistiques générales sur les règles

Quelques statistiques peuvent aider à replacer l’idée dans son contexte:

  • Chaque mois, 1,8 milliard de personnes dans le monde ont leurs règles.
  • La femme moyenne d’aujourd’hui a environ 400 à 500 règles dans sa vie.
  • Les règles font partie intégrante de la façon dont les femmes vivent le monde en tant que créatures incarnées. Dieu nous a dotés d’un esprit, d’une âme et d’un corps… et pour 50 % de la population, pendant environ 2 280 jours de sa vie, ce corps saigne.
  • L’âge moyen du début des menstruations est de 12,5 ans. C’est beaucoup plus tôt qu’il y a environ 150 ans, où l’âge moyen aurait été de 17 ans.
  • En moyenne, une femme aura ses règles jusqu’à l’âge de cinquante ans, soit un total de 37,5 ans. Pendant cette période, elle aura environ 500 menstruations.
  • Les cycles menstruels varient, mais il y en a en moyenne 13 par an.
  • Une femme aura ses règles pendant une durée équivalente à 6,5 ans de sa vie.
  • Le premier tampon a été inventé en 1937 par un médecin américain pour sa femme, une infirmière. Celle-ci l’encourageait à développer et à commercialiser un produit plus adapté que les serviettes hygiéniques. Les Tampax, comme on les a appelés, ont rencontré une grande résistance de la part des politiciens et du clergé. Les leaders religieux se sont plaints que ces “produits pécheurs” porteraient atteinte à la virginité. C’est pourquoi, jusque dans les années 1950, chaque paquet de tampons devait porter l’avertissement: « Ne convient pas aux femmes non mariées. » Aujourd’hui encore, dans de nombreux pays traditionnels du monde en voie de développement, les ventes de serviettes hygiéniques sont nettement supérieures à celles des tampons.

Les règles à travers le monde

Dans de nombreuses régions du monde, les règles peuvent représenter un défi encore plus grand que pour nous en Occident:

  • Dans les pays à faible revenu, la moitié des écoles ne disposent pas de services d’eau, d’assainissement et d’hygiène adéquats, indispensables pour permettre aux filles et aux enseignantes de gérer leurs menstruations.
  • Les femmes qui ne disposent pas d’installations sanitaires adaptées aux femmes sur leur lieu de travail perdent leur salaire pour les jours de travail manqués pendant leurs menstruations et sont considérées comme des travailleuses peu fiables, ce qui réduit leurs possibilités d’avancement.
  • Une étude menée au Kenya a révélé que 95% des filles en période de menstruation manquaient un à trois jours d’école par mois, que 70% d’entre elles signalaient un impact négatif sur leurs notes et que plus de 50% déclaraient avoir pris du retard à l’école à cause de leurs menstruations.
  • Une enquête menée au Bangladesh a révélé que seulement 6% des écoles dispensent un enseignement sur la santé et l’hygiène, et que seulement 36% des filles avaient des connaissances préalables sur la menstruation avant leurs premières règles.

Un soin pastoral incroyable

Une sœur africaine a témoigné un jour qu’elle était venue à Christ alors qu’elle était adolescente et issue d’une famille pauvre. Ses parents l’ont rejetée et elle a dû se débrouiller seule. Son pasteur était un véritable berger. Il s’est soucié d’elle spirituellement, mais aussi matériellement, de manière très concrète. Par exemple, il lui a demandé si quelqu’un l’aidait à acheter des fournitures pour son cycle menstruel! Il lui a ensuite donné de l’argent pour acheter ce dont elle avait besoin, car il semblait parfaitement conscient de la difficulté que cela pouvait représenter pour une adolescente livrée à elle-même. Je trouve ce niveau d’attention pastorale incroyable!

