Dans cet article, nous proposons de développer le sens du sabbat afin de comprendre ce qu’il signifie et ainsi mieux le vivre.
Généralement, les discussions autour du respect du sabbat tournent autour de ce qu’il faut ou ne pas faire. Si nous ne parlions que de cela, le danger serait grand de tomber dans le légalisme, d’imiter les pharisiens –qui développaient des listes de ce qu’il fallait faire ou ne pas faire– en imposant aux autres un fardeau que Dieu n’avait jamais voulu donner. Personne ne veut cela. Nous allons donc d’abord nous pencher sur le côté positif du sabbat, qu’est-il? Que signifie-t-il? Nous en avions déjà parlé comme une célébration de notre Rédemption, qui est une nouvelle Création.
Nous attarderons sur trois aspects de ce commandement :
Dans le prochain article, nous nous pencherons sur les objections les plus couramment soulevées par nos frères qui s’opposent au maintien du sabbat dans la nouvelle alliance.
Après avoir fait cela, nous nous poserons la question de ce qui nous est permis ou pas. L’accent ne sera pas mis sur une liste de chose à faire ou à ne pas faire mais sur deux notions importantes : la sagesse et la liberté chrétienne. Dieu ne nous a pas donné une liste de chose à faire ou à ne pas faire, à laquelle il faut obéir servilement. Dieu nous a donné des principes qui lui plaisent et la liberté d’y obéir selon notre personnalité et le besoin des autres. Cet article ne voudra pas aller plus loin que cela, mais posera des pistes pour nous aider à utiliser avec sagesse la liberté que Dieu nous a donnée.
Après avoir créé notre monde, il nous est dit que Dieu se reposa de ses œuvres, bénit le septième jour, le sanctifia (Gen 2.2.3). Beaucoup insistent sur le fait que nulle part il n’y a ici de commandement, simplement une description de ce que Dieu fait. Nous ne voyons pas Dieu explicitement ordonner à l’homme de se reposer. Nous devrions donc considérer ce verset comme une description et non un commandement. Nous apprenons ce que Dieu a fait mais pas ce que Dieu veut que l’homme fasse.
Mais il nous semble que cette conclusion est superficielle. En effet, que veut dire sanctifier? Dans l’Écriture, le langage de la sainteté, la sanctification est un langage lié au culte. Être saint, c’est être digne de culte, sanctifier quelque chose, c’est le rendre digne pour le culte. Les termes ont une connotation différente soit que nous parlons de Dieu, soit que nous parlons de la Création. Dire que Dieu est saint, c’est dire que Dieu est digne de culte – c’est à dire digne de recevoir le culte. C’est une expression qui rappelle la divinité de Dieu et le fait qu’en tant que seul Dieu, lui seul peut recevoir l’adoration. Quand nous disons qu’un objet ou qu’un homme est saint, nous disons qu’il est digne de culte, pas dans le sens que nous pouvons lui rendre un culte, mais dans le sens qu’il est digne de participer au culte du seul et unique Dieu.
Sanctifier quelque chose, c’est le rendre digne pour le culte.
Quand Dieu sanctifie le sabbat, il déclare donc que ce jour est un jour digne de culte de manière particulière. Il bénit ce jour d’une manière qu’il ne bénit pas les autres jours. Maintenant, pour qui bénit-il ce jour? Pour qui le rend-il digne de culte? La seule réponse possible est pour l’homme. Le septième jour est décrété ainsi comme un jour de repos et de culte pour l’homme, un jour que Dieu bénit particulièrement. Ce repos et ce culte sont en fait nécessaires pour le bien-être de l’homme. Comme l’a dit Jésus: le sabbat a été fait pour l’homme et non pas l’homme pour le sabbat (Mt 12.8).
En sanctifiant ce jour, Dieu l’établit donc comme jour de culte et de repos. Si Dieu nous dit que le septième jour est un jour sanctifié, réservé pour le culte, il nous commande par là même la façon d’utiliser ce jour. Quand Dieu dit que le septième jour est saint, réservé pour le culte, nous n’avons pas besoin qu’il nous commande plus explicitement de faire culte ce jour-là. Bien au contraire, non seulement nous n’avons pas besoin que Dieu nous commande de respecter ce jour, mais nous aurions besoin d’une déclaration explicite pour l’utiliser autrement.
En sanctifiant ce jour, Dieu nous déclare donc directement que ce jour est réservé à une activité de culte et de repos. L’homme a six jours pour travailler au mandat de dominer la terre qui lui est confié en Genèse 1.28. Le septième jour est réservé au repos et au culte.
