S'il y a une chose dont je suis reconnaissante en tant qu'enfant de Dieu, c'est la rémission des péchés. C'est ce qui caractérise le Dieu de la Bible, par opposition aux dieux du monde gréco-romain à l'époque où le Credo a été écrit. C'est pourquoi j'aime replacer chaque phrase du Credo dans son contexte. Ligon Duncan nous aide à cet égard.
Les anciens païens accusaient les chrétiens d’immoralité en disant que Dieu pouvait pardonner aux meurtriers et aux adultères leur péché. Les païens n’étaient pas d’accord avec cela et ils attaquaient et se moquaient des chrétiens. En ce qui concerne les païens, il fallait soit se racheter pour ses fautes, soit être coupable à jamais. Et les païens ne considéraient pas le pardon comme une vertu. Seuls les faibles d’esprit-les faibles de volonté- pardonnaient. Nous devons réaliser à quel point le message de la Bible sur le pardon des péchés est radical. Il est intéressant de noter que dans le commentaire de Rufin sur le Symbole des Apôtres, écrit au cinquième siècle, les païens attaquaient encore les chrétiens pour cette même raison.
Ainsi, si dans le monde antique, le pardon n’était pas considéré comme vertueux, alors le Dieu de la Bible lui-même n’était pas admiré pour sa miséricorde envers les pécheurs. Il semble presque que les païens de cette époque préféraient leurs dieux inconstants, semblables à des hommes, au Dieu de l’Écriture, qui, selon Psaumes 86.5, est bon, qui pardonne, et qui est plein d’amour pour tous ceux qui l’invoquent.
Au cœur de cette attitude, on peut très bien trouver le fait que si nous nous soumettons à un Dieu qui pardonne, il nous faut pardonner à notre tour. Car « la rémission des péchés » a un aspect à la fois horizontal et vertical. Par vertical, j’entends le pardon de Dieu aux pécheurs. Et par horizontal, j’entends le pardon que nous nous accordons les uns aux autres.
Dans mon enfance catholique, en préparation de ma première communion, on m’a dit que je devais avoir la foi et ne pas douter du pardon des péchés en Christ. Mais je n’ai jamais eu l’assurance d’être sauvée. Puis, plus tard, j’ai exercé un ministère dans un contexte musulman dans lequel aucune observance fidèle des cinq piliers de l’islam ne pouvait garantir à mes amis le pardon des péchés et l’entrée au paradis. On m’a dit que même leur prophète Mahomet n’avait pas l’assurance du salut. Car le jour du jugement dernier, Allah pèserait leurs bonnes et mauvaises actions sur une balance et lui seul déciderait s’ils avaient fait assez de bien pour contrebalancer le mal.
Le pardon des péchés rend le christianisme biblique différent de toute autre religion dans le monde. L’Écriture décrit l’Éternel comme un Dieu qui pardonne (És 55.7; Ps 103.10-14). En fait, à deux reprises dans le livre des Hébreux, nous lisons que Dieu ne se souvient plus de nos péchés (Hé 8.12, 12.17).
Christ lui-même s’est écrié de la croix: « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font. » Il est toujours émouvant de me rappeler que j’ai cloué Jésus là avec mes péchés et mes transgressions. J’ai rendu sa mort nécessaire et, tout en priant pour le pardon de ses assassins au sens le plus littéral du terme, il a également prié pour ceux qui, à travers les couloirs du temps, participeraient à sa mort sous une myriade d’autres formes.
L’histoire de la femme pécheresse qui a oint les pieds de Jésus en Luc 7.36-50 nous aide à comprendre le lien entre la nature verticale et horizontale du pardon. Elle n’avait pas de bonnes œuvres pour le payer. Elle connaissait la profondeur de son péché, elle s’est repentie et a fait confiance au pardon de Christ. Elle nous rappelle que nous n’avons rien à apporter à Jésus en paiement de nos péchés non plus.
Il en va de même pour le voleur sur la croix, à qui Jésus a promis: « Aujourd’hui, tu seras avec moi au paradis. » Il n’avait aucune œuvre à présenter à Dieu pour obtenir le pardon. Dans un sermon prêché en 2019, le pasteur écossais Alistair Begg a imaginé la scène aux portes du Ciel lorsque le voleur arrive: « Pourquoi devrions-nous te laisser entrer? » demanda un ange. « Attends. Laissez-moi vérifier avec mon supérieur! » dit un autre. « Comment es-tu arrivé ici? » lui demandent-ils. « L’homme sur la croix du milieu a dit que je pouvais venir ». Et il en est ainsi pour nous! La seule raison pour laquelle nous avons l’espoir du pardon et de la vie éternelle est à cause de l’homme sur la croix du milieu! Dieu soit loué!
