Être grand-père, une vocation

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Octobre a été "le mois des petits-enfants" pour ma femme et moi. Au début du mois, deux nouveaux garçons sont nés dans la famille Leithart, chacun d’eux étant le premier fils de l’un de mes fils. Nous avons maintenant quinze petits-enfants. Si vous comptez les points, les garçons ont pris l’avantage avec un score de huit pour les petits-fils à sept pour les petites-filles. Je tiens à ajouter qu'il ne s'agit pas d'une compétition (pas encore). À la fin du mois, nous avons rendu visite à notre fils aîné, père de deux garçons adolescents, les plus âgés de nos petits-enfants. Nouveau-nés et adolescents nous rappellent le bon vieux temps. Ils sont aussi notre avenir.

Seulement la moitié de mes enfants est mariée, je m'attends donc à avoir plus de petits-enfants, avec un écart d'âge croissant, incluant des adolescents, des préadolescents et des tout-petits pendant un long moment. Nous sommes habitués à l'écart d'âge, et cela crée des choses étranges dans l'arbre généalogique de la famille. Plus de vingt ans séparent notre aîné de notre plus jeune; mon aîné étudiait déjà à l'université lorsque sa plus jeune sœur est née. Bien qu'ils fassent partie de la même famille, ils n'ont jamais vécu ensemble sous le même toit. Cependant, cette différence d’âge a créé d’autres liens dans la famille. Ma dernière fille est plus proche en âge de son neveu ainé que de ses frères et sœurs. Il est probable que certains de mes arrière-petits-enfants auront à peu près le même âge que certains de mes petits-enfants. Les arrière-petits-enfants et les petits-enfants grandiront ensemble, comme des cousins, créant des liens entre les générations.

Le "lien" est un indice de ce que je considère être ma vocation de grand-père. Nous connaissons tous cette blague: “Les grands-parents se vengent de leurs enfants en gâtant les petits-enfants, puis en rendant les petits monstres à leurs parents en les laissant gérer les conséquences.” Je n’accepte pas cette idée, pas seulement parce que je n’aime pas les enfants gâtés, mais surtout parce que je pense que notre rôle est précisément le contraire. Nous aimons, prenons soin de nos petits-enfants, et leur apprenons à honorer leurs parents, afin qu’ils grandissent en portant l’héritage de la foi chrétienne, et qu'ils soient prêts à faire de même pour leurs enfants et petits-enfants. Nous ne pourrons pas toucher mille générations (Ex 20.6), mais nous pouvons toucher la troisième et, si le Seigneur le veut, peut-être même la quatrième.

Notre influence va bien plus loin. En laissant une empreinte sur nos petits-enfants, nous créerons un lien avec des générations que nous ne verrons jamais. Je veux que mes petits-enfants parlent à leur tour de ma femme et moi à leurs petits-enfants, tout comme je leur parle de mes grands-parents. Être grand-parent, c'est construire un pont d'espoir entre le passé et l'avenir.

Comme nous vivons loin de la plupart de nos petits-enfants, notre influence sur eux s’exerce surtout au travers des relations que nous entretenons avec nos enfants. Ma femme et moi avons préparé nos enfants pour le jour où ils allaient quitter la maison. Mais je n’ai pas cessé d’être père, lorsqu’ils ont fermé la porte en partant. Être père de fils et de filles adultes est, bien sûr, radicalement différent d'être père de jeunes enfants. Ma famille n'est pas un clan, avec moi à sa tête comme patriarche. Chaque mariage crée une nouvelle famille. Un fils et une fille quittent leur foyer pour s'attacher l'un à l'autre et devenir une seule chair. Mes enfants adultes prennent leurs propres décisions, se forgent leurs propres opinions, tracent leur propre trajectoire dans la vie. Ils sont en quelque sorte devenus mes pairs, des frères et sœurs plus jeunes (parfois beaucoup plus jeunes). Il ne s'agit pas d'une diminution de la paternité, mais d'une forme de maturité. Dans la famille trinitaire ultime, le Père et le Fils sont distincts, mais pleinement égaux en puissance et en gloire. Ainsi, être père d’adultes témoigne d’une paternité mature, car elle reflète davantage l'archétype de la paternité de notre Père céleste.

Au cours des dernières décennies de sa longue vie, mon père a été mon plus grand soutien, m'encourageant à chaque étape. Je veux l’être aussi pour mes enfants. J’ai été à leur place. J'ai moi aussi choisi une carrière, une femme, et un chemin de vie. Ma femme et moi avons dû faire face à des difficultés financières et à des décisions qui ont changé notre vie. Nous avons été parents de nourrissons, de jeunes enfants, et d'adolescents –parfois tous en même temps– et j'espère que nous avons appris une ou deux leçons en cours de route. Mes enfants se lancent dans leur carrière et la poursuivent, ils trouvent et aiment leur conjoint, élèvent des enfants pour la première fois: je veux être présent pour eux lorsqu'ils auront besoin ou demanderont de l'aide.

En tant que grands-parents, notre rôle n'est pas de gâter nos petits-enfants, mais d'aider nos enfants à ne pas gâter les leurs.

Les grands-parents sont un lien unique entre les générations. Nous encourageons nos enfants à rester fidèles jusqu’à l'âge adulte, tout comme nous encourageons nos petits-enfants à honorer leurs parents. Les grands-parents sont des agents que le Saint-Esprit utilise pour accomplir les paroles du dernier verset de l'Ancien Testament, qui promettait qu’un nouvel Élie ramènerait le cœur des pères vers leurs enfants et le cœur des enfants vers leurs pères (Ml 3.24).

Article traduit de l’anglais, avec autorisation.


Pour aller plus loin

Peter J. Leithart

Peter J. Leithart (PhD, Université de Cambridge) est président de l’Institut Theopolis de Birmingham en Alabama et professeur à la Trinity Presbyterian Church. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont plusieurs commentaires bibliques. Lui et sa femme, Noel, ont dix enfants et quinze petits-enfants.

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webinaire

SOS Parentalité: Comment éduquer à la lumière de l'éternité?

Ce replay du webinaire de Samuel Laurent a été enregistré le 16 juin 2020.

Orateurs

S. Laurent