Livre: Soldats de Jésus

Recension de livre

Je m’adonne pour la première fois à cet exercice: faire la recension d’un livre seulement à partir de l’extrait gratuit du format Kindle. Bref, c’est plus pour signaler un nouveau livre sur les évangéliques que pour en discuter le contenu…

J’ai appris la parution des Soldats de Jésus, les évangéliques à la conquête de la France, par une interview de l’auteur, Linda Caille, par La Vie: "Les évangéliques français ne sont pas une sous-culture américaine" (21.02.13). Qu’on soit d’accord ou pas avec son avis (je trouverais à en redire, personnellement), c’est toujours bon de connaître le regard d’un journaliste non-évangélique et indépendant sur notre "tribu".

Votre enquête est intitulée: "Soldats de Jésus. Les évangéliques à la conquête de la France.” Pourquoi ce titre choc sur des chrétiens pourtant pacifiques?

En 2013, sur les 600.000 évangéliques français, la moitié a moins de 35 ans, et ils en veulent! 38% d’entre eux vont au culte chaque semaine. J’ai rencontré des jeunes des banlieues, des gentils branchés parisiens, des chefs d’entreprises. J’ai voulu mettre en avant leur engagement. Ils sont comme des soldats dans la mesure où leur vie est consacrée à une cause qui les dépasse: l’annonce de l’Évangile.

Par ailleurs, la Bible utilise des mots comme "soldat" et "armée". Un exemple: Paul s’adresse à son fils spirituel Timothée en lui demandant de “souffrir comme un bon soldat de Jésus-Christ” (2 Timothée 2, 3).

Comment définir la foi évangélique? [La suite est disponible sur le site La Vie]

Si j’en crois l’introduction du livre, l’auteur répondrait à l’issue de son enquête, entre autres, à la question: “(les évangéliques) sont-ils l’avenir de la foi chrétienne en France?”. Ça m’aurait bien intéressé de la lire au sujet des chrétiens d’aujourd’hui, ceux qu’elle a rencontrés “pendant cinq ans, du Havre à Paris, de Lille à Lyon, de Strasbourg à Grenoble”.

Hélas, comme je vous l’ai dit, je ne disposais que des premières pages de l’extrait gratuit, soit: “Première partie – Hier: Des camisards à Billy Graham, chapitre premier: en 1517, une poignée d’insoumis…” Non, non, je ne veux pas dire que c’est rébarbatif de se coltiner l’histoire, juste que je ne suis pas la mieux placée pour évaluer ce contenu…

Je trouve le rappel historique un peu simplifié, mais c’est sans doute sans objectivité. Au regard des connaissances acquises dans le secondaire qu’on a tous plus ou moins, Mme Caille fait du bon travail en rappelant à notre mémoire les anabaptistes, les Frères moraves, Philipp Jacob Spener ou encore la guerre des Camisards.

Je regrette surtout les phrases du genre:

Leurs pasteurs, contrairement aux prêtres catholiques, peuvent se marier.

Bon, d’accord, mais ce serait bon de dépasser les comparaisons cathos vs protestants et de se demander, d’abord, en vertu de quoi peuvent-ils se marier, quel sens donnent-ils à cet événement dans leur vie ? etc.

Si je trouve le livre en bibliothèque, je vous promets une recension plus approfondie…

En attendant, il y a un point de l’interview de Linda Caille qui m’a interpellé:

Chez les évangéliques, le contrôle est collectif, on se mêle souvent de votre vie privée. Le pasteur peut être omniprésent et intrusif.

Je suis loin d’avoir fait le tour de toutes les Églises de France et de Navarre, c’est le moins qu’on puisse dire. L’individu pasteur-gourou existe. Toutefois, je me demande si ce que les journalistes nomment “se mêler de notre vie privée” et “être intrusif” n’aurait pas parfois pour traduction: “Veillons les uns sur les autres pour nous encourager à mieux nous aimer et à faire du bien autour de nous” (Hé 10.24) en langage biblique?

En fait, je ne veux pas traiter de façon simpliste la limite entre exhortation fraternelle et harcèlement. Je ressens juste le besoin de donner mon ressenti sur un préjugé répandu (du moins, je l’ai souvent entendu) : « les évangéliques, ils se mêlent de ta vie privée. » Eh bien, voyez-vous, j’aimerais bien, moi, qu’on se mêle plus de ma vie privée ! Il y aurait à redire. Inutile de préciser que je parle de vie privée au sens large, de l’utilisation de notre temps, donc de notre vie, pas uniquement de ce qui est «privé» au sens restreint.

Je n’ai jamais trouvé que les pasteurs, les anciens et les frères et sœurs en Christ allaient trop loin. Sans doute que je suis un peu revêche si on appuie là où ça fait mal, mais tout bien pesé, c’est une grâce quand on est entouré de personnes qui ont le courage de nous reprendre. Et oui, si c’est d’une façon saine, se mêler de la vie privée des autres requiert du courage et de l’amour. Soit, ils se fâchent (=on se les met sur le dos), soit ils accueillent nos remarques (=on va dépenser du temps pour les aider). «Excuse-moi de ne pas m’être mêlé de ta vie privée» devrait même être une demande de pardon quotidienne. Merci au passage à tous ceux qui se mêlent de ma vie privée et qui se reconnaîtront. Qu’ils continuent!

Bref, si c’est de la façon dont l’enseigne la Bible, on gagnerait à se mêler davantage de la vie des uns et des autres. D’ailleurs, je considère même que ce concept de « la vie privée »  est l’un des mensonges du monde qui pénètre parmi les chrétiens.

J’ai toujours l’impression d’être relativement anonyme ici, j’espère que ce n’est pas qu’une impression, sinon j’en connais une qui va avoir des comptes, beaucoup de comptes, à rendre maintenant…

Pour aller plus loin

Myriam J.

Myriam a fait une licence d'histoire à la Sorbonne. Elle a été une contributrice régulière au site TPSG durant plusieurs années.

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