Dans cet article nous répondrons à 5 objections, souvent faites à propos du sabbat chrétien.
Accusé par les pharisiens de transgresser la loi du sabbat, Jésus ne répond pas qu’il se contente de transgresser la loi orale. Il fait au contraire cette déclaration stupéfiante: de même que le roi David et les prêtres étaient à certains égards « au dessus de la loi », lui-même n’était pas soumis à la loi du sabbat (Lc 6.1-11; cf. Mc 2.3-28).
Non seulement cela signifie que Jésus possède une autorité au moins aussi grande que la loi mosaïque, mais cela suggère aussi qu’il est celui qui apportera les bénédictions du sabbat à Israël. […] En affirmant ainsi son autorité sur le sabbat, Jésus l’arrache à son cadre légal et fait advenir le repos dont le peuple de Dieu aurait depuis toujours dû bénéficier.
Ces mots nous disent que Jésus, David et les Lévites n’étaient pas tenu « à certains égards » d’obéir à la loi. Jésus est le maître du sabbat, il n’est donc pas obligé de lui obéir. Par ailleurs, en tant que maître du sabbat, il libère les chrétiens de l’obligation d’obéir au cadre légale du sabbat.
D’après ce qui a été dit, Jésus n’est pas en train de désobéir uniquement à la tradition des scribes et des pharisiens, il est bien en train de désobéir à la loi de Moïse parce que son autorité lui est « au moins égale ».
Mais est-ce ce qui se passe? Celui qui a dit qu’il n’est pas venu abolir la loi et les prophètes mais les accomplir est-il maintenant en train de se déclarer au dessus de la loi? Accomplit-il la loi en lui désobéissant?
Dans l’extrait cité, l’auteur prend Luc 6.1-11, Matthieu 12.1-8 et Marc 2.3-38 pour appuyer ses dires. Pourtant, Jésus ne dit pas seulement « je suis le maître du sabbat » pour se justifier, il donne aussi une explication sur la manière dont il agit. Jésus nous explique pourquoi les disciples ont arraché des grains de blé le jour du sabbat et pourquoi il a guéri le jour du sabbat.
En Matthieu et Luc, il l’explique par cette question: est-il permis oui ou non de faire le bien le jour du sabbat? Quel est la réponse à cette question? L’un d’entre nous dirait-il non? Mon repos du sabbat m’interdit-il de faire du bien à un homme? Est-ce ce qu’enseignent la loi et les prophètes?
Si tu retiens ton pied pendant le sabbat, Pour ne pas faire ta volonté en mon saint jour, Si tu fais du sabbat tes délices, Pour sanctifier l’Eternel en le glorifiant, Et si tu l’honores en ne suivant point tes voies, En ne te livrant pas à tes penchants et à de vains discours, Alors tu mettras ton plaisir en l’Eternel, Et je te ferai monter sur les hauteurs du pays, Je te ferai jouir de l’héritage de Jacob, ton père; Car la bouche de l’Eternel a parlé. (Es 58.13-14)
Dans ce chapitre, Dieu, par le prophète Esaïe, reproche au peuple juif de ne jeûner et de faire le sabbat d’une manière qui est selon leur voie, mais pas selon la sienne. Ils jeûnent et font un sabbat qui leur plait mais que ne plait pas à Dieu. Dans les versets cités, Dieu demande donc de ne pas suivre nos voies et de ne pas nous livrer à nos penchants.
Le début du chapitre, nous explique que cela signifie arrêter de mépriser le faible mais plutôt d’avoir une attitude qui reflète Dieu:
Voici le jeûne auquel je prends plaisir: Détache les chaînes de la méchanceté, Dénoue les liens de la servitude, Renvoie libres les opprimés, Et que l’on rompe toute espèce de joug; Partage ton pain avec celui qui a faim, Et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile; Si tu vois un homme nu, couvre-le, Et ne te détourne pas de ton semblable. (Es 58.6-7)
Qu’est-ce donc suivre la voie de Dieu pendant le sabbat? Faire du bien aux faibles. Quelle est donc la réponse à la question de Jésus? Est-il permis oui ou non de faire le bien le jour du sabbat?
