Pourquoi "Jésus pleura"?

HerméneutiqueProvidenceVie et le ministère de Christ

Cette semaine, je prêche Jean 11. Lors de mon étude préalable du texte, j'ai été confronté à cette interrogation: "Pourquoi Jésus pleura?" J'ai été surpris de voir à quel point le chapitre permet d'y répondre simplement.

Je me suis aussi rendu compte qu’on dit souvent des choses pas très justes à propos de cet épisode de l’Évangile selon Jean. Peut-être as-tu, toi aussi, déjà entendu dire:

« Jean 11.35 est le verset le plus court de la Bible »

Désolé de décevoir, mais cette première idée est fausse. Tout simplement parce qu’il n’y a pas de versets dans la Bible. Enfin, je veux dire que le découpage en chapitres et versets qui nous est familier est très utile, et surtout pratique, mais qu’il a été décidé par les hommes (il est apparu entre le 2ᵉ et le 5ᵉ siècle av. J-C pour l’Ancien Testament et entre le 13ᵉ et le 16ᵉ siècle pour le Nouveau). Il n’est pas inspiré comme l’est le texte, et on ne peut donc tirer aucune signification particulière de cette remarque qu’on utilise pour y accorder de l’importance.

« C’est l’amour qui fait pleurer Jésus »

À décharge de cette nouvelle fausse conclusion, il faut d’abord souligner le fait que le début du chapitre dit bien par 2 fois que Jésus aimait Lazare (Jn 11.3 et Jn 11.5), mais ce verset 5 est une introduction au suivant qui explique que Jésus reste justement 2 jours supplémentaires sur place à l’annonce de la maladie de son ami (Jn 11.6).

De plus, j’ai bien peur que défendre l’idée de Jésus qui pleure par amour, c’est se ranger à l’avis des « adversaires » du Seigneur qui tirent la même conclusion en Jean 11.36 pour, me semble-t-il, montrer leur dédain: il n’y a qu’à voir leur 2ᵉ conclusion (Jn 11.37).

Dire que Jésus pleurait la perte d’un être cher, comme s’il était impuissant, ce serait adopter une théologie « kénotiste » (Jésus se « vide » de sa divinité pour devenir homme) en oubliant que Jésus est pleinement Dieu et qu’il sait tout, même que Lazare est mort (Jn 11.11 et Jn 11.14) et qu’il ressuscitera. Ce serait aussi creuser un fossé avec l’enseignement des apôtres à propos de la mort.

« Ce sont les conséquences du péché qui font pleurer Jésus »

C’est ce que j’ai longtemps cru, je l’avoue. Jusqu’à ce que je découvre que c’est peu probable, voire pas tout.

Premièrement à cause d’un motif clair du chapitre: l’incrédulité. Avant que Jésus ne pleure et ne soit « troublé » et « frémissant », les disciples eux-mêmes, mais aussi les Juifs venus de Jérusalem, Marthe et Marie, montrent tous des difficultés à comprendre le message de Jésus « Moi, je suis la résurrection et la vie » et la gloire attachée à cet événement qui est sur le point de se produire.

Jésus annonce par 3 fois le but de son action (Jn 11.4; Jn 11.15 et Jn 11.47). Il veut glorifier le Père et que tous croient. Mais aucun n’est dans cette optique. C’est l’encéphalogramme (spirituel) plat.

Deuxièmement, et pour montrer que ce contexte nous a mis sur la bonne voie, à cause de la signification de ’embrimaomai’ un mot grec qui semble être très difficile à traduire et rendu dans ma Colombe par « il frémit en son esprit et fut troublé » (Jn 11.33) et « frémissant de nouveau » (Jn 11.38).

Tu pourras facilement observer ce mot dans d’autres contextes (Mt 9.30; Mc 1.43; Mc 14.5) qui collent plutôt à une signification proposée par D.A. Carson: « colère, irritation, indignation ». Jésus est irrité et indigné par le manque de foi des personnes qui l’entourent.

En réalité donc,

C’est ton incrédulité qui fait pleurer Jésus

C’est à la vue des pleurs de Marie et de sa suite funeste (Jn 11.33) que Jésus commence par être indigné. Puis à nouveau en entendant les mauvaises conclusions de ces Juifs venus de Jérusalem (Jn 11.36,37). On pourrait transposer et dire que c’est ce genre d’idées qu’on a entendu et qu’on vient d’évoquer qui mettent le Seigneur dans une sainte « colère ». C’est à la vue de l’incrédulité et de ses conséquences que Jésus pleure, s’irrite et finit par donner l’ordre, d’une voix forte, au corps en putréfaction de Lazare: « Lazare, sors! »

C’est ainsi que j’ai choisi de présenter la signification de ce verset.

Les mots de D.A. Carson sont sévères, mais nécessaires pour glorifier notre Seigneur:

Il est inexcusable de réduire ce bouleversement émotionnel à de l’empathie, du chagrin, de la peine ou autres sentiments semblables.

Cet événement nous montre la juste manière de vivre du Seigneur Jésus qui nous est offerte, à nous chrétiens, et nous enseigne à changer de comportement. Je n’arriverai certainement pas à produire une meilleure exhortation que celle lancée par le même auteur:

Le chagrin et la compassion sans indignation se réduisent à du pur sentimentalisme, et l’indignation dénuée de chagrin se durcit en arrogance pharisienne et en irascibilité.

Que Dieu bénisse sa riche Parole et les moments passés à observer le Seigneur Jésus.

Franck Godin

Disciple de Jésus, Franck le sert à l’Église Protestante Les Deux Rives, à Toulouse. Il est marié à Flavie, ils ont 5 enfants.

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