Ce n'est pas une surprise de dire que l'enseignement de l'évangile de la prospérité tourne autour de la bénédiction de Dieu. Si l'on veut analyser ce mouvement, il est donc clé de se demander si leur vision de la bénédiction de Dieu est biblique ou non. C'est ce que l'on fait dans cet article.
Selon l’évangile de la prospérité, la bénédiction de Dieu pour le croyant se traduit de manière physique et matérielle, aujourd’hui ici-bas. Il s’agit de la richesse matérielle, oui, mais aussi d’autres bénédictions physiques: la guérison, le succès, la résolution de soucis relationnels, et bien d’autres choses.
Comment analyser cela à la lumière de l’Écriture? Faudrait-il mettre de côté toute bénédiction matérielle? Voici quatre choses que j’aimerais mettre en avant pour nous aider à y réfléchir.
Je ne crois pas que la Bible présente la richesse matérielle comme mauvaise en elle-même. Comme on le dit souvent, c’est l’amour de l’argent qui est à la racine de tous les maux, pas l’argent lui-même (cf. 1Tm 6.10). De plus, lorsque Paul donne des recommandations « aux riches de ce monde » (1Tm 6.17-19), il ne leur demande pas de se dépouiller de leurs biens, mais plutôt de mettre leur confiance en Dieu et d’être généreux.
Cela permet de dire que ce n’est pas la richesse matérielle le problème. Ni la guérison, le succès, ou la résolution de nos soucis. Ces choses sont de bonnes choses, désirables, et qui sont des dons de Dieu. Le problème, c’est de dire que Dieu aurait promis de donner ces choses systématiquement et immédiatement à chaque croyant. La différence est énorme, et c’est là que l’on trace la ligne entre un enseignement qui est un biblique, et un enseignement qui ne l’est pas. Pourquoi? Creusons un peu plus.
Oui, la Bible parle de bénédiction matérielle, physique. C’était le cas pour le peuple d’Israël sous l’ancienne alliance. Mais c’est aussi le cas pour nous qui avons cru en Jésus. La Bible parle en effet d’un monde nouveau, où les croyants vivront sous la bénédiction de Dieu pour toujours. Cette bénédiction se manifestera de manière physique, matérielle: un monde sans maladie, sans mort, sans pleurs (car il n’y aura plus rien à pleurer!), sans conflits relationnels, ni rien de ce genre (cf. És 65.17-25; Ap 21-22). Il s’agira d’un monde où nous pourrons profiter de tous les dons de Dieu, sans la goutte amère du péché qui imprègne tout ce que nous connaissons ici-bas.
Cependant, il faut réaliser quand cette bénédiction aura lieu. Ce n’est pas pour maintenant. C’est pour après: dans la gloire, lorsque Jésus reviendra. Il est donc faux de dire, comme l’évangile de prospérité le fait, que nous devons vivre notre meilleure vie maintenant, ici-bas1. Si nous pensons vivre notre meilleure vie ici-bas, c’est soit que nous n’avons aucune conscience de ce qui nous attend au ciel, soit que nous sommes en train de marcher tout droit vers l’enfer2. Ni les hôtels les plus luxueux, ni les villas les plus somptueuses, ni rien d’autre au monde, ne pourrait arriver à la cheville de ce que nous connaîtrons dans l’éternité: un monde sans péché, où nous serons dans la présence de Dieu lui-même pour toujours. J’ai hâte!
N’y a-t-il donc aucune bénédiction qui concerne le croyant en Jésus dans cette vie ici-bas? Oh que si! Il y en a, et pas qu’une seule. Dans Éphésiens 1.3, Paul s’exclame ainsi:
Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ!
Éphésiens 1.3
Nous avons été bénis! En Jésus, nous avons été comblés par Dieu de toutes bénédictions spirituelles. Quelles sont ces bénédictions? Paul va les détailler dans la suite du passage (Ép 1.4-14), en montrant que nous avons été: choisis, adoptés, délivrés, éclairés, acquis, et unis à Christ. (Je reprends ici la formulation de Dominique Angers dans son podcast, et je vous invite à l’écouter pour creuser ces bénédictions!)
