Dans ce deuxième épisode de Memento Mori, Raph et Matt parlent de Black Mirror, une série qui cartonne sur Netflix.
Thématique
Dans cet épisode, Raph et Matt répondent aux questions suivantes:
- C’est quoi cette série?
- Quels sont les deux épisodes qui t’ont le plus plu?
- Quelles sont les thématiques qui te parlent le plus?
- Quelle sagesse cela doit nous pousser à avoir?
Synthèse MM #2
Ce travail de synthèse est fait par un auditeur attentionné. Il ne retranscrit pas les propos exacts de l’épisode, mais vise à présenter le contenu.
Introduction
Black Mirror est une série télévisée britannique qui a d’abord été diffusée sur Channel 4 de 2011 à 2014 et qui a eu un succès international. En 2016, la saison 3 a été produite par la plateforme de séries et films Netflix.
C’est quoi cette série?
Le concept de la série est que chaque épisode est indépendant. Chaque épisode est un peu un court-métrage qui raconte une histoire. Et à chaque fois il y a un parti-pris différent mais toujours traversé par la même question: la manière dont la technologie change notre manière de vivre. Cette question est souvent amenée avec un aspect dystopique. La technologie est vue comme quelque chose qui nous amène vers le bas, qui nous pousse au malheur et qui nous empêche de bien vivre. C’est finalement une anticipation très pessimiste. Dans le nom « black mirror », la notion de miroir nous fait réfléchir. La série prend une nouvelle technologie ou la manière dont on utilise les réseaux sociaux, et le tire à son paroxysme pour montrer ce que cela peut donner. Mais il ne s’agit pas d’une caricature. Dans la plupart des épisodes, il y a un environnement qui parle d’un monde assez proche du nôtre et ils exagèrent légèrement un trait. C’est assez similaire pour que l’on puisse faire le lien avec notre monde, et c’est assez exagéré pour forcer le trait de la technologie et de ce qu’elle nous empêche de faire. C’est donc souvent assez fin et il y a très peu d’épisodes d’anticipation pure où la société ne ressemble presque plus à notre monde.
Certains épisodes traitent des réseaux sociaux, d’autres du transhumanisme, de la place des médias… A chaque fois le fait que ce soit un trait isolé qui est développé permet d’isoler un fait de notre société et de réfléchir dessus.
La façon dont les épisodes sont tournés est presque ironique, sarcastique. Il n’y a pas de côté moralisateur. Ils ne réfléchissent pas dans l’absolu mais sur la manière dont la technologie influe notre comportement. Ils s’imaginent alors un monde où la technologie a changé d’usage. Il s’agit alors presque d’un regard sociologique dans le futur. A chaque fois, on se demande à quel épisode correspondrait notre vrai futur car les scénarios sont très probables.
Certains épisodes peuvent être assez trash, notamment l’épisode pilote. Si l’on veut commencer la série, on peut se passer de la saison 1.
Quels sont les 2 épisodes qui t’ont le plus plu?
Le premier épisode de la saison 3 est très bien fait. Il s’agit d’un monde dans lequel les réseaux sociaux sont intimement liés à ton identité et ta place dans la société. Chaque personne a une note sur 5 qui lui permet ou non de faire des choses. Par exemple pour louer une maison, il faut avoir une certaine note. Dans cette société, tout le monde est en train constamment de se donner des notes. Le premier sujet de discussion lorsque les gens se rencontrent est leur note. Dans ce cadre, l’épisode raconte l’histoire d’une femme qui va dégringoler socialement. C’est un peu exagéré comme scénario mais tellement vrai. La réalité humaine derrière tout cela n’est pas une caricature. Il s’agit de cette quête effrénée de la popularité, l’obsession de savoir ce que les autres pensent de nous, de se donner la meilleure image de soi, de rechercher l’approbation et sa valeur chez les autres. Il s’agit d’une valeur à la fois subjective mais aussi objective car chacun possède une note réelle à l’échelle de la société. Cela pose des questions assez fines sur ce que recherche le cœur humain mais aussi en quoi on place notre valeur.
Certaines personnes font la séparation entre la vie sur les réseaux sociaux et la vie réelle mais chaque personne derrière chaque écran est une vraie personne. On n’échappe finalement jamais à la réalité et le monde virtuel rejoint de plus en plus la « vraie vie ». On n’est pas moins dans la vie réelle quand on est face à un écran. Cela nous place en tant que chrétiens face à nos responsabilités. Lorsque l’on voit ce que certains commentent, on se dit qu’ils ne diraient jamais cela en face. Ils ne se rendent pas compte de ce qu’ils disent et ce qu’il se passe en ligne blesse réellement la personne dans la vraie vie.
