La question suivante m'a été posée: Je suis suivi par des psychiatres non chrétiens et cela ne m'apporte vraiment rien du tout. J'hésite à continuer... Leur utilité se résume à me prescrire des médicaments. Je pense que je vais espacer les entretiens (actuellement tous les 15 jours) à une fois toutes les 3 semaines. J'ai rencontré mon pasteur hier et cet entretien était beaucoup plus bénéfique et basé sur la Parole de Dieu. Qu'en pensez-vous?
Cette question est très intéressante, car elle met en opposition l’accompagnement pastoral et le suivi psychiatrique. Je crois que l’enjeu ici est de comprendre la compatibilité et les limites des deux domaines.
Je ne les mettrais pas au même rang que le paracétamol mais, dans l’absolu, ils ont des similarités: apporter du confort et du soulagement. Qu’ils soient anxiolytiques ou anti-dépresseurs, les deux familles les plus prescrites par les médecins, les médicaments permettent de mieux vivre des difficultés particulières avec, notamment, une amélioration du fonctionnement neurologique.
Il est parfois extrêmement difficile, pour une personne en dépression sévère, d’avoir une rationalité qui lui permette de réfléchir lors d’un accompagnement. Simplement, les médicaments ne devraient jamais être le premier réflexe. Dans notre culture qui récuse l’inconfort, la tentation est grande d’annihiler toute forme de souffrance. Cependant, nos émotions négatives sont des panneaux indicateurs. Elles sont le reflet de nos pensées et de nos croyances. Elles sont inconfortables, mais elles nous informent. Pourquoi suis-je triste dans telle ou telle circonstance? ou après la perte de quelque chose d’à priori insignifiant? Pourquoi ma colère est-elle si forte face à cet évènement? Pourquoi suis-je si inquiet à la perspective du lendemain?
Ces questions sont indispensables dans notre cheminement avec Dieu et pour grandir en maturité spirituelle. Il faut cependant avoir les ressources suffisantes pour pouvoir y répondre et être entourés par des personnes de confiance. Parfois ce n’est pas le cas.
Les médicaments peuvent être utiles lorsque les personnes sont incapables de réfléchir sur ces questions. Je recommanderai d’emblée d’orienter ces personnes vers leur médecin traitant et/ou un psychiatre.
Comme j’ai pu l’écrire dans plusieurs articles, il faut être vigilant lorsque nous sommes accompagnés par des personnes qui ne connaissent pas l’Évangile ou qui n’ont pas une vision biblique du monde et de l’être humain (et cela peut malheureusement être le cas de chrétiens également). Par conséquent, les professionnels peuvent vous accompagner jusqu’à un certain point, mais ils ne pourront aller jusqu’à votre cœur.
J’ai régulièrement des questions de personnes qui cherchent à être orientées vers des professionnels. Ma réponse, souvent frustrante, est presque toujours la même: « Malheureusement, je ne connais personne qui saurait vous accompagner. N’êtes-vous pas dans une Église dans laquelle vous pourriez trouver des personnes de valeur pour vous accompagner, comme votre pasteur? »
En France, nous vivons effectivement dans un désert de conseillers chrétiens. Cependant, il y a des pasteurs et des responsables d’Église qui ont la charge de veiller sur le troupeau. Je crois qu’il est urgent de réhabiliter les accompagnements pastoraux. Dieu est le premier concerné par notre fonctionnement psychique et sa Parole devrait être l’outil privilégié pour répondre aux questions de nos contemporains chrétiens, à leur incertitude et leur douleur. Un psychiatre laïc ne comprendra jamais la nature humaine et se contentera de percevoir le malade et ses symptômes sans voir le péché de l’être humain et la grâce de Dieu.
Cependant, la question de la maladie et de la souffrance qui lui est associée a son importance, et le médecin peut avoir toute sa place dans un accompagnement. En fonction du patient, j’exige parfois un suivi médical avant de commencer l’accompagnement pastoral, car j’estime (même si je peux me tromper) que la personne est dans une situation trop critique et que l’on ne peut faire l’économie d’examiner son fonctionnement biologique. Nous ne devrions pas refuser systématiquement une partie de la grâce commune que Dieu nous accorde.