Nos corps proclament la bonté de Dieu dans la création

Si nous nous tournons maintenant vers les Écritures, nous lisons qu’au commencement, Dieu a créé l’homme et la femme. Leurs corps étaient différents à dessein, et ensemble ils devaient procréer et remplir la terre. La sexualité, la procréation et tout ce qui les accompagne étaient le bon plan de Dieu pour les porteurs de son image. Nos corps, par conséquent, proclament la bonté de Dieu dans la création. Puisque nous croyons au bon dessein de Dieu, nous pouvons considérer notre corps, y compris sa capacité de procréer, comme bon et comme rendant gloire à notre Créateur. Nous avons été façonnés avec la capacité de concevoir et de nourrir une nouvelle vie en nous. C’est un don de Dieu!

Nos corps proclament la bonté de Dieu à la chute

Ensuite, nos corps proclament également la bonté de Dieu dans la chute. Nos premiers parents auraient mérité une mort instantanée pour leur péché. Au lieu de cela, Dieu leur témoigne sa miséricorde. Mais leur rébellion entraîne des conséquences. Dans l’oracle du jugement de Genèse 3, l’Éternel dit à Ève qu’il va augmenter considérablement les douleurs de l’accouchement. Donc, si Ève avait ses règles avant la chute, on peut supposer que ses menstruations n’étaient pas accompagnées de crampes atroces, de syndrome prémenstruel, d’endométriose, de honte et de l’impureté qui a été associée plus tard aux menstruations.

Ainsi, notre corps proclame non seulement la vérité et la bonté de Dieu notre Créateur, mais aussi de Dieu notre Juge. Depuis la chute, l’ensemble du processus de procréation, avec ses différents systèmes et étapes, s’accompagne de douleurs à de nombreux niveaux, non seulement physiques mais aussi émotionnelles. Pensez aux bouleversements émotionnels que connaissent de nombreuses femmes en raison des changements hormonaux provoqués par le syndrome prémenstruel. Pensez à la douleur de désirer des enfants et de ne pas pouvoir en avoir. Dans ce cas, les règles sont le rappel mensuel d’un utérus stérile.

Nos corps proclament l’espoir en Dieu

Dieu soit loué: l’histoire ne s’arrête pas à Genèse 3. Même après la chute, notre corps proclame l’espoir en Dieu. Et la suite de l’histoire, et en particulier les utérus stériles qui sont rendus féconds, nous enseigne l’espoir dans le Rédempteur. Nous avons quelque peu exploré cette idée dans l’article sur l’enfantement comme thème de la théologie biblique. Dieu choisit de rendre gloire à son nom en interrompant de manière spectaculaire les menstruations des matriarches d’Israël, leur permettant ainsi de mettre au monde la vie. Et par leur semence est venu le Libérateur, qui a également connu une naissance surnaturelle. L’expérience personnelle de Marie a confirmé que l’annonce de l’ange Gabriel était vraie lorsque ses règles ont pris fin et que son ventre a commencé à grossir.

Lévitique 15 et l’impureté des femmes

Et pourtant, la question se pose de savoir ce que nous devons faire des lois de Lévitique 15 concernant les femmes en période de menstruation. Si nous les lisons à travers nos cadres occidentaux, elles semblent dégradantes envers les femmes. Mais, comme je l’ai écrit dans une série d’articles sur comment interpréter les passages difficiles de la Bible, nous devons nous souvenir de certaines choses lorsque nous sommes confrontés à des questions auxquelles nous ne pouvons pas répondre par nous-mêmes. Premièrement, Dieu est bon. Point final. Il nous faut régler cela dans nos cœurs avant d’aller plus loin. Deuxièmement, nous devons faire le dur travail d’éplucher les couches du temps pour comprendre quelque chose de perplexe dans son contexte culturel et historique. C’est un travail difficile. Mais c’est très gratifiant.

