“C’est quoi l’Église idéale pour vous?” Nous avons tous une opinion sur le sujet. Dans L’Église: un bilan de santé, le pasteur Mark Dever nous encourage à aller un pas plus loin: de passer de la simple opinion à une réelle conviction biblique. Dans cette recension, je résume le livre, je cite quelques points forts et faibles et je termine en donnant mon avis.
C’est un livre pour tous. Dever commence en disant qu’il parle avant tout à tous les chrétiens, pas juste les pasteurs. Car la Bible à plusieurs reprises souligne l’importance et la responsabilité de toute l’assemblée d’une Église à veiller sur sa doctrine et son enseignement (Ga 1.6; 1Co 5).
Je pense que c’était ma première découverte du livre. Au regard de la couverture et du titre, je ne me rendais pas compte que c’était un livre tout public. Notez que c’est un livre qui peut aussi être particulièrement intéressant pour ceux qui ne voient pas l’importance d’être membres d’une Église locale.
Dever aborde dans une première partie des sujets de base. Chapitre 1: qu’est-ce qu’un chrétien? Chapitre 2: Qu’est-ce que l’Église? Au chapitre 3 on explore le but ultime de Dieu pour l’Église et au chapitre 4 il explique pourquoi c’est la Bible notre seul livre fiable pour vivre une vie d’Église qui reflète le caractère de Dieu (voir mon avis sur le chapitre 3 sous la section « Points forts »).
Dans la deuxième et troisième partie, l’auteur développe les neuf caractéristiques d’une Église en bonne santé. Il explique que ces neuf attributs ne couvrent pas tous les sujets importants d’une Église. Mais qu’ils «pourraient plutôt établir la distinction entre une Église biblique, saine et bien portante, et l’une de ses nombreuses sœurs malades. Ces neufs signes sont trop souvent absents aujourd’hui et ont, par conséquent, grand besoin d’être relevés et cultivés dans nos Églises.»
La deuxième partie traite les trois caractéristiques essentielles: la prédication par exposition du texte (#1), la théologie biblique (#2) et une compréhension de l’Évangile fondée sur la Bible (#3). La troisième partie traite des six autres indicateurs (« importants« ): ils s’agit d’une compréhension biblique de la conversion (#4), de l’évangélisation (#5) et de l’affiliation des membres (#6), la discipline d’Église exercée bibliquement (#7), un souci de faire des disciples qui grandissent rapidement en maturité (#8) et une structure de leadership biblique (#9).
Dever dit:
Les neuf caractéristiques décrites dans ce livre sont bibliques et font autorité pour les Églises de Jésus-Christ. Néanmoins, la distinction entre les indicateurs essentiels et ceux qui sont importants doit servir à nous rappeler que la sanctification, dans la vie de l’Église, comme dans nos vies personnelles, est un long processus.
En bref, les caractéristiques essentielles sont non négociables, mais il ne faut pas obligatoirement quitter son Église si elle ne fait pas preuve de toutes les caractéristiques importantes (p. 69) (voir ma remarque ci-dessous).
Les neuf caractéristiques d’une Église en bonne santé sont vraiment utiles. Utiles pour savoir quoi regarder dans une Église. Utiles pour savoir vers quoi viser en tant qu’assemblée.
Le chapitre 3 sur le but de Dieu pour l’Église est vraiment à lire. Dever commence avec cette définition: « Une Église saine est une assemblée qui reflète chaque jour un peu plus le caractère de Dieu, tel qu’il a été révélé dans sa Parole. » Il fait ensuite un survol rapide de la Bible pour montrer les fondements bibliques de cette définition. C’est le chapitre qui fait ressortir le mieux une des forces de Dever: son don à prêcher sur des livres entier de l’Ancien Testament en un message.
On ne peut pas le dire trop souvent. Qu’il ait mis la prédication textuelle en #1 est intentionnel et important. Si c’est la première fois que vous entendez parler de ce genre de prédication, lisez les 5 pages du chapitre 5. Vous comprendrez que Dever voit la prédication comme le repas principal que reçoivent les membres de l’Église et l’alimentation doit être saine et équilibrée. Il précise quels genres de prédication ne sont pas textuelles:
Quelquefois, les gens identifient la prédication par exposition du texte au fait de lire un version, puis de l’utiliser pour enseigner librement sur un sujet qui y serait lié. Mais lorsqu’un prédicateur exhorte une assemblée sur un thème qu’il a choisi, se servant de textes bibliques pour appuyer ses dires, il n’enseignera jamais plus que ce qu’il connaît déjà et son auditoire n’apprendra jamais plus que ce que le prédicateur sait déjà. La prédication par exposition de texte exige davantage (p.53).
J’aime bien les deux petites « annexes » en milieu du livre. L’une propose des petits conseils pour trouver une bonne Église (p. 66-67) et l’autre (p. 48) s’adresse à ceux qui « songent à quitter leur Église. »
Je pense que certains lecteurs seront rebutés par l’affirmation que les neuf caractéristiques sont bibliques. C’est surtout la prédication textuelle (#1) qui rebutera plus d’un lecteur. Comprenez-moi. Je pense que les meilleures prédications sont les prédications textuelles (c.-à-d.: ou l’idée principale du texte biblique est l’idée principale de la prédication). Mais le livre aurait gagné en force si Dever avait pris plus de place pour défendre son affirmation que la prédication textuelle est une caractéristique biblique d’une Église en bonne santé.
J’ai trouvé le style du livre plutôt lourd. Sachant que Mark Dever est un grand lecteur, un auteur prolifique et qu’il a un doctorat de Cambridge en histoire de l’Église, je suppose que c’est la traduction qui est coupable.
Enfin, je regrette le manque de contextualisation du livre. Par exemple: ce sont exclusivement des livres anglais sur l’évangélisation qui sont recommandés (p. 74). Autre exemple, l’auteur, déplorant l’écart important entre le nombre de membres dans une église et le nombre des personnes qui assistent au culte, cite des statistiques des Églises baptistes du sud (p. 82). Qu’en est-il des Églises françaises? A-t-on aussi des écarts? On n’en parle pas.
Le besoin pour des livres exhortant à une Église plus saine est énorme. Ce petit livre est une bonne introduction pour réfléchir à ce qu’on recherche dans une Église. J’adhère vraiment aux idées de Mark Dever.
Un risque à la lecture du livre est peut-être de devenir amer et de se dire: Est-ce qu’il existe une seule Église comme ça dans ma ville? Pour vous rassurer, notre Église actuelle (en Allemagne) ne prêche pas des prédications textuelles (Signe #1). Les sermons sont des thèmes avec tout un assortiment de versets retrouvés sur le thème grâce à une concordance. Pourtant, Dieu n’attend pas qu’on prêche textuellement pour agir pour le salut de la ville et pour sa gloire (mais le risque de dérive de l’Église est plus grand). Dieu agit par bien des manières malgré l’absence d’une caractéristique essentielle.
Pour conclure, je termine avec les mots de Mark Dever nous encourageant à lire ce livre:
Vos pasteurs paraîtront devant Dieu pour rendre compte de la manière dont ils auront conduit votre assemblée (Hé 13.17). Par contre, chacun des disciples du Seigneur Jésus-Christ devra également s’expliquer: nous sommes-nous assemblés régulièrement avec l’Église? Avons-nous incité les autres à l’amour et aux bonnes œuvres? Avons-nous confessé sans fléchir l’espérance de l’Évangile, en combattant pour maintenir un enseignement juste (Hé 10.23-25)?
L’Église: un bilan de santé, de Mark Dever.