Si un étranger vient séjourner avec vous dans votre pays, vous ne l’opprimerez point. Vous traiterez l’étranger en séjour parmi vous comme un indigène du milieu de vous; vous l’aimerez comme vous-mêmes, car vous avez été étrangers dans le pays d’Égypte. Je suis l’Éternel, votre Dieu.
Lévitique 19.33-34
Si la loi de Moïse délimite ce que Dieu attend du peuple d’Israël, dans le livre de Ruth, nous voyons en action la fidélité à la loi, et en particulier celle relative au traitement de l’étranger. Elle est soulignée dès ses premiers versets: le chapitre d’ouverture de Ruth dévoile une des plus belles histoires d’amour de la Bible, non pas entre un homme et une femme, mais entre une belle-fille et sa belle-mère. Ruth s’attache à Naomi pour la vie (Rt 1.16-17). Elle incarne le principe fondamental de l’éthique de la nation: « Tu aimeras ton Dieu de tout ton cœur » (Dt 6.5) « et ton prochain comme toi-même » (Lv 19.18). L’ironie de la chose est que c’est cette femme moabite qui montre aux Israélites ce que signifie cette loi, par la façon dont elle traite Naomi, une étrangère dans son pays.
Ruth et Naomi entreprennent un voyage périlleux que peu de femmes oseraient faire sans homme, dans cette période chaotique et souvent violente des juges. Il n’y a pas de lumière dans les rues, ni de routes pavées, ni d’aires de repos. Ces deux veuves sont des proies faciles pour les bandits – et puis il y a le fleuve Jourdain à traverser et une côte de 600 mètres à gravir. Mais Naomi est résolue à rentrer au pays, et Ruth s’est engagée à l’accompagner, coûte que coûte.
En arrivant à destination, toute la ville est émue à cause d’elles. Dans son amertume, Naomi déclare aux femmes de Bethléem: “J’étais dans l’abondance à mon départ, et l’Éternel me ramène les mains vides.” (Rt 1.21)
Mais qui ne voit-elle pas juste devant elle? Son extraordinaire belle-fille, Ruth! Le chapitre 1 se termine sur une note sombre, mais l’histoire s’améliore considérablement au fil des pages: Ruth continue à faire preuve d’amour et demeure fidèle à son alliance.
La vie prend un tournant positif dans le chapitre 2 lorsque Ruth part glaner dans le champ de Boaz. Cet homme “tombe du ciel” comme une pluie divine sur une terre desséchée. La loi exigeait que les propriétaires ne moissonnent pas la périphérie de leurs champs et ne ramassent pas ce qui restait à glaner (Lv 19 et Dt 24). Mais Boaz apparaît comme un homme de Dieu qui obéit à l’esprit de la loi et va bien au-delà de ses exigences:
Boaz s’adresse à Ruth en utilisant un terme affectueux: “ma fille” (v. 8)
Boaz accorde à Ruth sa protection:
a. en lui disant de rester avec ses servantes (v. 8)
b. en défendant à ses serviteurs de la toucher (v. 9)
Boaz propose à Ruth d’aller boire de l’eau que ses serviteurs auront puisée (v. 9)
Boaz invite Ruth à prendre le repas avec ses serviteurs (v. 14)
Boaz donne l’ordre à ses serviteurs de permettre à Ruth de glaner entre les gerbes, et même d’ôter des gerbes quelques épis, pour elle, qu’elle glanera (v. 15-16).
Boaz donne assez à manger à Ruth pour qu’elle puisse apporter les restes de son repas à Naomi (v. 18).
Selon les commentateurs, Ruth rentre chez elle après son premier jour de travail avec, entre 14 et 23 kilos d’orge!
Pourquoi Boaz se soucie-t-il ainsi de Ruth? Certes, il est un homme pieux. Mais est-il possible que, dans cette femme étrangère, il voit une image de sa propre maman? En effet, la mère de Boaz n’est autre que Rahab, la prostituée qui a caché les espions en Josué 2! Le fait d’être le fils d’une femme étrangère a probablement rendu Boaz plus sensible, plus ouvert, plus compréhensif, à la situation difficile de Ruth.