Comprendre la différence entre péché et impureté

Je trouve cette explication super utile. Je voudrais ajouter quelques commentaires:

  1. Lorsque nous examinons tous les cas possibles d’impureté dans la Torah, l’impureté semble être la norme et la pureté l’exception. C’est quelque chose!
  2. Quant à ce passage, nous n’avons pas le temps de lire le chapitre en entier, mais v. 1-17 parlent des règlements concernant l’homme et son impureté, due à une maladie sexuellement transmise et aussi aux simples éjaculations. Cela démontre que la Bible en général et ce passage en particulier parle autant de l’homme que de la femme et son impureté rituelle.
  3. Ce passage se divise en deux parties. La première, de vv. 19-24, traite du cas normal de la femme qui a ses règles. Puis, de vv. 25-30, ça parle de la femme qui a des flux de sang hors de ses époques régulières. Ce genre de saignement semble être dû à une infection ou une maladie. La plus grande différence entre les deux est que la femme avec un flux qui dure plus qu’à ordinaire doit offrir un sacrifice (v. 29), tandis que la femme avec ses règles, non. Et il en est de même pour l’homme dans la section précédente.
  4. L’homme qui éjacule n’a pas à offrir un sacrifice, mais l’homme avec une infection en offrira. Tous les deux les offriront lorsqu’ils seront purifiés de leur flux (v. 13, 28).
  5. Être impur ne signifiait pas être coupable. Après tout, enterrer un mort n’était pas un péché, mais cela rendait la personne impure. Avoir des rapports sexuels n’était pas un péché (la Bible l’encourage!), mais cela rendait le couple impur. Avoir la lèpre n’était pas un péché. Tout comme les menstruations, c’était quelque chose que la personne ne pouvait pas choisir. Une femme ne fait pas le choix de se détourner de Dieu une semaine par mois. Elle vit simplement dans le corps que Dieu lui a donné. Remarquez qu’aucun sacrifice n’est requis pour une femme après ses menstruations. Par conséquent, une femme n’est pas mauvaise par nature parce qu’elle a ses règles. Et si elle n’est pas mauvaise, alors elle n’est pas punie. Si elle n’est pas punie, il ne devrait pas y avoir de honte pendant ses menstruations et les actions qui les entourent, y compris ses périodes d’impureté. Il est important de s’en souvenir car, selon la façon dont nous avons été élevées, de nombreuses femmes ont grandi avec une grande honte de leur corps en général, et des menstruations en particulier. C’est impressionnant de penser que les hommes ne saignent que lorsque quelque chose ne va pas, tandis que tous les 28 jours, « le corps des femmes leur raconte une parabole sur l’effusion de sang pour le renouvellement de la vie ».
  6. Dans le Proche-Orient ancien, les femmes ayant des menstruations régulières étaient moins nombreuses qu’en Occident aujourd’hui, car les femmes se mariaient plus jeunes et avaient plus d’enfants. Il n’était pas inhabituel pour une femme d’avoir 10 enfants. Et n’oubliez pas que les femmes enceintes n’étaient pas impures sur le plan cérémoniel. En outre, les femmes sevraient leurs petits plus tard, à l’âge de 2 ou 3 ans, de sorte qu’elles ne reprenaient pas leurs cycles menstruels normaux aussi tôt que nous le faisons en Occident après l’accouchement. Nous avons tendance à nous marier plus tard, à avoir des enfants plus tard, à avoir moins d’enfants et à les sevrer plus tôt, de sorte que nous sommes susceptibles d’avoir des menstruations plus nombreuses pour beaucoup plus de temps que nos homologues israélites. Ceci est important car ceci signifie que toutes les femmes n’étaient pas interdites d’entrer dans la présence de Dieu pendant une semaine complète chaque mois. Le nombre de femmes auxquelles cela s’appliquait était probablement bien inférieur à ce que nous imaginons.

Kathleen Nielson sur Lévitique 15

Kathleen Nielson est une auteure qui nous aide à interpréter le Lévitique 15 et d’autres passages semblables. Dans son livre Women & God: Hard Questions. Beautiful Truth, elle dit ce qui suit:

Pourquoi Dieu appellerait-il une femme « impure » lorsqu’elle a ses règles mensuelles? Deux choses nous aident ici: premièrement, si nous lisons l’ensemble du Lévitique 15, nous constatons qu’une attention égale est accordée aux décharges reproductives des hommes, avec une contamination égale et des exigences de purification égales. Dieu ne cherche pas à s’en prendre aux femmes; il cherche à communiquer quelque chose au sujet de la propreté et de l’impureté chez tous les êtres humains. Et ce quelque chose n’a pas seulement à voir avec la protection de son peuple contre les maladies qui se transmettent facilement par le sang et le sperme, bien que ce soit là un effet positif de ces lois.

