Pour fuir la solitude au Japon, les gens « louent des comédiens » qui prétendent être leurs proches. L’Église offre à tous une solution plus « vraie ».
La pratique, qui se veut une réponse à la solitude, a de quoi faire dresser les cheveux sur la tête. Pourtant, elle correspond bel et bien à un phénomène de société répandu dans le Japon ultramoderne.
À Cannes, le nouveau remède nippon face à l’insupportable solitude de notre siècle vient d’être révélé au public international dans un film du cinéaste allemand Werner Herzog, Family Romance LLC1.
En un mot, il s’agit de la « location de comédiens » dont la mission est de se faire passer pour un membre de la famille ou un proche. Le phénomène porte un nom, les « rentaru furendo ». Ces agences de location très particulières qui comblent les manques, voire les vides affectifs de leurs clients, en créant de toute pièce un amour familial ou simplement un lien social ».
Lorsque Herzog a eu vent de ce concept pour la première fois, il a cru à de la science-fiction. Il s’est penché de près sur le phénomène avant de composer le scénario d’un film si proche de la réalité qu’on pourrait le confondre avec un documentaire.
L’intrigue principale, à laquelle se mêlent d’autres histoires plus légères, se résume ainsi:
En fil rouge du film se noue à l’écran la relation naissante entre Mahiro, 12 ans, et son « père » qu’elle n’a jamais vu et qui se décide enfin à venir à sa rencontre. Ce « père », Yuichi Ishii, qui se trouve être à la fois le metteur en scène et l’acteur principal de ce petit théâtre des illusions, a été embauché par la mère de Mahiro.
Peu à peu, l’adolescente prend confiance, s’attache et se confie à lui, sans que l’acteur qui l’incarne parvienne véritablement à savoir si celle-ci sait le subterfuge mis en place ou si elle croit vraiment à ce rapport affectif qui s’instaure. Yuichi, qui rapporte régulièrement à sa cliente, la mère de Mahiro, les discussions et moments intimes ainsi provoqués, sent qu’il est affecté par la situation « car chez Family Romance on n’a pas le droit d’aimer ni d’être aimé ».
Face à une solitude qui n’a jamais été ressentie aussi fortement qu’à notre époque ultra-connectée sur le plan technologique, une première solution émerge donc: s’inventer une pseudo-réalité relationnelle.
Pourtant, entretenir des relations fictives n’est ni la seule approche, ni la meilleure.
Dans notre société où la liberté de choisir est souvent en tête des valeurs de prédilection, nous ne sommes pas aussi libres que nous le prétendons parfois. Nous ne choisissons ni notre lieu de naissance, ni la famille qui nous accueille dans ce monde, ni bon nombre des circonstances de vie qui détermineront en grande partie l’orientation de notre « parcours relationnel ». Ainsi, beaucoup de personnes se retrouvent tôt ou tard isolées malgré elles, ayant l’impression d’être « tombées » sur la mauvaise famille ou le mauvais cercle d’amis. Ou tout simplement en quête d’une famille ou d’un réseau d’amis différents de ce que la réalité leur a imposé.
Il est absolument remarquable que l’Évangile permette à tous de repartir à zéro. Non seulement avec Dieu, mais également sur le plan humain. Dieu « adopte » dans sa famille les personnes qui trouvent en Jésus le pardon de leurs fautes. Il établit de nouvelles bases pour une vie sociale renouvelée et enthousiasmante, qui transcende les idéaux véhiculés par toutes les cultures du monde.
Certes, on ne choisit pas ses frères et sœurs en Christ. Pourtant, le scénario qui nous est proposé grâce à l’Évangile correspond à nos aspirations familiales et relationnelles les plus profondes, qui que nous soyons.
Dans l’Église, la question fondamentale n’est pas « avec qui » (avec qui vais-je entrer en relation?). Les questions qui comptent le plus, ce sont plutôt:
L’apôtre Paul répond à la première question (« sur quel fondement ») en Éphésiens 2.11-22.
Il répond à la seconde (« comment ») en Éphésiens 5.25-5.2.
Comment vaincre la solitude?
Soit en nous inventant une fiction pour oublier la réalité.
Soit en entrant dans une réalité qui est l’Église, et qui surpasse même les plus belles fictions.
Article publié pour la première fois le 21 mai 2019, republié pour atteindre de nouveaux lecteurs.