Pourquoi l’existence du mal est-elle un argument contre l’athéisme?

Doctrine de DieuSouffranceVision chrétienne du monde

“Comment tu peux croire en Dieu quand tu vois tout le mal qui existe?” Cette question, tous les chrétiens la redoutent. Pas étonnant, c’est l’une des plus épineuses. Ils luttent eux-mêmes avec le problème du mal¹. L’athéisme semble être en position de force: le mal existe, car il n’y a pas de Dieu.

Mais, à bien y réfléchir, l’athéisme se confronte à un défi de taille: comment définir le mal sans Dieu? Comment rendre compte de notre expérience intime face au mal? Dans cet article, j’explique pourquoi l’athéisme ne peut convoquer le mal comme preuve de l’inexistence de Dieu.

L’athéisme se confronte à la nécessité de définir le mal sans norme morale absolue.

S’il n’y a pas de mal absolu, il n’y a pas de définition du mal universel. Le mal devient un concept simplement relatif et culturel.

La question fondamentale: “Pourquoi le mal est-il mal?” ou “Pourquoi cela est-il défini comme mal?” ne peut pas trouver de réponse satisfaisante dans l’affirmation: “Parce que je (ou nous) dis que ça l’est.”

L’existence de Dieu fournit une norme morale absolue qui permet de distinguer le bien du mal de manière objective et cohérente.

Le mal est mal non pas parce que nous le pensons, mais parce que le Dieu parfaitement saint définit ainsi tout ce qui est contraire à sa bonne volonté. Si l’on rejette cette norme divine, les notions de bien et de mal perdent leur transcendance et donc leur universalité. Elles deviennent des produits de conventions sociales ou de préférences personnelles, changeant selon les époques et les contextes. Elles dépendent en définitive de l’autorité des opinions subjectives ou des conventions culturelles.

Si Dieu n’existe pas, les athées doivent justifier la base de leurs jugements moraux. Ils doivent expliquer pourquoi certaines actions, comme le mensonge, le viol ou le meurtre, sont objectivement mauvaises. Ils doivent apporter d’autres arguments que “C’est mal parce que je sens que c’est mal”, afin d’être en mesure de réfuter légitimement ceux qui pensent l’inverse. Mais sans une norme transcendante, il est impossible de défendre de manière rationnelle et universelle l’idée que ces actions sont condamnables en tout lieu et à tout temps.

En effet, le mal ne naît pas simplement de nos jugements intérieurs, mais de celui de Dieu qui condamne ce qui est mal, car contraire à ce pour quoi il nous a créés (être à son image), qui demeure notre objectif malgré la chute et que nous ressentons, car dotés d’une conscience morale (Rm 2.14-15).

L’athéisme ne peut expliquer la présence du mal dans le monde.

Dans le cadre de la révélation biblique, le mal est une corruption de l’ordre créé par Dieu, résultant de la chute historique de l'homme en Éden.

Cette vision théologique affirme que Dieu a créé un monde bon et que le mal, contrairement à certaines philosophies ou religions, n’a pas d’essence propre. Il n’est pas une force autonome, mais une déviation ou une perversion de ce qui est bon. Par exemple, le mensonge est une corruption, il dépend toujours du bien pour exister, comme l’ombre dépend de la lumière.

Les athées, en revanche, doivent fournir une explication alternative pour l'existence du mal et de la nécessité de sa condamnation. Sans une perspective théiste, il devient complexe d'expliquer pourquoi nous appliquons une importance à un concept totalement étranger à la dimension strictement naturaliste et arbitraire (donc amoral) du monde.

Cette incapacité à fournir une explication satisfaisante conduit nécessairement à une accommodation du mal. Certains diront, par exemple, que le mal permet de mieux apprécier le bien, ou qu’il est nécessaire pour l’équilibre du monde, tel le Yin et le Yang. Cela revient à relativiser le mal, ou pire, à lui conférer une nécessité… ce qui est peut-être le plus dangereux.

Or la vision chrétienne du monde insiste sur le fait que le mal n’a de sens que par rapport au bien qu’il déforme. Le seul qui puisse nous en délivrer est celui qui peut restaurer ce que le monde doit être: Jésus-Christ.

L’athéisme ne peut rendre compte de notre expérience spirituelle face au mal.

