Est-ce légitime d’utiliser le mot "réveil"?

Prédication et enseignementRéveils

Parler de "réveil" attire. Mais est-ce légitime d’utiliser le mot "réveil" pour définir un mouvement? Je republie ici la conclusion de mon travail de fin d’études, réalisé pour l’Institut Biblique de Bruxelles, sur le thème du réveil.

Pour lire une synthèse de l’ensemble de ce TFE, cliquez-ici.

Le terme « réveil », même s’il n’est apparu qu’au 18e siècle1, est utilisé régulièrement depuis lors. Et le souci est que chaque personne qui l’utilise semble entendre quelque chose de différent à propos de la définition de ce mot.

N’utilisons pas le mot « réveil » si cela amène à regarder aux hommes plutôt qu’à Dieu

Est-il juste de parler de tenir une « réunion de réveil »? À la lumière de ce que nous avons vu, il faut affirmer qu’un réveil n’est pas une action de l’homme. C’est une action de Dieu avant tout. Ce n’est pas quelque chose que l’homme fait, mais quelque chose que Dieu fait. Cela implique qu’il ne faudrait donc pas confondre « réveil » et « évangélisation ». Il est bon et sage d’évangéliser, mais pourquoi confondre les deux concepts?

Le danger est le même en parlant d’un « prédicateur revivaliste ». Qu’entend-on par-là? Est-ce le prédicateur qui amène le réveil? Est-ce qu’il aurait quelque chose que d’autres n’auraient pas? Est-il un prédicateur de réveil à défaut d’être un prédicateur de la Parole? 

Si l’usage de ce terme nous amène à porter les regards sur l’homme plutôt que vers Dieu, il est probablement plus sage de ne pas l’utiliser. Et il semble que bien souvent, lorsqu’on parle de « réunion de réveil » ou de « prédicateur revivaliste », il y a une tendance à chercher l’expérience humaine plutôt que de s’attacher à la fidélité à la Parole.

N’utilisons pas le mot « réveil » pour scinder l’histoire en deux

En utilisant le terme « réveil », on peut également ressentir une certaine nostalgie. On regarde le passé, et on remarque plein de périodes où Dieu a agi de manière remarquable. On regarde le présent, et tout nous semble différent…Mais ne croyons pas que Dieu n’agit que pendant certaines périodes importantes de l’histoire. Quand on parle de réveil, le danger est de distinguer l’histoire de l’Église en deux parties: les périodes de réveils et les périodes creuses2. L’erreur serait de penser que Dieu agit uniquement en période de réveil, et que le reste du temps il n’est pas à l’œuvre. Mais l’Esprit de Dieu est à l’œuvre en tout temps, même quand cela est moins visible à des yeux humains. L’œuvre de Dieu se fait, même dans le secret. Dieu est à l’œuvre de nos jours, même dans les petites assemblées des Ardennes en Belgique ou de la Normandie en France. Quand bien même cela ne se trouve pas écrit dans les grands livres d’histoires de l’Église!

L’Évangile porte du fruit et progresse encore (cf. Col 1.6), et nous pouvons rendre gloire à Dieu pour ça. Alors n’utilisons pas le terme « réveil » si cela implique de distinguer des périodes où Dieu agirait et d’autres où il n’agirait pas.

Dans le doute, s’abstenir?

Comment alors qualifier ces périodes du passé ou ces phénomènes que nous observons autour de nous dans certains endroits aujourd’hui? Nous ne voulons pas exclure totalement le terme « réveil », mais vu toute la confusion qui existe autour de ce mot, il faut reconnaître que son utilisation fait parfois plus de mal que de bien. Dans le doute, il peut être bon de s’abstenir, de ne pas l’utiliser, et d’y substituer un terme un peu moins connoté, en tout cas pour une grande partie des cas.

Par exemple, de manière générale, pourquoi ne pas parler d’une « œuvre particulièrement intense de Dieu »3? La réforme, par exemple, est une œuvre de Dieu pour laquelle on peut lui rendre gloire. Notre conversion personnelle l’est aussi. La croissance de nos Eglises respectives également, comme tous les récits missionnaires encourageants que nous entendons de par le monde. Parler d’une « œuvre de Dieu » ou d’une « œuvre particulièrement intense de Dieu », c’est amener à rappeler qu’avant tout c’est Dieu qui a agi et c’est à lui qu’on doit rendre gloire!

Conclusion: l’Évangile biblique au centre

Quoi qu’il en soit, puissions-nous être vigilants sur la manière dont on utilise ce terme. Et peu importe le terme qui les définit, tous ces mouvements doivent laisser la place centrale à Jésus-Christ lui-même, auquel cas on ne peut parler ni de « réveil » ni d’une chose souhaitable pour l’Église. Malheureusement, on parle trop souvent de ce mot sans parler du Christ qui doit en être le centre.

Il est probable que cette remise en question nous concerne directement, chrétiens du 21ème siècle. Nous soupirons et voudrions absolument revivre des événements comme le passé en a connu (la Réforme, Whitefield et Wesley, Spurgeon, …). Ce désir est bon, mais plutôt que de chercher cela au détriment de la vérité, cherchons avant tout à nous approprier jour après jour l’Évangile qui était le cœur de ces mouvements. Cet Évangile peut produire en nous un renouveau quotidien, un zèle plus grand, une adoration plus pure. Ce Christ mort et ressuscité est celui qui peut nous amener à être fermes, inébranlables, et à travailler de mieux en mieux à l’œuvre du Seigneur (cf. 1Co 15.58). C’est ce pour quoi nous pouvons prier, pour nos vies et celles de ceux qui nous entourent. Et que Dieu agisse dans ce monde, selon son bon plaisir, et pour sa seule gloire.

1. Voir MURRAY, Pentecost – Today?, p.3, note 1 pour plus de détails sur l’origine du terme.
2. Iain H. Murray souligne la même idée, de manière rapide, dans MURRAY, Pentecost – Today?, p.2-3
3. Merci à James HELY HUTCHINSON pour son aide dans la précision de ce terme.

Benjamin Eggen

Benjamin est marié à Jessica, papa d'une petite fille, et pasteur-adjoint de l’Église Protestante Évangélique de Bruxelles-Woluwe. Il a fait ses études à l’Institut Biblique de Bruxelles, où il enseigne ponctuellement. Il est l’auteur de plusieurs livres, dont Soif de plus? et Qu’est-ce que tu crois?. Vous pouvez le suivre sur sa chaîne YouTube.

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