Le deuxième point, plus large, est le suivant: par ces lois cérémonielles, Dieu communiquait sa sainteté et sa miséricorde. Il faut lire le Lévitique pour comprendre les exigences détaillées de la purification et du sacrifice sanguin, qui soulignent toutes la manière dont notre péché nous empêche d’approcher un Dieu saint. Pour que nous puissions nous présenter devant un tel Dieu dans l’adoration, le péché doit être traité – et Dieu a miséricordieusement fournit un moyen.

Les écoulements de sang et de sperme ne sont pas mauvais en soi. Ces écoulements étaient des symboles d’impureté. Le sang en lui-même représente la vie: « La vie de toute créature, c’est son sang » (Lv 17.14). Ainsi, la perte de sang, comme dans l’hémorragie d’une femme, était directement associée à la mort – la mort qui s’est abattue sur la race humaine comme jugement de Dieu pour le péché. Ces rituels de purification de l’Ancien Testament pointent en arrière vers la chute et en avant vers le Seigneur Jésus, qui a versé son sang pour nous purifier de notre péché et nous donner la vie éternelle. Dans Luc 8.43-48, nous voyons Jésus accueillir une femme désespérée souffrant d’un écoulement chronique de sang qui, dans la foi, l’avait touché et avait été guérie par lui. Ces lois de l’Ancien Testament nous aident à saisir la beauté de cette scène.

Les menstruations et les Pères de l’Église

Malheureusement, tout au long de l’histoire de l’Église, certains Pères de l’Église ont mal compris les lois lévitiques et les ont transposées sur l’Église:

  • Déjà en 241, Dionysius, archevêque d’Alexandrie, écrit pour déclarer:

La femme qui a ses règles ne doit pas s’approcher de la Sainte Table, ni toucher le Saint des saints, ni aller dans une église, mais doit prier ailleurs.

  • Des conciles locaux en France: Orange (441) et Épaone (517) décrétèrent qu’aucune femme diacre ne pouvait être ordonnée dans leur région. La raison en était la crainte que les femmes ayant leurs règles ne souillent le sanctuaire.
  • L’évêque Timothée d’Alexandrie (680) stipula que les couples devaient s’abstenir de relations sexuelles les samedis et dimanches avant de recevoir la communion. Les femmes ayant leurs règles ne pouvaient recevoir la communion, ne pouvaient être baptisées ni visiter une Église à Pâques.
  • L’évêque Théodore de Canterbury (690) interdit aux femmes ayant leurs règles de visiter une Église ou de recevoir la communion. Les femmes restaient impures durant les 40 jours après avoir mis au monde un enfant.

Dans la deuxième partie de cette série, nous concluons cette discussion en explorant ce que la nouvelle alliance nous enseigne à ce sujet et les leçons à tirer des règles pour l’édification du corps du Christ.

Découvrez deux épisodes de notre podcast en lien avec cet article:

Angie Velasquez Thornton

En équipe avec son mari Daniel, Angie a servi le Seigneur au Sénégal pendant 10 ans dans la formation des leaders. Installés à Montréal avec leurs 2 filles depuis août 2017, ils servent dans leur Église locale et dans l'AEBEQ. Angie est titulaire d'un MDiv de Moody Theological Seminary. Elle est coanimatrice du podcast Chrétienne avec Aurélie Bricaud, Responsable du ministère féminin de SOLA (TGC Québec), animatrice de sa chaîne YouTube d'enseignement textuel, blogueuse chez TGC Canada et auteure et éditrice du livre Elles ont vu la fidélité de Dieu aux Éditions Clé en partenariat avec TPSG.

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N. VanWingerden