Quand nous sommes confrontés à l’horreur du mal, que nous sommes témoins de sa perversion absolue, l’athéisme est incapable de nous apporter des arguments qui expliquent le frisson d’effroi et le malaise que nous ressentons.

Lorsque nous sommes confrontés à une telle perversité, nous ressentons que ce n’est pas seulement un dysfonctionnement sociétal ou un dérèglement psychique qui conduit l’humain à un tel acte, mais le mal en tant que corruption absolue. Nous savons que notre révulsion n’est pas culturelle ou une réaction archaïque héritée de la peur de nos ancêtres face à la charge d’un mammouth qui s’exprime. C’est notre sang qui se glace face à la réalité insupportable du mal.

L’athéisme, dans son cadre immanentiste, peut tenter de comprendre les crimes abjects en termes psychiatriques ou psychosociologiques, mais il est incapable de rendre compte de notre phobie face à la malignité absolue du péché. L’athéisme capitule quand il doit expliquer pourquoi le mal à la puissance de rendre l’homme “inhumain”.

Certes, il peut essayer de fournir des réponses, mais celles-ci sont dérisoires lorsqu’il s’agit de justifier pourquoi nous ressentons si puissamment que l’homme ne devrait pas être ce qu’il est.

C’est pour cela que, face à l’abomination, même les athées abandonnent le langage cartésien pour parler de "monstre", de "mal incarné", ou "d’acte diabolique", et que, face à l’innommable, ils s’exclament: “Mon Dieu, mais quelle horreur!”

Ce malaise intérieur est une expérience spirituelle: nous ressentons la réalité de la puissance des ténèbres. En effet, nous ne sommes pas témoins d’une simple manifestation névrotique ou psychosociale, mais de l’existence du Malin dont nous avons tant besoin d’être délivré (Mt 6.13). Nous frissonnons, car Satan fait effraction à notre cadre rationnel pour s’imposer à nous dans toute sa laideur.

Seule la Bible rend compte avec exactitude de l’expérience d’effroi que nous ressentons face au mal. Seule la Bible décrit avec justesse la puissance du mal agissant en nous. Seule la Bible nous décrit le monde tel qu’il est réellement: déchu et sous l’influence du prince de la puissance de l’air (Ép 2.1-2; 1Jn 5.19).

L’athéisme ne peut pas expliquer pourquoi nous sommes si profondément perturbés par la perversion morale ou pourquoi nous aspirons à une justice que ni les tribunaux humains ni les lois ne peuvent fournir. Seule l’eschatologie biblique nous offre une consolation et une espérance grâce à Jésus-Christ et l’attente de son retour.

L’athéisme rend le problème du mal encore plus inintelligible.

Si les athées veulent réfuter l’existence de Dieu à cause du mal, ils doivent démontrer qu’il est impossible que Dieu et le mal coexistent. Ils doivent prouver que son esprit (limité) est capable de démontrer que l’existence énigmatique du mal et celle d’un Dieu infiniment plus grand que ce que la raison humaine peut saisir sont incompatibles.

En outre, en l'absence de Dieu, les athées doivent non seulement expliquer l’existence du mal, mais aussi celle de l’univers. À l’évidence, enlever Dieu de l'équation ajoute un problème au problème.

Sans Dieu, il devient extrêmement difficile de justifier pourquoi l’univers est cohérent et pourquoi les lois de la nature sont prévisibles. (Dans une vision purement matérialiste et athée, les lois naturelles sont simplement des constats empiriques sans explication ultime de leur origine ou de leur stabilité.)

L’existence de Dieu rend le monde intelligible, car elle fournit une base pour l'ordre, la rationalité et les lois naturelles. Enlever Dieu de l’équation ne résout pas le problème du mal, mais en ajoute un: celui de la cohérence de l’univers lui-même.

C’est Dieu qui garantit que l’univers n’est pas seulement un chaos imprévisible, mais un cosmos intelligible, où les êtres humains peuvent découvrir et comprendre les lois qui régissent la création et découvrir le sens de leur vie.

Le chrétien doit être humble face au problème du mal

Selon l’athéisme, ceux qui souffrent injustement et qui voient le méchant s’en sortir restent à jamais victimes de l’injustice.