Cette histoire met également en lumière la vérité suivante: si nous aimons parce qu’il nous a aimés le premier (1 Jn 4.19), nous devons aussi pardonner parce qu’il nous a pardonnés le premier. C’est si simple, et pourtant si difficile à mettre en pratique. Pourtant, les Écritures indiquent que nous ne serons pas pardonnés de nos péchés si nous ne pardonnons pas à ceux qui ont péché contre nous (Mt 7.9-15). Tant que nous ne sommes pas en règle les uns avec les autres sur le plan horizontal, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que Dieu accepte nos prières sur le plan vertical.
À un niveau très humain, le pardon est plus pour notre propre bien que pour celui de l’offenseur. Nelson Mandela le savait bien. Emprisonné pendant 27 ans en Afrique du Sud en raison de son opposition au régime raciste de l’apartheid, il a fait cette célèbre déclaration lors de sa libération:
En franchissant la porte vers le portail qui me mènerait à la liberté, je savais que si je ne laissais pas mon amertume et ma haine derrière moi, je serais toujours en prison.
Ainsi, comme pour toutes les exigences de Dieu, son commandement de pardonner n’est pas le fruit de la cruauté ou de la tyrannie, mais plutôt celui d’un cœur paternel plein d’amour. Il ne veut pas que nous soyons prisonniers de l’amertume et de la haine, mais que nous soyons libres d’aimer.
Corrie Ten Boom, ainsi que son père et sa sœur, ont résisté aux nazis aux Pays-Bas pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils ont caché des Juifs dans leur maison jusqu’à ce qu’ils soient trahis, capturés et envoyés dans les camps de concentration. Son père et sa sœur ont péri, mais elle a miraculeusement survécu et a ensuite parcouru le monde avec le message du pardon rendu possible par l’Évangile. Lors d’une de ces réunions, elle a été accueillie après son intervention par l’un de ses anciens gardes S.S. Il avait depuis lors rencontré le Seigneur et voulait la remercier pour son message. Mais tout à coup, alors qu’elle était mise à l’épreuve, elle s’est retrouvée inondée non pas d’amour, mais d’un désir de vengeance. Voici, dans ses propres mots, ce qui s’est passé ensuite:
J’ai fait une prière silencieuse. Jésus, je ne peux pas lui pardonner. Donne-moi ton pardon. Quand j’ai pris sa main, la chose la plus incroyable s’est produite. De mon épaule, le long de mon bras et dans ma main, un courant semblait passer de moi à lui, tandis que dans mon cœur jaillissait un amour pour cet étranger qui m’a presque submergé.
Si ce type de pardon vous semble inaccessible, il l’est aussi pour moi. Mais la bonne nouvelle de l’Évangile n’est pas seulement que je suis pardonnée et libérée, mais aussi que je suis remplie de la vie de Christ pour vivre comme lui. Tout cela a de profondes implications pour la vie chrétienne.
Lorsque nous parvenons à comprendre la profondeur de notre péché et la hauteur de l’amour du Dieu qui nous pardonne, nous trouvons la liberté et la joie dans l’Évangile. Nous n’avons plus à nous soucier d’être assez bons pour mériter l’amour et le pardon de Dieu, car nous n’avons jamais été assez bons. Au contraire, nous pouvons profiter de la grâce et du pardon comme d’un don de Dieu.
Certains peuvent avoir du mal à pardonner à une personne qui les a profondément blessés. Il est important de se rappeler que le pardon est un processus, dans lequel on peut avoir besoin de pardonner à plusieurs reprises à la même personne pour la même offense, parce que la blessure est si profonde et la cicatrice si vive. La bonne nouvelle de l’Évangile est que la puissance de Christ est plus que suffisante pour lui permettre de pardonner l’impardonnable.
Nous devons faire la distinction entre le pardon et la réconciliation. Le pardon ne va que dans un sens. Il est donné librement, tant par Dieu que par la partie offensée. La réconciliation, cependant, est une autre histoire. La Bible ne requiert pas que les croyants se réconcilient avec ceux qui pèchent contre eux, en particulier lorsqu’ils ne donnent aucune indication qu’ils ne continueront pas à faire du mal s’ils en ont l’occasion. Personne n’est obligé d’endurer un abus continu.