Dans ce passage, Ruth se pose en modèle en tant qu’étrangère. Elle est une travailleuse acharnée et débrouillarde. Loin du stéréotype de l’immigré qui vient en Occident en quête de subventions gouvernementales. D’ailleurs, la plupart des immigrés quittent leur pays à la recherche de travail, d’une vie meilleure pour eux et leurs familles. Ils ne veulent pas d’aumône. Ils veulent vivre à l’abri des difficultés économiques, de l’insécurité et même de la persécution qui les ont amenés ici. J’en suis témoin: mes parents ont immigré de la Colombie aux États-Unis, il y a 50 ans.
Mais, au-delà de sa nature laborieuse, autre chose distingue Ruth: elle s’est forgée une réputation de femme vertueuse. Grâce au sacrifice qu’elle a consenti pour sa belle-mère, elle est devenue le principal sujet de conversation dans la ville, et ce n’est que du positif! Boaz considère que, par ses actions, Ruth a prêté allégeance au Dieu d’Israël.
Boaz s’exclame:
Que l’Éternel te rende ce que tu as fait, et que ta récompense soit entière de la part de l’Éternel, le Dieu d’Israël, sous les ailes duquel tu es venue te réfugier!
Ruth 2.12
Ici, Boaz reflète une des plus belles images du soin divin dans toute l’Écriture. Il représente l’Éternel comme un oiseau mère qui offre ses ailes pour la protection de ses petits sans défense. Et ce qui est merveilleux, c’est que le reste du livre de Ruth dévoile comment Dieu se sert de Boaz: il sera l’aile sous laquelle Ruth trouvera ce refuge.
Le chapitre 3 s’ouvre sur Naomi. Elle apparaît en fin stratège. Elle repère une opportunité pour Ruth et prend sur elle de lui assurer un avenir. La période de deuil de Ruth est maintenant terminée, Naomi l’invite à se changer (probablement pour enlever ses vêtements de deuil) et à aller demander à Boaz de l’épouser. Quelle initiative audacieuse! Boaz accepte, mais il lui faut d’abord régler la question épineuse du premier droit de rachat. Le chapitre 3 laisse le lecteur retenir son souffle. Chacun se demande comment cette affaire va se terminer.
Fidèle à sa parole, Boaz part aux portes de la ville à la rencontre de celui qui possède le droit de rachat. L’homme en question renonce à son droit et l’accord est scellé. Une fois l’affaire conclue, les anciens de la ville, ainsi que les habitants qui se sont rassemblés, débordent de paroles de bénédiction pour Boaz et sa future épouse, Ruth.
La pétition des témoins concernant Ruth est extraordinaire dans la mesure où ils prient pour que l’Éternel accorde à cette femme étrangère une place parmi les matriarches d’Israël, Rachel et Léa (v.12).
Le Seigneur accorde un fils à Ruth. En réponse, ce sont maintenant les femmes de la ville qui s’émerveillent devant la fidélité de Dieu envers Naomi. Et en quels termes décrivent-elles Ruth?
Cet enfant restaurera ton âme, et sera le soutien de ta vieillesse; car ta belle-fille, qui t’aime, l’a enfanté, elle qui vaut mieux pour toi que sept fils.
Ruth 4.15
L’assimilation de Ruth dans sa culture d’accueil est maintenant achevée. Elle n’est plus Ruth la Moabite. Elle est maintenant la plus inestimable richesse de Naomi, plus précieuse pour elle que sept fils. Imaginez la joie, la satisfaction et la paix que Ruth doit ressentir en se sachant acceptée au sein du troupeau de Dieu. Elle est l’une des leurs! Elle n’est plus une étrangère, mais une enfant de l’alliance.
Les versets de conclusion insufflent espoir et joie dans le cœur de chaque croyant. Ruth et ses contemporains n’ont aucune idée de l’ampleur de son intégration dans le peuple de l’alliance. Car elle devient non seulement une femme vertueuse devant tout le peuple de Bethléem, mais aussi l’arrière-grand-mère du plus grand roi qu’Israël n’ait jamais encore connu. Le plus grand, c’est-à-dire, jusqu’à ce que « le Fils de David », le Seigneur Jésus-Christ, ne vienne faire sa demeure parmi nous. Gloire à Dieu!
webinaire
Comment prêcher Christ à partir de l’Ancien Testament?
Ce replay du webinaire Dominique Angers a été enregistré le 20 novembre 2019.
Orateurs
D. Angers