Quel privilège, n’est-ce pas? Ces bénédictions sont ce qu’il y a de plus important, parce que c’est ce dont on a le plus besoin. Nous étions ennemis de Dieu, destinés à la perdition, comme des brebis égarées… et grâce à Christ, nous sommes maintenant bénis, en étant réconciliés avec Dieu, adoptés dans sa famille, et pardonnés de tous nos péchés.
Ce n’est pas parce que ces bénédictions sont spirituelles qu’elles sont moins vraies. Effectivement, on ne peut pas voir ces réalités. On ne va pas dans un musée pour admirer le pardon des péchés! Et pourtant, pour les yeux de la foi, c’est tout aussi vrai, tout aussi réel que si j’avais le plus beau des tableaux sous les yeux.
Voilà les bénédictions qui nous concernent maintenant, et sur lesquelles nous devons mettre l’accent. En fait, en mettant l’accent sur autre chose, nous sommes en train d’obscurcir ces réalités, et de priver les croyants de leurs vrais privilèges. À quoi cela sert de gagner toutes les richesses matérielles du monde, s’il me manque le plus grand bien, celui du salut? À quoi cela sert de poursuivre la guérison physique, si je suis toujours atteint par la maladie du péché? À quoi cela sert de résoudre tous mes problèmes relationnels, si je reste toujours ennemi de Dieu?
C’est pour cela que l’évangile de la prospérité n’est pas simplement un enseignement qui se trompe un peu sur certains points, mais un faux évangile: en cachant la vérité, il prive ses adeptes de la vraie bénédiction en Christ.
Cette bénédiction de Dieu pour le croyant est obtenue par la grâce, et non par l’obéissance ou les efforts. La lettre aux Éphésiens est claire là-dessus. Qu’avons-nous fait pour mériter ces bénédictions? Rien! Qu’aurions-nous pu faire pour les mériter?! Rien non plus! Si Dieu a fait tout cela, c’est « pour que nous célébrions la gloire de sa grâce, dont il nous a comblés dans le bien-aimé » (Ép 1.6). C’est « conformément à la richesse de sa grâce » (Ép 1.7) et pas en raison de nos propres efforts.
Cela contraste totalement avec l’enseignement de l’évangile de la prospérité. La lecture du témoignage de Costi Hinn, le neveu de Benny Hinn, m’a aidé à le réaliser3. Il raconte dans ce livre comment il a quitté le milieu de la prospérité pour venir au vrai Évangile. En décrivant le milieu qu’il a quitté, il montre à quel point il est clair que l’obéissance est la condition nécessaire pour recevoir la bénédiction de Dieu. « Si tu n’as pas le succès, la guérison ou la richesse, c’est que tu manques de foi, c’est que tu as laissé un péché entrer dans ta vie, c’est que tu as mal parlé d’un "oint" de Dieu. » Cette logique-là n’est pas la logique biblique. Dieu ne nous donne pas le salut en fonction de ce que nous faisons ou de ce que nous ne faisons pas. Sinon personne ne serait sauvé! Dieu donne sa bénédiction par pure grâce à des pécheurs qui ne le méritent pas. C’est vous, et c’est moi. Quel privilège.
Rendez-vous jeudi prochain sur mon blog pour un nouvel article (abonnez-vous par mail ci-dessous). En attendant, voici quelques ressources sur le sujet:
1. C’est le titre du best-seller de Joel Osteen, Your Best Life Now.
2. Je paraphrase ici une punchline du rappeur américain Shai Linne dans son titre False Teacher. Bien sûr, je ne veux pas dire par là que notre vie ici-bas doit forcément être terrible et douloureuse. C’est simplement que, si belle que soit notre vie ici-bas, elle perd son éclat en comparaison avec l’éternité qui nous attend.
3. Costi Hinn, Les coulisses de l’évangile de la prospérité.