L’amour est probablement la qualité que les chrétiens reconnaissent le plus naturellement et le plus fréquemment en Dieu. Ils chantent l’amour de Dieu, en parlent entre eux et cherchent à en faire profiter leurs amis non chrétiens en leur suggérant, parfois à leur étonnement, que Dieu les aime. Pourtant, si l’amour de Dieu est un thème souvent abordé, il faut bien reconnaître que l’Écriture ne le présente pas de manière si simple.
L’amour de Dieu est riche, voire complexe. Le théologien Donald Carson parle même de « la doctrine difficile de l’amour de Dieu ». L’objet de ce billet n’est pas de traiter de l’amour de Dieu dans toute sa richesse, ni même d’en tracer les contours ou d’en survoler les aspects principaux. Je souhaite simplement faire observer que même une épître discrète comme celle de Jude présente diversement et richement notre expérience de cet amour dont nous avons tant besoin.
La lettre de Jude s’ouvre ainsi:
Jude, serviteur de Jésus-Christ et frère de Jacques, salue ceux que Dieu a appelés à lui, qui sont aimés de Dieu le Père et gardés pour Jésus-Christ. – Jd 1
Dans sa salutation, Jude situe notre expérience de l’amour de Dieu aux côtés de deux autres réalités qui décrivent l’ensemble des chrétiens: ils sont « appelés » (à Dieu) et « gardés pour Jésus-Christ ».
Voilà notre condition. Nous sommes tout simplement « aimés de Dieu le Père ». Il y a déjà de quoi méditer longuement.
Avant de poursuivre, j’ouvre, sans m’étendre, une double parenthèse un peu technique.
Au verset suivant, Jude évoque de nouveau l’amour de Dieu:
Que la compassion, la paix et l’amour de Dieu vous soient pleinement accordés! – Jd 2
La Bible du Semeur ajoute ici au texte grec la précision « de Dieu », sous-entendue par la formulation qui se rencontre dans l’original. La traduction plus littérale de la NBS formule ainsi: « Que la compassion, la paix et l’amour vous soient multipliés! » On pourrait aussi dire les choses ainsi: « Que la compassion, la paix et l’amour de Dieu vous soient accordés en abondance! » Chaque fois, la même idée est exprimée.
Que pouvons-nous tirer de tout cela? Si nous sommes effectivement « aimés de Dieu le Père » (verset 1), cela ne nous empêche pas de rechercher activement la bénédiction qui consiste à recevoir cet amour divin dans une mesure toujours croissante. Voilà un domaine où les excès sont permis: nous n’aurons jamais trop de l’amour de Dieu. Plongeons-nous quotidiennement dans cet amour, accueillons-le, demandons-le dans la prière, bénissons-nous les uns les autres en nous souhaitant qu’il soit abondant et débordant.
Vers la fin de l’épître figure l’injonction suivante:
Maintenez-vous dans l’amour de Dieu en attendant que notre Seigneur Jésus-Christ, dans sa compassion, vous accorde la vie éternelle. – Jd 21
Une telle exhortation va clairement à l’encontre de certains clichés réducteurs sur l’amour de Dieu. Selon ces idées reçues, absolument rien ne peut faire varier la manifestation de l’amour de Dieu dans la vie du chrétien. « Tu ne peux rien faire pour que Dieu t’aime davantage, et tu ne peux rien faire qui puisse diminuer son amour dans ta vie. » Je comprends l’intention d’une telle affirmation (nous sommes bien justifiés une fois pour toutes); pourtant, selon Jude, il est possible de se « maintenir » (ou pas) dans l’amour de Dieu. Dans toute tentative de synthèse de l’enseignement biblique sur l’amour de Dieu, il nous faut absolument « entendre » tous les versets concernés.
Cette troisième mention de l’amour de Dieu dans cette épître se distingue des deux premières. Après le registre de la description (Jd 1) et celui de la bénédiction (Jd 2), nous passons en mode appel à la responsabilité. Si l’amour de Dieu a été manifesté envers nous (verset 1) et si nous pouvons en attendre de fraîches expressions (verset 2), il n’en demeure pas moins que notre réponse à l’offre de cet amour reste déterminante.
À la lumière de la missive de Jude, il s’agit notamment de rejeter les faux enseignements (Jd 17-19) et de bâtir sa vie sur le fondement de notre foi très sainte (Jd 20). En outre, le verset qui nous intéresse ici (Jd 21) situe notre responsabilité dans le cadre de notre espérance: nous faisons aujourd’hui le choix de l’amour de Dieu, car cela nous positionne sur une trajectoire dont l’aboutissement est l’expérience ultime de cet amour, la vie éternelle, que notre Seigneur Jésus-Christ nous accordera dans sa compassion.
En conclusion, quelle expérience de l’amour de Dieu pour nous chrétiens?
Dieu nous a aimés; il nous aime encore; il nous aimera à jamais.
N.B. J’avais publié cet article une première fois le 21 juin 2016. Je l’ai republié pour de nouveaux lecteurs le 26 octobre 2021.
webinaire
La Bible est-elle sans erreur?
Ce replay du webinaire de Florent Varak a été enregistré le 11 juin 2019.
Orateurs
F. Varak