La troisième loi de Newton enseigne que chaque action entraîne une réaction opposée, mais égale. Bien que cette loi concerne la physique, elle semble tout aussi pertinente dans le domaine des idées. Dernièrement, les règles de vie pour protéger leur couple [ne pas voyager, rencontrer ou manger seul avec une femme autre que son épouse, ndtr] émises par Billy Graham et reprises par Mike Pence [Vice-président des États-Unis, ndtr] a suscité une réaction similaire à propos de l'amitié entre un homme et une femme. Pour être clair, il ne s'agit pas ici de l'amitié entre couples, mais de savoir s'il est acceptable et souhaitable qu'un homme et une femme partagent une amitié profonde, alors que chacun des deux est marié.
De nombreux textes sur l'amitié homme-femme m'ont interpellé et j'ai beaucoup réfléchi à ce sujet ces derniers mois. J'ai hâte d'appliquer cela à ma propre vie et à mes amitiés féminines. J'ai remarqué qu'une grande partie de la discussion sur les amitiés entre personnes de sexe opposé dépend de l'analogie que l’on fait ou non à propos des mots frère et sœur, si fréquents dans les Écritures. Lorsque nous mettons notre foi en Jésus-Christ et recevons son salut, nous sommes adoptés dans la famille de Dieu, devenant frères et sœurs dans le Seigneur. Cette relation est une immense bénédiction et est primordiale dans la vie chrétienne. S'adresser l'un à l'autre en tant que "frère" et "sœur" n'est pas seulement une tradition chrétienne, mais la proclamation d'une précieuse vérité!
Si le concept de famille spirituelle reflète quelque chose d'authentique (nous sommes liés en Jésus-Christ), c'est aussi une métaphore. La métaphore facilite la compréhension, mais elle a toujours ses limites et il ne faut pas la pousser trop loin. Par défi, j'ai décidé de me pencher sur cette métaphore de frère et de sœur pour en déceler les limites.
J'ai trois sœurs biologiques avec lesquelles j'entretiens des relations privilégiées. Cette proximité n'est pas seulement le fruit d'une enfance et de gènes communs. Nous passons aussi beaucoup de temps ensemble et nous nous confions sur des détails intimes de nos vies. Je vais volontiers prendre un café ou un repas avec chacune des trois. Je passe la nuit chez elles, même si leur mari n'est pas là. Je monte en voiture avec elles à n'importe quelle heure et dans n'importe quelle circonstance. Je les appelle pour discuter, on traite de questions essentielles et profondes. J'essaie même de les conseiller avec sagesse sur des sujets qui leur sont très personnels. Je recherche aussi leurs conseils concernant ma vie ou mon mariage. Je conclus chaque appel téléphonique par “je t'aime”. Nous vivons une forte intimité relationnelle et pourtant, il n'y a pas le moindre doute, la moindre ambiguïté ou le moindre malentendu quant à la nature de notre relation ou de nos intentions. Pourquoi? Parce que nous sommes frères et sœurs de sang. Ce n'est pas tout: personne n'a le moindre soupçon à l'égard de notre relation pour cette même raison. Même si quelqu'un fronce les sourcils lorsqu'il nous voit ensemble, il suffit de dire “Je te présente ma sœur!” pour que tout soupçon disparaisse.
Cette relation frère-sœur est-elle le modèle de ce que je devrais vivre avec des sœurs en Christ? La réponse est à la fois oui et non.
La réponse est "oui", car frères et sœurs en Christ sont appelés à calquer leur amour, leur engagement et leur pureté sur ce qu'est une famille. Traitez "les femmes âgées comme des mères, celles qui sont jeunes comme des sœurs, en toute pureté", dit Paul à Timothée (1Tm 5.2). C'est comme s'il disait: "Pensez à vos propres sœurs et agissez de même, avec amour et en toute pureté, envers les jeunes femmes de votre Église." C'est très bien. Mais je reste persuadé qu'à un certain niveau, nous pouvons dépasser une limite, et c'est là que nous sommes confrontés au "non". Je vous explique comment je vois le problème.
Supposons qu'un jeune chrétien célibataire cherche une femme avec laquelle il puisse partager sa vie, vivre une histoire d'amour et une relation sexuelle. Vu le nombre de femmes dans le monde, les seules avec lesquelles il ne doit absolument pas établir une telle relation, ce sont ses sœurs biologiques. Sinon ce serait une violation flagrante de la loi naturelle, de la loi de l’État et de la loi de Dieu. Ainsi, ses sœurs biologiques sont celles avec lesquelles il ne peut absolument pas avoir de relation amoureuse, se marier et avoir de relations sexuelles. En ce sens, elles sont hors d'atteinte.
Alors, qui sont les personnes éligibles? Les sœurs de l’Église. Les sœurs spirituelles. Les sœurs biologiques sont celles qu'il ne doit pas choisir et les sœurs spirituelles celles parmi lesquelles il doit choisir. Un jeune chrétien se tourne avec raison vers ses sœurs spirituelles s'il veut nouer une relation. Relation qui serait, en revanche, tout à fait immorale avec ses sœurs biologiques. La relation familiale frère-sœur n'a donc qu'une portée limitée, et au-delà, la métaphore ne fonctionne plus. Nous sommes frères et sœurs d'une certaine manière, mais pas d'une autre.
Revenons à la relation que j'entretiens avec mes trois sœurs. Voyez l'intimité que nous partageons. Elle est le fruit d'une franchise réciproque, du temps privilégié passé ensemble et de notre volonté de nous dire "je t'aime". Il n'y a pas de crainte, de romance ou de sexualité. Il n'y a aucun risque de confusion sur nos intentions, ni de malentendu sur la nature de notre relation. Cela nous donne une immense liberté pour nous apprécier mutuellement et poursuivre une relation riche et constructive. Mes sœurs et moi pouvons entretenir et apprécier cette intimité en partie parce qu'elles font partie du groupe "hors d'atteinte".
Mais toutes les autres femmes sur terre ne font pas partie de ce groupe-là. Nous pouvons être heureux en ménage. Nous pouvons avoir des intentions et des désirs absolument purs vis-à-vis d'une sœur en Christ, mais elle n'est pas pour autant une sœur biologique. Dans certaines circonstances (après le décès des deux conjoints respectifs, par exemple), une relation amoureuse et sexuelle parfaitement respectueuse de Dieu peut se nouer entre un frère et une sœur en Christ, ce qui n'est jamais le cas avec une sœur ou un frère biologique. Cela démontre que ces deux relations frère-sœur sont similaires, mais elles ne le sont pas parfaitement et complètement. La métaphore ne peut s’appliquer en totalité. Je ne peux pas l'utiliser à tout-va et je dois éviter d'en abuser.
La relation frère-sœur a vraiment beaucoup à m'apprendre à cet égard. Mais ce n'est pas une métaphore exhaustive et ce n'est pas non plus la seule expression biblique pour décrire les relations chrétiennes. J'ai la responsabilité d'y réfléchir et d'en tenir compte, mais je dois aussi veiller à ne pas l’appliquer de manière excessive.
webinaire
De l'amitié au mariage: les 4 étapes de l'intimité
Ce replay du webinaire de Nicolas VanWingerden a été enregistré le 12 février 2020.
Orateurs
N. VanWingerden