Dieu nous a créés dans un monde matériel avec un corps physique. La corruption du péché est partout, y compris dans nos processus physiologiques. Nous sommes amenés à prendre des antibiotiques ou à nous rendre aux urgences lorsque la situation l’exige. Serait-ce insensé de prendre en considération également le fonctionnement de notre cerveau?
C’est souvent par méconnaissance que nous avons peur de certaines substances. Parfois, c’est seulement à cause de la culture populaire (y compris de nos Églises) que nous refusons certaines choses. Encore une fois, il faut lutter contre le « systématiquement », mais ne pas verser dans le « jamais ».
Reste alors à éprouver ces soulagements psychiques au regard des Écritures mais aussi à confronter certaines méthodes à la Parole de Dieu et à notre éthique chrétienne.
C’est mon leitmotiv. L’Église devrait être constituée de personnes ressources qui nous permettent de vivre nos questionnements et nos épreuves avec intégrité et courage. Nos frères et sœurs, et ceux qui ont été appelés à un ministère particulier, devraient être nos bouées de secours pour nous édifier, nous supporter et nous reprendre.
Nous vous en prions aussi, frères, avertissez ceux qui vivent dans le désordre, consolez ceux qui sont abattus, supportez les faibles, usez de patience envers tous. Prenez garde que personne ne rende à autrui le mal pour le mal; mais poursuivez toujours le bien, soit entre vous, soit envers tous. Soyez toujours joyeux. Priez sans cesse. Rendez grâces en toutes choses, car c’est à votre égard la volonté de Dieu en Jésus-Christ. N’éteignez pas l’Esprit. Ne méprisez pas les prophéties. Mais examinez toutes choses; retenez ce qui est bon; abstenez-vous de toute espèce de mal. (1Th 5.14-22)
Nous sommes un peuple qui devrait prendre soin de lui-même. C’est un appel à nos responsabilités. Nous avons intégré un peuple par pure grâce de Dieu. Comment nous sentons-nous impliqués dans notre service à l’égard des autres? Ce qui est extraordinaire et touchant dans l’épître mentionnée de Paul, c’est qu’elle s’adresse à tous les chrétiens sans exception. Nous sommes tous concernés. Est-ce que vous vous sentez concernés?
Je crois que l’accompagnement médical et l’accompagnement pastoral sont deux choses distinctes qui interviennent dans des champs séparés. Ils se rejoignent parfois dans des situations particulières, notamment dans le domaine des maladies mentales.
La question de la douleur et de la souffrance doit être évoquée clairement avec les personnes. Elle ne doit pas être niée, car elle existe; il convient de la traiter selon la Parole. Il est important d’être sage, de ne pas être hâtif, sans pour autant éluder des préoccupations qui peuvent prendre beaucoup d’importance. Je crois que l’Église et ses serviteurs devraient être les acteurs privilégiés de l’accompagnement des frères et sœurs.
PS: Peut-être qu’en tant que responsable d’Église, vous vous sentez démunis face à des situations qui semblent parfois insolubles ou trop complexes. Il existe des formations pour équiper les Églises. N’hésitez pas à me solliciter si vous souhaitez plus d’informations à ce sujet.
Vous pouvez retrouver ma présentation ici et mes motivations, en tant que psychologue chrétien, pour travailler avec TPSG.
Vous pouvez lire dans cet article, écrit par mon épouse, des questions de réflexion sur l’intérêt de consulter un conseiller chrétien.
Enfin, j’ai évoqué ici les différentes raisons qui devraient pousser un psychologue chrétien à faire des études de théologie.
webinaire
Si Dieu est bon, pourquoi autant de mal?
Découvre le replay de ce webinaire de Guillaume Bignon, enregistré le 11 décembre 2018, qui traite de la souveraineté et la bienveillance de Dieu.
Orateurs
G. Bignon