Ce livre est parfait pour former des petits pharisiens de la pureté, qui soignent l'extérieur tout en négligeant la transformation du cœur. Il a été écrit comme si la grâce n'existait pas, et comme si Dieu était un distributeur automatique.
Curieux de cet enthousiasme, j’ai décidé de lire le livre pour me faire mon propre avis.
Non seulement j’ai été déçu par son contenu, mais cela m’a également poussé à écrire cet article pour mettre en garde contre ce livre qui s’éloigne de la Bible à plusieurs niveaux. Dans cet article, j’identifie quatre problèmes majeurs du livre Plus pur que le diamant, avant de terminer par quelques réflexions plus générales sur le thème de la pureté.
Je suis d’accord avec plusieurs principes généraux que ce livre essaie de mettre en avant, comme le fait de rejeter l’immoralité, la nécessité de vivre à contre-courant des principes de ce monde, le caractère précieux du mariage, l’importance de bien se nourrir spirituellement. Cependant, je me retrouve quasi constamment en désaccord avec l’application de ces principes ou la manière dont l’auteure les exprime.
Suzanna de Ferrières met en avant des règles de conduite qui vont plus loin que ce que la Bible demande et qui ne respectent pas certains principes fondamentaux de liberté chrétienne. Par exemple, l’auteure ne se contente pas d’avertir contre l’abus d’alcool – que la Bible condamne –, mais prescrit également de s’en abstenir tout court (pp. 75-76). L’auteure ne dit pas simplement que la vertu intérieure vaut plus que l’apparence extérieure, mais affirme également qu’une femme ne devrait porter que les bijoux qui sont strictement nécessaires (p. 43). Elle déclare aussi qu’un enfant de Dieu “ne se sent pas à son aise” au cinéma, qu'elle caractérise comme “un prétendu lieu de plaisir de ce monde pécheur” (p. 81)2.
Quelqu’un pourrait dire que ces conseils sont liés à l’époque particulière et au contexte dans lequel Suzanna de Ferrières écrit. C’est probablement le cas pour certains d’entre eux, mais il faut être clair que:
Ce que ce livre partage, c’est une compréhension très stricte de ce à quoi un chrétien doit ressembler: comment il doit s’habiller, comment il doit parler, comment il doit agir. C’est strict – mais strict selon ce que l’auteure, avec ses propres présupposés, comprend être strict. Cela peut paraître spirituel, mais nous devons être clairs: être plus "strict" que la Bible n'est pas une preuve de maturité spirituelle. Ce n'est pas spirituel d'interdire ce que la Bible permet (voir 1Tm 4.3-5)!
Plus pur que le diamant présente les mêmes mécanismes qui se trouvent à la racine de l’évangile de la prospérité. À plusieurs reprises, ce livre laisse penser que si nous suivons les règles établies par l’auteure, alors nous pouvons avoir la certitude de recevoir une récompense de la part de Dieu, qui ressemblera probablement à un mariage heureux.
Ce livre est illustré par le propre témoignage de l’auteure. Elle cite le psaume 37.4 comme une promesse pour le mariage : si tu mets Dieu à la première place, alors il te donnera le conjoint que tu désires. Pour confirmer la véracité de ce verset pour ses lecteurs, elle témoigne de sa propre expérience. Elle décrit comment elle a vécu une "vie pure et sainte" et "travaillé pour lui" (le Seigneur) avec zèle depuis sa conversion. Puis, elle conclut:
Quelle a été ma récompense ? Un mari aimant, au cœur noble, sanctifié, une union heureuse.
p. 19
La même logique se trouve à plusieurs endroits dans ce livre (pp. 23-24, 42, 78). Par exemple, en mettant en garde contre une amitié malsaine, l'auteure écrit:
Ne joue pas avec cette amitié; mets-toi tout de suite à prier et à faire ce que dit la Bible, ta récompense sera belle.
p. 91
Cette citation illustre bien le principe qui anime ce livre. C'est un principe mécanique: si tu obéis, tu seras récompensé. La récompense sera vraisemblablement un conjoint merveilleux (l’auteure mentionne simplement en passant la possibilité du célibat).
Ce livre présente donc la pureté comme un donnant-donnant. Si je donne à Dieu ma pureté, alors il va me donner en retour la joie d’un foyer heureux et stable.
Cette vision est plus païenne que chrétienne. C’est une sorte de karma chrétien qui n’a, au final, rien de chrétien. C’est "l’évangile" du bien-être dans toute sa splendeur. Si je suis fidèle, si j'obéis, alors Dieu va me donner ce que je veux. C'est un "évangile" qui transforme Dieu en un distributeur automatique, et qui met l'être humain au cœur des projets de Dieu. C’est un "évangile" qui n’a rien de glorieux.
Non seulement le livre promet la récompense pour l’obéissance, mais il promet aussi un avenir sombre en cas de désobéissance. À plusieurs reprises, l’auteure fait preuve d’un mécanisme vraiment douteux : “Si tu désobéis, si tu n’es pas fidèle au Seigneur, ta destinée en sera affectée négativement.”