Non, ce n’est pas permis… C’est un commandement! Ce n’est pas une option qui est mise devant nous. Dieu ne nous dit pas: tu es libre, le jour du sabbat, fais ce que tu veux, tu peux ou pas faire du bien. Il nous commande de faire du bien aux faibles. Jésus ne s’est pas dit: « Il a sa main sèche depuis tant d’années, un jour de plus ou un jour de moins… Je le guérirai demain, aujourd’hui c’est le sabbat. » Il pouvait le faire et il l’a fait d’autant plus que c’était le sabbat.
Jésus a-t-il donc désobéi ou s’est il montré au-dessus de l’enseignement de la loi et des prophètes en faisant le bien, en guérissant le jour du sabbat? Non, il a obéit à la loi interprétée par le prophète Ésaïe.
Ceci est encore plus frappant quand nous considérons Luc 13.16. Lors d’une autre guérison, il déclare qu’il a libéré une croyante du joug de Satan, or Esaïe commande spécifiquement de rompre tout lien et tout joug lors du sabbat. Jésus a-t-il désobéi au sabbat en guérissant? Non, il lui a obéi.
Quand Jésus et ses disciples ramassent les blés le jour du sabbat, Jésus dit alors, après avoir pris l’exemple de David et des lévites:
Si vous saviez ce que signifie: Je prends plaisir à la miséricorde, et non aux sacrifices, vous n’auriez pas condamné des innocents. Car le Fils de l’homme est maître du sabbat.
Jésus dit explicitement que lui et ses disciples sont innocents et il dit explicitement pourquoi les pharisiens l’accusent: Ils n’ont pas compris la miséricorde.
Marc nous donne un autre éclairage sur la défense de Jésus: le maître du sabbat nous dit que le sabbat a été fait pour l’homme et non pas l’homme pour le sabbat.
Les pharisiens n’avaient rien compris à ce qu’était observer le sabbat. Le bien de l’homme est une valeur du sabbat. Dieu lui a donné du repos pour son bien. Observer le 4ème commandement ne veut pas dire oublier tous les autres. Se reposer le septième jour ne se fait pas en oubliant qu’il ne faut pas tuer son prochain. Se reposer, c’est se reposer de nos œuvres, pas nous arrêter d’aimer.
Se reposer, c’est se reposer de nos œuvres, pas nous arrêter d’aimer.
Le maître du sabbat, celui qui est venu accomplir la loi et les prophètes, ne s’est donc jamais considéré au dessus de la loi à aucun égard et n’a donc jamais brisé le sabbat. Ceux qui l’ont accusé de cela était ceux qui n’avaient pas compris ce qu’était l’amour du prochain, ceux qui auraient libéré leur veau d’un trou le jour du sabbat, mais qui n’aurait pas guéri un homme s’ils le pouvaient.
Si le maître du sabbat, notre maître, nous dit que le sabbat est pour notre bien et que lui-même, bien que maître du sabbat, s’y est toujours soumis, je ne vois pas pour quelles raisons nous nous en libérerions.
Romains 14 ne mentionne pas le sabbat du tout. Paul mentionne que quelques personnes trouvent certains jours supérieurs à d’autres et que d’autres les trouvent égaux. Les termes sont on ne peut plus vague et ne parle pas du tout des activités qui y sont liés.
À aucun moment, il n’a été dit que le dimanche est un jour supérieur aux autres. Nous disons simplement que Dieu nous demande d’y accomplir des choses différentes. Pendant les 6 premiers jours nous nous occupons principalement de l’œuvre que Dieu nous a donnée à faire, le septième jour notre œuvre est principalement de nous reposer sur ce que Dieu fait.
Objection 3: Galates 4.10-11 et Colossiens 2 nous apprennent que nous sommes libérés du sabbat comme de la circoncision
Ces deux passages s’adressent spécifiquement à ceux qui veulent se mettre sous la loi de Moïse pour être sauvé. La loi de Moïse dont il est question est forcément le livre de la loi puisque la circoncision y est mentionnée.
Colossiens 2 parlent non pas du sabbat mais des sabbats, l’expression « les sabbats » désignent toutes les fêtes de l’ancienne alliance (Lv 23.1). Encore une fois, c’est du livre de la loi et non des tables de la loi dont il est question.
