Avez-vous déjà réfléchi aux femmes et aux hommes cités dans Romains 16? Ce qui m'a le plus frappé, c'est le nombre de femmes avec lesquelles Paul a collaboré dans son ministère. Cela prouve une fois de plus que nous ne sommes pas des spectatrices. Les femmes ont participé activement à la diffusion de l'Évangile jusqu'aux extrémités de la terre à l'époque et continuent de le faire aujourd'hui.
La première personne qui m'a sauté aux yeux est Phœbé. Au verset 1, Paul l'appelle diaconesse ou servante de l'Église de Cenchrées, selon la traduction. Le terme diaconos, qui signifie serviteur, est à l'origine du mot "diacre". Certains commentateurs pensent que Paul voulait simplement décrire Phœbé comme une fidèle servante. D'autres soutiennent que ce terme lui a conféré la fonction officielle de diaconesse, puisque c'est le seul endroit où il est appliqué à une Église particulière1. Si cela est vrai, Phœbé est le premier diacre (homme ou femme) enregistré dans l'histoire de la chrétienté.
Au verset 2, Paul exhorte les Romains à accueillir Phœbé d'une manière digne du Seigneur. Pour quelle raison? Parce qu’“elle en a aidé beaucoup, ainsi que moi-même”. Le mot traduit par "aider" n'est pas un verbe en grec, mais plutôt un nom. Il pourrait être traduit par "aide", "patronne" ou "bienfaitrice". Phœbé était probablement une femme riche qui aidait Paul et d'autres personnes financièrement, en leur offrant l'hospitalité et d'autres formes d'assistance2. La leçon intemporelle que Paul voudrait que les croyants tirent de ces versets est la suivante: soutenons les serviteurs de Dieu.
Nous devrions, nous aussi, aider ceux qui nous ont aidés dans notre cheminement spirituel. Et si nous tendions la main à l'un d'entre eux cette semaine pour lui dire: “Merci. Comment puis-je prier pour toi? Y a-t-il un moyen de te rendre service?” De plus, comment pouvons-nous être un Phœbé pour quelqu'un d'autre? Nous pouvons tous trouver des moyens simples de donner de notre temps, de nos talents et de nos trésors pour être des bienfaiteurs pour ceux qui nous entourent.
Les versets 3 à 15 contiennent la plus longue série de salutations du Nouveau Testament. Paul décrit ces amis comme étant "dans le Seigneur" ou "en Christ" à dix reprises. Cette simple phrase semble être le thème unificateur de notre passage. Cette vérité élève ces salutations au-dessus de celles que l'on trouve dans les lettres ordinaires. Le niveau d'amour, d'affection et de solidarité qu'il partage avec les frères et sœurs de Rome est fondé sur le fait qu'ils sont un en Christ.
Les salutations de Paul incluent les noms de 19 hommes et 9 femmes, ainsi que de diverses équipes ministérielles:
Bien que Paul n'identifie pas chaque personne comme compagnon de service, leur mention dans le contexte de ce passage suggère leur implication dans l'œuvre de l'Église.
Paul semble élever ses compagnes disciples de Christ. Craig Keener, par exemple, affirme:
Romains 16 salue deux fois plus d'hommes que de femmes, mais félicite deux fois plus de femmes que d'hommes3.
De plus, Paul utilise un verbe grec particulier, qu'il n'applique qu'au travail de quatre femmes4 il signifie peiner, travailler jusqu'à l'épuisement, faire un travail pénible ou travailler jusqu'à la fatigue extrême.
Un autre élément qui ressort de la liste est la diversité socio-économique et culturelle de ses membres. Selon les commentateurs, de nombreuses personnes que Paul salue sont des esclaves ou des affranchis5; en outre, certains des noms cités sont des noms juifs, d'autres sont latins et d'autres encore sont grecs. La diversité culturelle et socio-économique est une idée de Dieu. Il a racheté une épouse de toute nation, peuple et langue. Les barrières qui nous divisaient avant de venir à la foi se sont effondrées dès l'instant où nous avons fait confiance à Christ. Alors, aimons-nous les uns les autres au milieu de nos différences et non en dépit d'elles.
Nous trouvons le premier couple à remarquer aux versets 3 et 4. Ils apparaissent six fois dans le Nouveau Testament. Quatre de ces fois, le nom de Priscille apparaît en premier (Ac 18.18, 26; Rm 16.3; 2Tm 4.19). Avec Paul, ce trio missionnaire a dressé des tentes tout en établissant des Églises de maison à Corinthe, Éphèse et Rome.
La phrase la plus significative que Paul utilise pour les décrire se trouve au milieu du verset 7:
…qui jouissent d'une grande considération parmi les apôtres
Cela signifie-t-il qu'il y avait des femmes apôtres? Oui et non. Le terme "apôtre" était utilisé de trois manières au moins dans le Nouveau Testament.
Dans les Évangiles, ce terme est réservé aux 12 hommes les plus proches du Christ. C'est à dessein qu'ils étaient tous des hommes. Cela ne signifie pas que Jésus n'a pas eu de femmes disciples. Mais la fonction d'apôtre (A majuscule) était réservée aux 12.