Selon l’athéisme, ceux qui font le mal et meurent sans jamais payer pour leurs crimes s’en sortent à bon compte.

Selon l’athéisme, l’univers est un monde où la souffrance et l'injustice n'ont pas de fin ni de solution.

Au-delà des arguments philosophiques, l’athéisme n’aboutit sur aucune espérance si ce n’est une révolte camusienne. Il ne permet pas l’acceptation (et encore moins le désir) que le monde soit ainsi.

Le chrétien peut croire raisonnablement en l’existence de Dieu malgré la présence du mal. Mais, il lutte parfois dans sa foi pour comprendre le dessein du Dieu bon et souverain: “L’énigme du mal est le seul mystère "opaque" de l'Écriture2.”

Comme nous le rappelle Henri Blocher, c’est bien parce que le mal n'a pas sa place dans la création de Dieu qu'il nous apparaît comme un mystère et une anomalie. En effet, le mal n’a pas de place légitime ou normal dans le cosmos, car il n’est pas créé par Dieu. Le mal a été introduit par la rébellion de l’homme contre Dieu sous l’influence de Satan, impliquant la corruption de l'ordre créé et la perversion du cosmos.

Le chrétien, bien qu’il lutte aussi avec le problème du mal, trouve consolation dans la certitude que malgré le fait qu’il participe à faire le mal, Dieu l’aime et le sauve.

En effet, Dieu ne nous explique pas ce mystère opaque, mais il nous révèle qui le résout: Jésus-Christ, La lumière du monde. Le chrétien n’a pas l’explication complète du mal, mais la certitude que Jésus a remporté la victoire sur Satan, le péché et la mort. Le chrétien sait que Jésus est mort pour qu’il soit pardonné, délivré de l’esclavage (Rm 5.8, 6.6-7). Il sait que Jésus règne dans les lieux célestes, qu’il sauve ceux qui placent leur foi en lui en attendant que ses ennemis deviennent son marchepied (Ép 1.7, 20-21; Hé 10.13).

Cette espérance transcende toutes ses questions et ses craintes. Elle offre un réconfort unique que seul l’Évangile peut apporter:

Je vous ai dit ces choses, afin que vous ayez la paix en moi. Vous aurez des tribulations dans le monde; mais prenez courage, j’ai vaincu le monde.

Jean 16.33

Le chrétien doit humblement partager cette Bonne Nouvelle avec les autres. Bien que le mal soit encore présent et déroutant, Jésus a remporté la victoire décisive à la croix. Il reviendra pour juger le monde et rétablira l'ordre voulu par Dieu dès la création (Ac 17.31; Rm 8.21; Ap 21.1-4).

En Jésus, la promesse du jugement final et de la restauration cosmique donne un sens et une issue au problème du mal, offrant le réconfort que l’athéisme ni aucune autre vision du monde ne peut fournir.

Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur; et vous trouverez du repos pour vos âmes.

Matthieu 11.28-29


Raphaël Charrier

À 17 ans, Raphaël s’engage dans l’armée dont il est renvoyé moins de deux ans après. Il reprend alors l’école et obtient le bac à 23 ans. C’est à ce moment qu’il découvre la personne et l’œuvre de Jésus-Christ et place sa foi en lui pour être sauvé. Il poursuit ses études et devient Éducateur Spécialisé. Il s’oriente ensuite vers des études de théologie à l’Institut Biblique de Genève, puis à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-Sur-Seine, afin de se consacrer au service de l’Évangile.

Après un premier poste pastoral à plein temps à l’ECE de Grenoble pendant 9 ans, il partage aujourd'hui son ministère entre une charge pastorale à Sola Gratia, l'enseignement dans des institutions de formation théologique, l’écriture et le blogging. Il est marié à Marion et ils ont deux enfants. Il est auteur de plusieurs livres, dont Vivre pour Jésus qui a pour objectif d'aider les chrétiens à poser les bons fondements de la vie chrétienne.

Ressources similaires

webinaire

Si Dieu est bon, pourquoi autant de mal?

Découvre le replay de ce webinaire de Guillaume Bignon, enregistré le 11 décembre 2018, qui traite de la souveraineté et la bienveillance de Dieu.

Orateurs

G. Bignon