Ces passages enseignent qu’il est vain de vouloir suivre le sabbat juif décrit en Lévitique 23. Tout Cela est particulièrement vain si notre but est de plaire à Dieu. Nous sommes d’accords. Par contre, il ne nous oblige pas arrêter d’obéir aux dix commandements gravés d’abord sur les tables de pierre puis maintenant gravés dans notre coeur. Nous sommes entrés dans la Nouvelle Alliance, les commandements ont été gravés dans notre coeur pour que nous y obéissions, pas pour que nous les oublions.
Il est souvent affirmé que, parce que le sabbat anticipe le repos de la nouvelle Création, il n’est pas une ordonnance créationnelle. Cet « argument » nous semble assez troublant.
Tout d’abord, il sous-entend que l’autre position ne comprend pas la portée eschatologique du sabbat. Pourtant, elle n’a jamais été ignorée par les partisans du sabbat chrétien. Par exemple, Calvin dit que « le septième jour figure la perfection finale à laquelle nous devons aspirer » et que « le repos spirituel en Christ est le véritable accomplissement du sabbat ». Il nous suffirait de lire les oeuvres de J. Edwards, M. Kline, G. Vos, J. Murray –pour ne citer qu’eux– afin de nous rendre compte que les partisans du sabbat chrétien ont toujours compris que le sabbat est eschatologique.
Ensuite, nous ne comprenons pas du tout l’opposition entre une ordonnance créationnelle et une anticipation eschatologique. Le mariage est une ordonnance créationnelle et il pointe vers le mariage de Christ et de l’Église. Dirions-nous qu’il ne faut plus nous marier ou ne plus être fidèle pour cette raison? Bien sûr que non, cela renforce plutôt ce commandement.
Ce qui fait la différence entre les deux positions n’est donc pas du tout le fait qu’une seule considère que le sabbat est eschatologique. Ce qui les sépare est plus le « degré » avec lequel nous voyons que le sabbat est accompli. Est-il accompli avec le même « degré » que les sacrifices dans l’Ancien Testament qui ont cessé par le sacrifice parfait du Christ. Ou alors, est-il accompli plutôt comme le mariage ou l’ordre créationnel de peupler la terre? L’Église est déjà l’épouse de Christ mais pas encore sa femme, elle est fiancée mais le mariage n’est pas consommée, à cause de cela nous nous marions toujours. De même, l’ordre de peupler la terre se poursuit, même si la multiplication de l’image de Dieu se fait non pas de manière sexuelle mais en annonçant l’Évangile.
Le texte le plus explicite sur le lien entre le repos et la Nouvelle Création est Hébreux 3-4. Ces chapitres font par ailleurs un autre rapprochement: au travers du Psaume 95, il compare l’Église à Israël dans le désert des épreuves en route vers la terre promise de la Nouvelle Création. Le repos existe, nous le voyons, mais nous n’y sommes pas encore arrivé. Tant que l’on peut dire « aujourd’hui », nous devons nous encourager car nous sommes dans le désert et nous pouvons tomber (Hb 3.12-13), et il reste toujours un repos de sabbat (Hb 4.8) pour le peuple de Dieu. Puisqu’il reste toujours un repos, nous n’y sommes pas encore.
Nous célébrons donc toujours le sabbat dans l’espérance que nous y prendrons part, comme nous continuons à célébrer les mariages dans l’espérance de prendre part aux noces de l’agneau. Par contre, de la même manière que l’ordre de nous multiplier ne s’obéit plus en se reproduisant sexuellement, mais en faisant des disciples, le sabbat ne s’obéit plus par un repos et une célébration le 7ème jour, celui où la première création a été achevée, mais le 1er, celui où la nouvelle création a débutée.
Ainsi, ce n’est pas par manque de considération dans le repos obtenu par Christ que nous observons le sabbat, mais, bien au contraire, parce que nous sommes certains d’y participer.
Un argument de poids contre le sabbat serait de dire que ce commandement n’est jamais répété dans le Nouveau Testament. Nous ne nous attarderons pas beaucoup sur celui-ci, il nous suffit de noter que c’est le cas des quatre premiers commandements. Pourtant nous espérons fortement qu’aucun de ceux qui prononcent ces mots affirmeraient, sur cette base, que nous pouvons servir d’autres dieux ou que nous puissions faire des images de Dieu ou prendre le nom de Dieu en vain.