On le voit dans l’épisode où une personne est notée défavorablement et cela l’affecte dans sa vie quotidienne. Elle ne peut plus acheter de café, ou aller en soirée. Il y a ce rapport entre nos usages des réseaux sociaux et notre vie de tous les jours. Il y a aussi les 2 femmes qui ont cette amitié très superficielle de laquelle elles veulent tirer leur réputation. Cela fait ressortir l’illusion de la maîtrise de notre image, notamment dans les selfies « parfaits » ou les photos parfaitement réalisées. C’est ce souci de vouloir maîtriser notre image comme si on la possédait. C’est quelque chose qui peut être extrêmement angoissant car la désapprobation vient très vite et on doit toujours se montrer tel que l’on n’est pas. Mais en tant que chrétiens, on sait que Dieu nous voit tout le temps tel que l’on est et il nous aime.
Cet état d’esprit a commencé avec Myspace en 2004 où déjà à cette époque on devait créer un profil et on se posait la question de ce qu’on allait mettre. Le film, la musique que l’on aime, les photos, on se pose la question: « Qu’est-ce qui va définir le mieux qui je suis? » Sauf que rien ne va montrer le fait que l’on crie sur les chauffards sur l’autoroute par exemple. Ce qui fait la beauté et la complexité des êtres humains est complètement gommé par ce que l’on veut projeter.
Dieu est le seul qui connaisse vraiment nos motivations, le seul qui connaisse vraiment qui on est, et qui peut combler notre attente d’approbation et nous faire grâce en dépit de ce que l’on est vraiment.
L’épisode 4 de la saison 2 est également très intéressant. Il décrit une société où l’on a créé des implants que les parents peuvent mettre dans le cerveau de leurs enfants, et sur sa tablette, on peut voir ce que voit son enfant. L’épisode commence quand une mère croit avoir perdu son enfant. L’angoisse de voir son enfant disparaître la pousse à mettre cette puce dans la tête de son enfant. Mais cela va plus loin: il y a une mesure de contrôle dans la puce qui permet de flouter ce que l’enfant voit. Tout ce qui est violent et inapproprié peut être brouillé. Lorsque cette fille grandit, il y a la question de la liberté qui est mise en jeu. Tout ce qu’elle expérimente est vu par sa mère et elle se rend compte au bout d’un moment qu’elle ne connaît pas le monde comme elle devrait le connaitre. Pour un parent, c’est quelque chose qui peut parfaitement convenir. Si cela existait pour de vrai, de nombreux parents voudraient essayer. Il y a ce désir de contrôle pour « protéger » son enfant, une maîtrise des choses. Ce qui est extraordinaire c’est que Dieu lui ne veut pas nous contrôler comme des machines, mais créer le changement qui fait que l’on ne voudra pas faire des choses mauvaises. Il va changer notre regard sur la manière dont on exerce notre liberté. En tant que parents, notre responsabilité n’est pas de couper nos enfants du monde mais de les préparer à vivre dans ce monde et à prier pour que Dieu change leurs cœurs.
Cet épisode pose la question de ce que l’on ferait si la possibilité nous était présentée. La temporalité et la géographie étaient appréhendées différemment avant les téléphones et les GPS. Quand l’enfant était dehors, que ce soit à 1 km de la maison ou à 20 km, c’était la même chose. Ce n’est plus le cas maintenant car on peut avoir une idée très précise des distances grâce à la géolocalisation. Le point tournant de l’épisode se trouve lorsque la mère assiste à des choses qu’elle ne peut pas contrôler. Elle se rend compte que même si elle peut contrôler des choses, elle ne peut pas TOUT contrôler. On peut censurer certaines choses mais on ne peut pas changer les aspirations du cœur. On pourrait en faire une critique de la religion qui met beaucoup les pratiques en avant. Ce qu’il faut réformer, ce ne sont pas les pratiques mais le cœur. En changeant nos pratiques on ne va pas changer nos cœurs, mais c’est en changeant nos cœurs que l’on va changer nos pratiques.
Cela pose la question de notre éducation envers nos enfants. Il est très facile de tomber dans la tentation de l’endoctrinement, de tellement laver le cerveau de nos enfants qu’ils ne pensent plus par eux-mêmes, mais leur cœur reste inchangé. Il ne s’agit donc pas de les contrôler mais de les préparer. Et celui qui peut contrôler ce que l’on ne peut pas contrôler, c’est Dieu. Le plus dur c’est de nous rendre compte qu’au final on ne contrôle rien. Que l’on soit à 1 km, à 10 km ou à 20 km de chez soi, il arrive ce que Dieu veut.
Un autre aspect est que le mal est à l’extérieur. Mais notre problème c’est que c’est le mal qui est en nous qui a une mauvaise influence sur nous. Si l’on veut vraiment se couper du mal, il faudrait s’arracher le cœur.
Merci à Victor Hui pour son travail de synthèse.
Références
Quelques ressources liées aux thèmes abordés dans cet épisode:
- La série Black Mirror sur Netflix (on parle des épisodes S03E01 et S04E02)
- Le robot de Boston Dynamics dont on parle