L’histoire de la crucifixion de Jésus, au premier regard, paraît loin de l’éclat des victoires spectaculaires remportées par les super-héros Marvel.
Condamné comme un criminel, rejeté par son peuple et exécuté par les autorités romaines, Jésus semblait avoir été écrasé par des forces bien plus grandes que lui. Pourtant, dans ses lettres, l’apôtre Paul lève le voile: Jésus n’a pas fait "que" nous sauver. Il a remporté une victoire cosmique.
Paul lève le voile sur une vérité fondamentale: la souveraineté de Christ s’étend sur toutes les réalités, visibles et invisibles, terrestres et spirituelles. Ces deux sphères – les autorités terrestres et les puissances spirituelles – ne sont pas séparées, mais étroitement liées. Leur interaction, souvent cachée, joue un rôle central dans le drame cosmique de la rédemption.
À l’époque de Paul, l’Empire romain dominait le monde connu, imposant sa puissance par la force et la propagande. L’autorité romaine était omniprésente, exigeant obéissance et hommage, et écrasant toute rébellion. Rome promettait la Pax Romana – véritable "évangile impérial1" – en échange d’une soumission totale à ses institutions et de la vénération de son empereur.
La crucifixion de Jésus illustre parfaitement cette oppression terrestre. Condamné par l'administration judiciaire romaine, Jésus a été publiquement humilié et exécuté comme un criminel, dans une démonstration de la toute-puissance de Rome. À première vue, la croix représentait une victoire de l'autorité romaine sur un opposant perçu comme une menace.
Dans l'Antiquité, la vie humaine était largement perçue comme soumise aux puissances spirituelles. Les gens vivaient sous la domination des démons et des divinités territoriales, craignant leur influence et cherchant à les apaiser par des offrandes. Cette vision du monde engendrait un profond esclavage spirituel et un sentiment d’impuissance face à un destin amoral.
Paul révèle que, derrière l’appareil romain, se cachait une influence spirituelle démoniaque. Les puissances des ténèbres, les trônes et les dominations spirituelles œuvraient sur la scène spirituelle dans le même but (Col 2.15; Lc 22.3-4; Ac 4.27-28). Ces puissances démoniaques corrompent les structures créationnelles – politiques, économiques, sociales, etc. – afin de détourner les hommes de Dieu. La crucifixion de Jésus en est l’exemple ultime: les puissances spirituelles et terrestres se sont unies pour accomplir ce qu’elles pensaient être leur triomphe sur le Fils de Dieu.
Jésus n’est pas mort par hasard ni par accident. Il n’a pas été tué de nuit dans une ruelle par un brigand. Sa mort a été orchestrée par Dieu pour répondre à ses exigences à la fois morales et juridiques. Jésus devait mourir sous une sentence judiciaire, condamné comme un criminel par les autorités humaines les plus légitimes de son époque. Il devait être exposé publiquement, compté parmi les transgresseurs, conformément à la prophétie d'Ésaïe 53.12.
Ce n’est donc pas un hasard si Jésus a été jugé et condamné par un juge romain. L’Empire romain, avec son génie pour le droit et la justice, représentait l’autorité judiciaire la plus élevée du monde d’alors. Ce choix providentiel a permis de démontrer l’innocence parfaite de Jésus.
En effet, lors de son procès, même Pilate a reconnu qu’il ne trouvait aucun motif de condamnation en lui (Lc 23.4; Jn 18.38). En condamnant l’innocent, Pilate s’est condamné lui-même et, par extension, toute l’humanité avec lui.
Cette mort est paradoxale à bien des égards.
Premièrement, cette justice qui se croyait parfaite se retourne contre l’homme: elle démontre en réalité la corruption des autorités terrestres. Jésus n’a pas été crucifié pour ses propres crimes. Il est mort juste, victime d’une sanction légale injuste.
Deuxièmement, Pilate, représentant de l’autorité terrestre la plus élevée, a dispensé la justice au nom de Dieu tout en rendant un verdict profondément injuste. Derrière cette sentence humaine se tenait la sentence juste de Dieu, qui faisait de la croix le lieu où le péché serait puni.
Il est significatif que Jésus ait été condamné à la crucifixion, une forme de punition romaine considérée comme infâme et réservée aux criminels les plus vils et aux esclaves. Les citoyens romains eux-mêmes étaient exemptés de ce châtiment. En mourant de cette mort infâme, Jésus a satisfait aux exigences les plus extrêmes de la loi humaine tout en portant la malédiction divine. Jésus a subi la colère de Dieu jusqu’au bout. Sa crucifixion fut l’exercice direct de la justice divine.
Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi en devenant malédiction pour nous, puisqu’il est écrit: Tout homme pendu au bois est maudit.
Galates 3.13
Derrière cette puissance terrestre, Paul dévoile l’action des forces démoniaques, qui étaient à l’œuvre pour mettre à mort Jésus:
Il a effacé l’acte rédigé contre nous qui nous condamnait par ses prescriptions, et il l’a annulé en le clouant à la croix. Il a ainsi dépouillé les dominations et les autorités et les a données publiquement en spectacle en triomphant d’elles par la croix.
Colossiens 2.14-15
L’interaction entre les autorités terrestres et spirituelles s’inscrit dans une guerre cosmique entre deux royaumes: le royaume des ténèbres, qui agit à travers des structures terrestres corrompues pour maintenir l’humanité dans l’esclavage spirituel et l’opposition à Dieu; et le royaume de Dieu, inauguré par Jésus, qui libère les hommes de l’emprise du péché et des puissances spirituelles.
Il nous a délivrés de la puissance des ténèbres et nous a transportés dans le royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous sommes rachetés, pardonnés de nos péchés.
Colossiens 1.13-14
Paul utilise l’image du cortège triomphal pour révéler ce qui s’est réellement produit à la croix.
En appliquant une métaphore militaire romaine au monde spirituel, Paul souligne la dimension cosmique de la victoire de Christ. Dans l’Empire romain, un général victorieux défilait à travers la ville, exposant les prisonniers vaincus enchaînés pour que tous les voient. De même, Jésus, en acceptant l’humiliation de la croix, a triomphé de Satan et ses démons.
Par sa mort, Jésus a porté la malédiction, satisfait à la justice divine et restauré l’harmonie cosmique.
Il nous a fait connaître le mystère de sa volonté, conformément au projet bienveillant qu’il avait formé en Christ pour le mettre à exécution lorsque le moment serait vraiment venu, à savoir de tout réunir sous l’autorité du Messie, aussi bien ce qui est dans le ciel que ce qui est sur la terre.
Éphésiens 1.9-10
Par son sacrifice, Jésus les a réduits à l’impuissance. Il les a humiliés. Leur pouvoir sur les hommes, fondé sur le péché, a été brisé, car le sang de Christ efface la dette du péché et libère les croyants de leur emprise. Satan a perdu son pouvoir d’accusation.
En effet, en lui soumettant toute chose, Dieu n’a rien laissé qui échappe à son autorité. Maintenant pourtant, nous ne voyons pas encore que tout lui soit soumis. Toutefois, celui qui a été abaissé pour un peu de temps au-dessous des anges, Jésus, nous le voyons couronné de gloire et d’honneur à cause de la mort qu’il a soufferte. Ainsi, par la grâce de Dieu, il a connu la mort pour tout être humain.
Hébreux 2.8-9
Désormais, nous le contemplons couronné de gloire. Ni des puissances terrestres ni des forces spirituelles ne peuvent nous arracher de sa main. Qui nous accusera devant Dieu? Personne (Rm 8.31-36).
En Christ, nous sommes plus que vainqueurs!
En effet, j’ai l’assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni le présent ni l’avenir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur.
Romains 8.38-39
Vivons donc dans la liberté et la sécurité que procure sa victoire, proclamant avec assurance que Jésus est Seigneur de toutes choses.
Que cette victoire éclatante nous pousse à vivre pour sa gloire et à proclamer son règne souverain au milieu d’un monde qui en a désespérément besoin. Attendons avec assurance son retour et la manifestation finale de son règne.
De même, Christ s’est offert une seule fois pour porter les péchés de beaucoup d’hommes, puis il apparaîtra une seconde fois, sans rapport avec le péché, à ceux qui l’attendent pour leur salut.
Hébreux 9.28
Sylvia C. Keesmaat, "Book of Colossians", in Dictionary for theological interprétation of the Bible, sous dir. Kevin Vanhoozer, Baker Academics, p. 120
webinaire
Comment survivre à la dépression spirituelle?
Découvre ce replay du webinaire de Pascal Denault enregistré le 18 mai 2019.
Orateurs
P. Denault