Comprendre la vision coranique de Jésus

Islam

L'ouvrage de référence de Christine Schirrmacher, L'islam: Histoire et Doctrines, publié chez Excelsis en 2016, est très utile pour comprendre ce que le Coran dit à propos de Jésus, ainsi que les interprétations formulées par les théologiens coraniques.

Voici une brève synthèse du sujet.

La présence de Jésus dans le Coran

Le Coran aborde Jésus dans quinze sourates, totalisant 93 versets.

Cependant, il est important de noter que le Coran ne le traite pas en tant qu'individu distinct, mais plutôt dans un contexte plus large. Cette approche particulière soulève des interrogations quant à la compréhension qu’avait Muhammad de Jésus-Christ et son rapport au Nouveau Testament. L'essence de cette réflexion est que la "christologie" dans l'islam n'est pas un article de foi autonome, mais plutôt un aspect de la "prophétologie" islamique.

La vision de Jésus en tant que prophète

Le Coran rejette la filiation divine de Jésus, insistant sur le fait qu'il n'est pas le Fils de Dieu.

Cependant, il ne porte aucun jugement négatif sur Jésus et ne le décrit pas comme un pécheur. Il est considéré comme un prophète (4.171) doté de caractéristiques uniques telles que "La Parole de Dieu" ou "L'Esprit venu de lui" (4.117).

Le Coran attribue également à Jésus le pouvoir d'accomplir des miracles, dont des guérisons, des résurrections et la création de la vie. Comparativement, Muhammad n'accomplit pas de miracles de cette nature.

Jésus est associé à l’Injil, le message qu'il a apporté aux hommes. Il est important de noter que le Coran ne rapporte pas les nombreux enseignements de Jésus présents dans la Bible. Cela conduit les théologiens musulmans à conclure que la divinité de Jésus a été élaborée par des théologiens chrétiens ultérieurs à l'époque de Muhammad.

Pour résumer, le Coran donne à Jésus une place spéciale parmi les prophètes, mais il est catégorisé comme un être humain inférieur à Muhammad.

La naissance de Jésus

Selon le Coran, l'ange Gabriel annonce à Marie que son fils est "miséricorde" et un "signe pour l'humanité" (19.21).

De plus, Jésus est unique en ce qu'il accomplit des miracles et est lui-même un signe. La sourate 19.20 affirme clairement que Marie est vierge et qu'elle n'est pas une prostituée. En outre, le texte coranique suggère que Jésus n'a pas de père. La sourate 3.59 établit également une comparaison entre la naissance de Jésus et celle d'Adam, soulignant ainsi la singularité de sa naissance.

La messianité de Jésus

Dans le quatrième chapitre, nous explorons la manière dont le Coran désigne Jésus comme "le Messie". Onze versets font référence à Jésus en tant que "Messie" (3.45; 4.157; 4.171), bien que la manière dont Muhammad le définissait ne soit pas claire.

[...] comme la théologie islamique l’a laborieusement dégagé ultérieurement du Nouveau Testament, il annonce pour le futur la venue d’un autre prophète, Muhammad. D’après la compréhension musulmane c’est en particulier l’évangile de Jean qui attire l’attention sur le dernier prophète (Muhammad), quand il prédit la venue d’un "défenseur" ou "avocat" (grec paraklètos), c’est-à-dire, selon la compréhension chrétienne, l’effusion du Saint-Esprit après la résurrection de Jésus.

Du côté musulman, en recourant à la "théorie du texte falsifié" appliquée au Nouveau Testament, on a conclu que, dans ce texte, ce n’était pas à l’origine le paraklètos (la bénédiction) qui a été annoncé, mais le periklutos (le béni). [...] On peut traduire pariklutos en arabe par Ahmad (le béni), donc un dérivé de Muhammad. Ainsi, dans le Nouveau Testament, quand il est question du paraklètos, selon l’apologétique musulmane, on a affaire à une prédiction de la venue de Muhammad.

Schirrmacher p.614

La crucifixion de Jésus

Le Coran évoque la crucifixion de Jésus dans un unique passage (4.157-158), mais sans en souligner l'importance. Plusieurs interprétations sont avancées par les théologiens coraniques pour expliquer pourquoi le Coran ne s'attarde pas sur cet évènement.

  • Personne n’a été crucifié. Les juifs voulaient le faire, mais Jésus a réussi à s’échapper.

  • Jésus a été crucifié, mais pas sur la décision des Juifs. Il a été tué par Dieu sur décision des Romains (position marginale).

  • Quelqu’un d’autre a été crucifié à la place de Jésus. C’est la théorie de la substitution. Cette thèse s’appuie sur l’évangile de Barnabé:

    Judas aurait été crucifié à la place de Jésus, tandis que Jésus montait au ciel.

    Cet évangile, très vraisemblablement apparu entre les XIVe et XVIe siècles, existe sous la forme de deux manuscrits en espagnol et en italien, mais ni en grec, ni en latin, ni en hébreu. [...] L’écrit présente une contradiction flagrante avec la tradition biblique et n’est pas facilement compatible avec le Coran non plus. [...] Du côté musulman, il est majoritairement considéré comme le seul évangile authentique de l’époque de Jésus qui ait échappé à la destruction concertée par les autorités ecclésiastiques et étatiques, après qu’on eut entrepris une falsification systématique du texte de l’Ancien et du Nouveau Testament.

    Schirrmacher, p.661

Les raisons de rejeter la résurrection

Les raisons avancées incluent l'idée que la résurrection serait une défaite de la mission de Jésus, qu'elle serait honteuse, et que les récits bibliques ne la mentionnent pas.

De plus, l'idée que Jésus soit mort en tant que substitut est jugée incompatible avec la raison humaine, et elle est vue comme une invention païenne de Paul. Les théologiens coraniques estiment également que la croyance en la mort du Créateur va à l'encontre du monothéisme.

Le refus de l'incarnation dans la trinité

La filiation divine de Jésus est rejetée par les théologiens coraniques pour des raisons éthiques, car Dieu ne peut avoir de relation avec une femme.

Ils estiment également que cela contredit l'unicité de Dieu et que le Créateur ne peut devenir créature.

La trinité est vue comme du polythéisme et en opposition à la croyance en l'unicité de Dieu. Les théologiens coraniques considèrent que la trinité est un dogme de l'Église, ne trouvant pas de support dans la Bible, et qu'elle viole la raison humaine.


Pour aller plus loin

Raphaël Charrier

À 17 ans, Raphaël s’engage dans l’armée dont il est renvoyé moins de deux ans après. Il reprend alors l’école et obtient le bac à 23 ans. C’est à ce moment qu’il découvre la personne et l’œuvre de Jésus-Christ et place sa foi en lui pour être sauvé. Il poursuit ses études et devient Éducateur Spécialisé. Il s’oriente ensuite vers des études de théologie à l’Institut Biblique de Genève, puis à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-Sur-Seine, afin de se consacrer au service de l’Évangile.

Raphaël a été pasteur de l'Église Chrétienne Évangélique de Grenoble pendant 9 ans. Il sert désormais l'Église comme enseignant. Il est marié à Marion et ils ont deux enfants. Il est auteur du livre Vivre pour Jésus, qui a pour objectif d'aider les chrétiens à poser les bons fondements de la vie chrétienne, et coauteur de L'Évangile.net: 7 signes, une ressource d'évangélisation basée sur l'Évangile selon Jean.

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Orateurs

K. Arezki