C’est un point qu’il ne faut pas oublier en ce qui concerne le sabbat. Dieu a non seulement dit qu’il fallait se reposer le septième jour, mais aussi qu’il fallait travailler six jours. Dans notre culture où le divertissement est une idole, où nous réclamons deux jours de repos par semaine et pas plus de 35 heures de travail par semaine, nous ne péchons pas uniquement en ne sanctifiant pas un jour pour Dieu, mais aussi en ne travaillant pas les autres jours, en reportant constamment au lendemain ce qui peut être fait le jour même afin de regarder notre film, de lire nos mails, de passer du temps sur Facebook, d’avoir notre séance de sport quotidienne ou d’écouter les dernières stars musicales du moment.
Derrière cela, il y a souvent une mauvaise conception du rapport entre Dieu et l’homme, sa créature. Lorsque nous ne sommes pas religieux, nous pensons que notre vie nous appartient, que nous faisons ce que nous voulons. Quand nous sommes religieux, nous pensons que six jours nous appartiennent et qu’un autre appartient à Dieu. Ces deux conceptions sont mauvaises. Les sept jours de notre semaine appartiennent à Dieu. Pas une seule seconde de notre vie ne lui est pas due.
Les sept jours de notre semaine appartiennent à Dieu.
L’idée du repos du sabbat n’est, en fait, pas tant de consacrer une partie de notre vie à Dieu mais d’utiliser autrement ma vie déjà consacrée à Dieu. Pendant six jours, je me consacre à accomplir le mandat que Dieu m’a confié au sein de ma famille, de mon travail, de mon Église. Tout cela est fait pour Dieu, en obéissance à ses commandements. Le septième jour, je me consacre à accomplir le mandat que Dieu m’a confié en privilégiant le culte personnel et communautaire à Dieu. Cela est fait pour Dieu, en obéissance à ses commandements.
Quand Dieu s’est reposé, il n’a pas arrêté d’agir. S’il avait cessé de faire quoique ce soit, notre monde se serait désagrégé. Mais il s’est arrêté de créer pour changer d’activité, il n’a plus rien créé de nouveau, mais il a continué à maintenir ce qui existait tout en fixant ce jour comme jour de culte. Dieu nous demande de l’imiter en cela (Ex 20.8-11).
Le sabbat puise donc sa racine non seulement dans la Création, mais dans l’image de Dieu, c’est à dire la constitution même de l’homme. Non seulement Dieu nous a commandé de dominer sur la terre et de nous reposer le septième jour – ce qui serait suffisant pour justifier le sabbat – mais en plus le sabbat nous rend semblable au Dieu créateur qui après avoir travaillé six jours, s’est reposé le septième.
Même si mon jour de repos n’est plus le septième jour car je célèbre non plus l’ancienne Création mais la nouvelle, je ne cesse pas pour autant d’imiter mon créateur.
Mais derrière cette image d’imiter mon créateur, il y a une autre image. Si nous lisons attentivement le récit de la Genèse et que nous regardons comment il est utilisé dans le reste de l’écriture – particulièrement dans le Nouveau Testament – nous nous rendons compte que tout ce qui a attrait à la Création avant la chute est en fait une image de la nouvelle Création qui a commencé par la résurrection de Christ.
Ainsi, il n’est pas hasardeux que Dieu sépare les eaux de la terre, c’est en effet une image du jugement qui vendrait par le déluge, ce déluge étant lui-même une image du jugement à venir et de la nouvelle création qui en sortirait (2P 3.5-7).
De même la création de la lumière est une image de notre régénération (2Co 4.6) et même la séparation des ténèbres et de la lumière est utilisée pour parler de la séparation entre le royaume des ténèbres et le royaume de la lumière (Col 1.13-14, 1P 2.8-10).
Le premier Adam et sa réception de l’Esprit de Dieu est comparé au second Adam, Jésus, qui reçoit l’Esprit à sa résurrection (1Co 15.45). Le mariage d’Adam étant une image du mariage de Christ et de son Église (Ép 5.28-33). Le jardin d’Eden, ses fleuves, ses richesse et son arbre de vie, nous rappellent que la nouvelle création, avec ses richesses, son fleuve et son arbre de vie (Ap 21.18-19, 22.1-5) nous attend.
Comme l’a dit Geerhardus Vos: « L’eschatologie précède la sotériologie. » L’Écriture nous enseigne sur la fin des temps avant de nous enseigner sur le salut. Le but de la Création est la nouvelle Création. La promesse du monde à venir est inscrite dans le monde présent dès le premier jour de son existence.
La promesse du monde à venir est inscrite dans le monde présent.
Il n’est donc pas étonnant que le repos du sabbat ait lui aussi une signification dans le monde à venir. Hébreux 4.1-10 nous apprend que Dieu est dans son repos sabbatique depuis la fin de la création et que ce repos nous est offert comme il a été offert aux israélites sous l’Ancienne Alliance. Ce repos, le repos de Dieu est le repos qui est promis, dans la nouvelle Création à ceux qui croient en Jésus.