Dans le livre des Actes, certains proches collaborateurs des douze apôtres sont également appelés apôtres, à savoir Paul, Barnabé et Jacques, le frère de Jésus. Ces hommes détenaient une autorité particulière dans l'Église, parfois égale à celle des 12.
Les évangélistes et missionnaires itinérants étaient parfois aussi appelés apôtres. Cette conception de l'apôtre vient du fait que le mot grec apostolos signifie "celui qui est envoyé, un ambassadeur"6. Par exemple, dans la langue originale de Philippiens 2.25, Paul appelle Épaphrodite “l'apôtre que vous m'aviez envoyé”.
Les spécialistes s'accordent à dire que Junie et Andronicus étaient bien des apôtres, c'est-à-dire une équipe qui implantait des Églises, à l'instar de Priscille et Aquila. Mais pour ne pas nous perdre dans le débat sur le terme "apôtre", l'intérêt pour Paul de le mentionner est qu'ils se distinguaient parmi les apôtres! Parmi tous les missionnaires et évangélistes itinérants, ils étaient en tête de liste!
Le dernier couple à considérer est celui de Rufus et de sa mère sans nom. Nous ne pouvons pas être certains de l'identité exacte de Mama Rufus. Mais pour que Paul mentionne ce duo, ils devaient être actifs dans le ministère et bien connus à Rome. En la personne de cette sainte plus âgée, l'apôtre a trouvé l'amour tendre et l'attention d'une femme qu'il a fini par appeler "mère".
Elle représente pour nous une partie essentielle de notre appel en tant qu'ambassadrices de Christ: la maternité spirituelle! Tite 2 nous enseigne que les femmes plus âgées doivent enseigner les plus jeunes. Et ne nous arrêtons pas là. Si nous sommes une famille spirituelle, considérons qui d'autre pourrait avoir besoin d'une mère spirituelle. Après tout, Mama Rufus a investi dans des hommes plus jeunes! Nous sommes des frères et des sœurs, des mères et des pères pour ceux qui sont plus jeunes que nous. Laissons Mama Rufus nous inspirer par son exemple de mère spirituelle.
Paul conclut cette section au verset 16 en appelant les saints de Rome à se saluer par un saint baiser. Cela s'applique-t-il de la même manière à toutes les époques et dans toutes les cultures? Je soutiens que non. Dans certaines cultures, il serait inapproprié de s'embrasser. C'est peut-être pour cette raison qu'une traduction anglaise moderne, Phillips, transpose la coutume en termes nord-américains contemporains: “Que chacun se serre chaleureusement la main7.” Ce qui importe le plus, c'est la chaleur et l'affection qui cimentent l'unité entre frères et sœurs. Cela varie d'une culture à l'autre.
Phœbé a porté une lettre qui a changé le cours de l'histoire. Connaissait-elle sa portée? Probablement pas. Cette lettre n'a pas seulement renforcé la communauté chrétienne primitive de Rome, mais aussi toutes les générations de croyants depuis lors.
Elle a influencé les écrits d'Augustin sur la grâce, le péché et le salut. Elle a influencé la compréhension de Martin Luther selon laquelle le juste vivra par la foi (Rm 1.17), déclenchant ainsi la Réforme. Elle a également influencé les doctrines de Jean Calvin sur la souveraineté divine et la justification par la foi, façonnant l'Église jusqu'à aujourd'hui.
La simple obéissance de Phœbé portait en elle les germes d'une profonde transformation. Près de deux mille ans plus tard, son exemple nous inspire toujours, nous rappelant que même de petits actes de foi peuvent avoir un impact immense. Acceptons chacun notre vocation d'ambassadeur du Christ, en comprenant que notre fidélité peut influencer ceux qui nous entourent d'une manière que nous ne verrons peut-être jamais complètement de ce côté-ci de l'éternité.
Pour aller plus loin, consulter cette vidéo, dans lequelle j'enseigne ce passage à un déjeuner de femme. Passez à la minute 9, où commence l'enseignement sur Romains 16.
1. Thomas R. Schreiner, Romans, vol. 6, Baker Exegetical Commentary on the New Testament (Grand Rapids, MI: Baker Books, 1998), 788. [retour ↑]
2. Ibid. [retour ↑]
3. Craig S. Keener, Romans, New Covenant Commentary Series (Eugene, OR: Cascade Books, 2009), 184. [retour ↑]
4. Robert H. Mounce, Romans, vol. 27, The New American Commentary (Nashville: Broadman & Holman Publishers, 1995), 275. [retour ↑]
5. Thomas R. Schreiner, op. cit., 792-795. [retour ↑]
6. Spiros Zodhiates, The Complete Word Study Dictionary: New Testament (Chattanooga, TN: AMG Publishers, 2000). [retour ↑]
7. Robert H. Mounce, op. cit., 277.[retour ↑]
webinaire
Le féminisme: Liberté, égalité, sororité?
Découvre le replay de ce webinaire enregistré le 10 novembre 2022, en partenariat avec l’équipe du podcast Sagesse et Mojito: Christel Lamère Ngnambi, Jean-Christophe Jasmin et Léa Rychen.
Orateurs
L. Sagesse et Mojito