Voyez par exemple ces affirmations:
Si tu veux un foyer heureux, veille à ce que ton comportement, dans ta jeunesse, n'attire pas un jugement sur ta vie.
p. 22
Il y a, bien sûr, des exceptions mais, d'une manière générale, une jeunesse dissipée est suivie d'un mariage malheureux.
p. 223
Tout au long du livre, l’idée transmise est que, si nous chutons dans le domaine de la pureté, ce qui nous attend est un mariage instable, une sexualité misérable et probablement le divorce. Une telle logique devrait nous choquer. Non seulement nous savons que l’obéissance ne mène pas toujours à une vie facile (Job en est un exemple), mais nous savons aussi que beaucoup de ceux qui rejettent Dieu ont une vie agréable et sans beaucoup de soucis (voir Ps 73).
Cependant, de manière plus grave, à la lumière de tels propos, j’ai l’impression que ce livre a été écrit comme si la grâce n’existait pas, et comme si le christianisme était une religion d’œuvre.
Il est vrai que le péché a des conséquences. C’est en particulier le cas pour l’immoralité sexuelle. La pornographie, par exemple, laisse des traces dans la vie de quelqu’un, même lorsque le pardon a lieu. C’est un encouragement à fuir ces choses!
Cependant, il faut être clair que le pardon est possible. Dieu ne met pas un « jugement sur notre vie » si nous avons échoué dans ce domaine. Il y a toujours une deuxième chance. J'aimerais donc, chers lecteurs, vous présenter la grâce que ce livre n'offre pas. Cette grâce se trouve en Jésus. Le pardon est possible. Ici-bas, il y a toujours une deuxième chance dans ce que nous sommes devant Dieu. Si vous en doutez, vous pouvez relire 1 Corinthiens 6.9-11...
Plus brièvement, il me semble que Suzanna de Ferrières décrit la sanctification avec un certain "perfectionnisme", c'est-à-dire, avec l'idée qu'un chrétien peut arriver à un stade où il ne va plus pécher, ni être tenté par le péché.
Il semblerait que ce soit automatique: si tu es né de nouveau, alors "tu ne risqueras pas de laisser ton cœur s'éprendre d'une personne qui n'est pas digne de toi" et "ce qui n'est pas agréable à Dieu n'aura plus d'attrait pour toi" (p. 17)4. Pourtant, nous savons que le péché reste une réalité, même pour le chrétien (1Jn 1.8). Oui, lorsque nous sommes nés de nouveau, il y a un changement radical vis-à-vis du péché. Il n'est plus notre maître. Pourtant, la lutte reste.
Un manque de réalisme à ce niveau, dont ce livre semble faire preuve, ne sert qu'à faire douter les chrétiens de leur salut (si je ressens l'attrait du péché, si mon cœur est attiré dans une autre direction, suis-je vraiment né de nouveau?) au lieu de les encourager à lutter contre le péché à sa racine.
Le fait que la foi chrétienne offre une deuxième chance ne veut pas dire que la pureté n’est pas importante. Le fait de critiquer ce livre n’implique pas que l’on devrait avoir une vision laxiste de la pureté. Bien au contraire! Ce monde fait la guerre à la pureté chrétienne, et il nous faut résister. Cependant, plusieurs éléments importants sont à garder en tête.
D'un côté, je suis surpris de l'enthousiasme autour du livre Plus pur que le diamant. Plusieurs conseils de ce livre sont vraiment dépassés par le temps (et font sourire), et c'est surprenant qu'il attire de nouveaux lecteurs malgré tout.
De l’autre côté, je ne suis pas si surpris que ça. Nous aimons les choses faciles et mécaniques: “Dis-moi ce que je dois faire, et je le ferai.” C'est ce que ce livre offre. En plus, il promet une récompense à la clé! C'est simple, c'est mécanique, c'est légaliste.
La vie chrétienne n’est ni simple ni mécanique. Oui, Dieu nous a donné un "code de conduite" dans les 66 livres de la Bible. Mais ce code de conduite ne décrit pas de manière détaillée le comportement chrétien dans tous les domaines. Au contraire, la Bible nous donne la connaissance, la sagesse, l’amour pour Dieu, qui nous permet de développer un caractère qui honore Dieu, par lequel nous sommes capables de discerner par nous-mêmes ce à quoi ressemble une vie vécue pour la gloire de Dieu.
De plus, le livre attire parce qu'il fait de belles promesses. Qui ne veut pas un mariage heureux? Un foyer paisible? C'est ce que ce livre promet. Mais il fait des promesses qu'il ne peut pas tenir.
Je suis vraiment déçu que l’éditeur ait choisi de republier ce livre.
Je reconnais qu’il y a dans l’histoire chrétienne de nombreux trésors que nous ne devrions pas ignorer. Je crois également que nous devrions être prêts à lire des choses qui paraissent "dépassées", d’une certaine manière. Cependant, le plus grand problème de ce livre n’est pas qu’il est d’une autre époque, mais qu’il est complètement à côté de la plaque. Pourquoi l’avoir republié?
Plutôt que de lire ce livre, voici d’autres recommandations qui valent votre temps. Je n’ai pas lu tous ces livres, mais ils m’ont été recommandés par l’équipe de TPSG.
webinaire
De l'amitié au mariage: les 4 étapes de l'intimité
Ce replay du webinaire de Nicolas VanWingerden a été enregistré le 12 février 2020.
Orateurs
N. VanWingerden