Dans le cycle de six jour plus un que connaissait Adam, il y avait donc une promesse, il lui était offert de goûter au repos de Dieu. En désobéissant, Adam a perdu l’accès à ce repos mais Christ par son obéissance l’a obtenu et l’offre à ceux qui croient en lui.
Dans ce repos du sabbat, il y a une promesse. Dieu a travaillé six jours, a fini son travail, puis s’est reposé le septième. En nous invitant à l’imiter, il fait bien plus que nous donner un repos qui nous est nécessaire; il promet à l’espèce humaine, qu’une fois sa tâche accomplie, elle pourra goûter à un repos. Ce repos étant lié au culte de Dieu.
Je célèbre donc le premier jour de la semaine comme une marque de ma certitude que j’aurais part à ce repos. Si les juifs, qui n’ont pas obtenu le repos, pouvaient célébrer le sabbat avec l’espérance de goûter à ce repos, combien plus puis-je –et même dois-je– le faire alors que le Nouveau Moïse est déjà entré dans la terre promise et que j’ai la certitude qu’il m’y guide.
Un autre aspect du sabbat ne doit pas être oublié. Nous avons dit que les dix commandements sont l’expression de qui est Dieu, de son essence même. « Tu n’auras pas d’autres dieux » nous rappelle que Dieu est unique dans sa catégorie et que cela nous oblige à ne servir que lui seul. « Tu ne tueras pas » nous rappelle que Dieu est le Dieu qui donne la vie, pas le Dieu qui détruit. « Tu ne porteras pas de faux témoignages » nous rappelle que Dieu est vérité.
Que nous rappelle donc le sabbat? Il est intéressant de garder en tête que c’est dans le contexte de l’image de Dieu que le sabbat est donné, comme nous l’avons vu. Il est intéressant de se rendre compte que le premier jour entier qu’Adam et Ève ont connu est le sabbat. Ils n’ont pas commencé à travailler, ils ont commencé par se reposer. Ce repos consistait à participer au sabbat, un jour de culte, un jour où ils devaient contempler l’œuvre et la personne de Dieu.
Adam et Ève devaient contempler Dieu et son œuvre, et cela faisait partie de l’image de Dieu en eux. Cela faisait partie de l’image de Dieu en eux parce que cela nous donne une image de ce que faisait Dieu avant de créer. Nous contemplons Dieu comme Dieu se contemple.
Nous contemplons Dieu comme Dieu se contemple.
Avant la création, Dieu se contemplait, Dieu ne manquait de rien ni de personne. L’homme, créé à l’image de Dieu, contemple Dieu au premier jour de son existence.
À travers la Création et à travers l’humanité, Adam et Ève pouvaient voir Dieu, voir qui Il est et se réjouir en Dieu comme Dieu se réjouit en lui-même.
Nous voyons maintenant, dans l’Évangile, dans la nouvelle Création encore plus de la gloire de Dieu, encore plus de qui Il est (2Co 4.6). La nouvelle Création, dont nous avons un aperçu pour le moment, nous permet d’encore plus contempler Dieu et sa gloire (2Co 3.18).
Si j’ai un aperçu de la nouvelle création, un jour je verrai la nouvelle création et donc Dieu lui-même de manière encore plus complète (Ap 21.1-6, 22.1).
Le sabbat est une promesse de ce jour, Christ est déjà au milieu de nous par son Esprit, mais il n’est pas encore là dans son corps comme il le sera alors, je ne vois donc pas encore toute la gloire de Dieu que je verrais alors. Mais le sabbat est une promesse que je verrai toute cette gloire quand je le verrai lui.
Le sabbat est donc une promesse, une promesse ancrée dans la Création et dans l’image de Dieu qui est présente dans l’homme. Il est une promesse qu’un jour il participera au repos de Dieu, repos dans lequel Dieu est depuis qu’Il a sanctifié le premier sabbat, repos dans lequel Il invite l’homme, repos dans lequel le chef de ma foi est déjà et dont Il m’assure qu’Il me conduira.
Le sabbat est fait pour l’homme, il est la conséquence de ce que l’homme est, par nature l’homme est à l’image de Dieu et goûtera de manière plus profonde cette bénédiction lorsque l’homme verra le Fils, l’image du Dieu invisible, et sera transformé à son image.
Par ce que je vais prendre part à ce glorieux repos, mais qu’il ne m’appartient pour le moment que sous forme de promesse, je continue à célébrer le sabbat dans cette création parce que je suis sûr d’y prendre part.
Maintenant que nous avons une vision positive de ce qu’est le sabbat, maintenant que nous comprenons pourquoi nous continuons à le célébrer, nous pouvons nous pencher vers les arguments que certains frères mettent en avant pour enseigner que le sabbat n’est plus valable pour le chrétien.