La grâce à l’œuvre chez des détenues au Sénégal

Mission de l’ÉgliseTémoignage

Ceci fait partie d’une série d’articles dans lesquels je partage des témoignages de mon parcours au service du Seigneur en Afrique. Puissent-ils être un encouragement pour de nombreuses personnes.

Pendant mes années au Sénégal, j’ai eu la joie de servir en tant qu’aumônier dans une prison. Ces mardis après-midi étaient le point culminant de ma semaine alors que notre équipe exerçait son ministère par la Parole et la prière auprès des femmes incarcérées. Permettez-moi de vous brosser un tableau du Seigneur à l’œuvre parmi les femmes marginalisées de la Maison d’arrêt et de correction de Thiès.

Le dortoir

D’étroits matelas en mousse tapissent les murs des deux pièces que partagent cinquante femmes détenues. Quelques-unes ont réussi à accrocher des moustiquaires individuelles. La plupart s’en passent et doivent faire face aux conséquences de l’exposition à « la créature la plus dangereuse de l’Afrique ».

Les activités quotidiennes

Les activités de la matinée comprennent les douches (cinquante femmes se partagent deux douches, alors vous pouvez imaginer les files d’attente!), la lessive (qui est faite à la main et pour laquelle chaque femme doit fournir son propre savon), le balayage et le nettoyage des zones communes.

Les repas communautaires

Le petit-déjeuner, qui consiste en un morceau de baguette avec du café ou du lait, est pris vers 10 ou 11 heures du matin. Chaque détenue est responsable de son propre repas du matin, de sorte que celle qui n’a pas les moyens d’acheter son pain doit jeûner jusqu’à 14 heures, moment où le déjeuner est servi.Les femmes se partagent les tâches de cuisine pour le repas de midi, le plus grand repas de la journée. Les autorités pénitentiaires fournissent le riz, le poisson et l’huile, et la cuisinière désignée ce jour-là doit fournir les épices, les légumes et les garnitures qui en font un repas.

Les activités hebdomadaires et les fêtes

La seule chose qui distingue un jour d’un autre, ce sont les membres des organisations caritatives qui viennent faire une visite l’après-midi. Des études et des cours dispensés par des catholiques, des musulmans, des évangéliques et une organisation laïque offrent une pause dans la monotonie abrutissante de la vie. Les fêtes offrent une autre échappatoire, car les détenues se parent de leurs plus beaux habits, le poisson habituel est remplacé par du mouton, de la chèvre ou du bœuf, et le riz fait place aux vermicelles ou au couscous.

Le repas du soir est tardif et léger, à 20 ou 21 heures, et se compose souvent de bouillie, de pommes de terre ou de pâtes avec une sauce aux oignons. Dans la seule pièce équipée d’une petite télévision, les femmes se réunissent pour se divertir, tandis que d’autres se relaient pour prendre leur douche.

Nos études bibliques

Nos études bibliques du mardi après-midi ont commencé presque deux ans auparavant, lors d’une fête de Noël qui s’est terminée par une présentation de l’Évangile et une invitation à recevoir Christ. Six femmes catholiques et une musulmane ont répondu, et une petite étude biblique a commencé avec deux sœurs fidèles qui se relayaient pour enseigner via une interprète.

Puis, l’occasion s’est présentée de diffuser des leçons chronologiques d’histoire biblique en wolof, et tant l’équipe que les autorités pénitentiaires ont accordé le feu vert. Peu après, notre assistance a doublé, les nouvelles femmes étant composées de musulmanes. Quelle émotion pour moi de voir ces dames, si peu exposées à l’Évangile, prendre place sur des nattes et des bancs autour de notre petit lecteur MP3 pour écouter ensemble les histoires de la Parole de Dieu. Ensuite, nous avons un temps de questions et réponses, suivi de la prière et des chants.

Les deux crimes les plus communs

Bien que divers crimes aient conduit ces femmes en prison, les deux plus courants sont le trafic de drogue et l’infanticide (généralement commis juste après l’accouchement, l’avortement étant illégal). Permettez-moi de vous raconter un peu l’histoire de chacun de ces crimes. Bintou, l’une des femmes qui participe à notre étude (en prison pour un autre crime), m’a aidé à mieux comprendre ce qui pousse une jeune femme à tuer son propre bébé.

L’histoire derrière ces crimes

Quand une fille rentre à la maison avec des sommes d’argent pour lesquelles elle ne peut rendre compte, ses parents ne posent pas de questions. Ils prennent simplement ce qu’elle partage avec eux et ferment les yeux sur la réalité de la source. Mais la vérité est que leur fille se donne sexuellement à un homme qui est prêt à la récompenser pour l’affection qu’elle lui procure. Lorsque leur fille rentre à la maison enceinte, tout ce qu’elle a fait pour aider à subvenir aux besoins de la famille ne signifie plus rien. Elle fait honte à ses parents, qui la renient et la chassent de la maison. Évidemment, l’homme est parti depuis longtemps, et la jeune femme se retrouve dans une situation désespérée dans laquelle elle ne voit d’autre issue que de mettre fin à la vie de son bébé à l’accouchement.

Je ne dis pas cela pour justifier qu’une femme noie son propre bébé dans les toilettes, mais je pense qu’il est utile de comprendre le sort des femmes liées par une telle pauvreté et une telle ignorance. La pauvreté, bien sûr, est aussi ce qui pousse les femmes à commettre le deuxième crime que j’ai mentionné, le trafic de drogue. En Occident, lorsque nous pensons aux vendeurs de drogue, nous pouvons imaginer des types louches qui traînent près des collèges et des lycées pour essayer de rendre les enfants accros à la drogue.

D’après ce que j’ai compris, c’est loin d’être ce que font ces femmes. Le terme le plus exact pour les décrire est probablement celui de mule, qui désigne dans ce cas une personne qui transporte des drogues qui ont été acheminées par avion en Afrique de l’Ouest depuis l’Amérique du Sud, le long d’une autoroute invisible menant à l’Europe. La demande réelle, bien sûr, est là. Ces dames ne vendent de la drogue à personne, elles essaient juste de survivre. Encore une fois, cela ne rend pas la chose acceptable, mais connaître leur histoire m’aide à mieux comprendre les femmes que nous souhaitons ardemment atteindre avec l’amour de Christ.

Nous sommes tous des fils et des filles prodigues

Comme c’est le cas chaque fois que nous, les croyants, voyons des personnes faire de très mauvais choix, nous devons nous rappeler cette simple vérité: nous sommes tous et toutes des fils et des filles prodigues qui ont été embrassés par les bras aimants du Père (Lc 15.11-32). De peur de tomber dans le péché du fils aîné qui porte un jugement, je me rappelle souvent: « Si ce n’est pas moi, ce n’est que par la grâce de Dieu. »

Angie Velasquez Thornton

En équipe avec son mari Daniel, Angie a servi le Seigneur au Sénégal pendant 10 ans, dans la formation des leaders. Installés à Montréal avec leurs 2 filles depuis août 2017, ils servent à l'Église Baptiste Évangélique Emmanuel et dans l'AEBEQ. Angie est titulaire d'un MDiv de Moody Theological Seminary. Depuis mai 2021, elle coanime le podcast Chrétienne, avec Aurélie Bricaud. Elle est également Responsable du ministère féminin de SOLA (TGC Québec) et blogueuse sur le site The Gospel Coalition Canada.

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