Quand on émet des réserves sur le ministère d'une personne (par exemple à cause de ses enseignements), certains répondent parfois: "Oui mais elle porte du fruit", sous-entendant que beaucoup de personnes l'apprécient. Mais est-ce que bibliquement, porter du fruit c'est avoir de l'impact sur les gens?
Quand on emploie une expression, il faut faire attention, parfois —souvent— elle peut avoir plusieurs sens. Mais dans ce cas, porter du fruit veut dire la même chose dans le contexte biblique que dans l’usage courant: c’est avoir des résultats. « Porter de bons fruits », c’est donc « avoir de bons résultats ». J’ai sélectionné et commenté les textes clés du Nouveau Testament, qui nous permettront d’en dégager la signification.
Jésus met en garde contre les faux prophètes (Mt 7.15). On les reconnaît, dit-il, à leurs fruits (Mt 7.16, 20). Mais que sont ces « bons fruits »? Les bons fruits, c’est faire la volonté de son Père céleste (Mt 7.21). Certains mettent en avant des prophéties, des miracles ou des exorcismes (Mt 7.22). Mais tout cela n’est pas reconnu par le Seigneur, qui finit par les chasser. Apparemment, ces faux prophètes faisaient des choses extraordinaires, mais vivaient une vie contraire aux commandements du Seigneur (Mt 7.23). La fin du discours sur la montagne (Mt 7.24-29) est essentiel: tout ce que Jésus a enseigné (Mt 5-7) doit être observé. Le disciple de Jésus est celui qui obéit à son maître (Lc 6.46).
Ce passage est certainement le premier auquel on pense quand on parle de porter du fruit. Dans ce passage, Jésus se compare au cep d’une vigne et compare son Père à un vigneron (Jn 15.1). Le vigneron doit s’occuper de la vigne, il retranche les sarments qui ne portent pas de fruit et émonde ce qui en porte, pour qu’ils en portent encore plus (Jn 15.2). Cette image reprend des termes déjà employés ailleurs: ce qui est coupé pour être jeté au feu parle du jugement (Jn 15.6). Jésus continue: ceux qui portent du fruit le font parce qu’ils sont attachés au cep (Jn 15.5). Jésus explique ensuite ce que veut dire de demeurer en lui: c’est obéir à sa Parole (Jn 15.7, 10). Encore une fois, le fruit que nous portons se manifeste par l’obéissance à sa Parole, aux commandements de Jésus, notamment celui de s’aimer les uns les autres (Jn 15.16-17).
Jésus, avec l’épisode de la tour de Siloé (Lc 13.1-5), pointe vers la nécessité de se repentir (Lc 13.5). Vient après cette péricope la parabole du figuier, dans laquelle Jésus illustre la nécessité de se convertir et, conformément à l’image employée, de porter du fruit digne de la repentance (Lc 13.9). On retrouve cette idée de « porter des fruits dignes de la repentance » dans la prédication de Jean-Baptiste, plus tôt dans le livre (Lc 3.8).
Dans ce passage, Paul établit un contraste entre deux conditions: celle d’esclave du péché (Rm 6.16) et celle d’esclaves de la justice (Rm 6.16, 18)/Dieu (Rm 6.22). Dans ce contexte, le fruit que nous portons, dit Paul, dépend de notre maître: celui qui est esclave du péché a pour fruits l’iniquité (Rm 6.19) et des fruits dont on rougit (Rm 6.21); mais celui qui est esclave de Dieu porte pour fruits la sainteté et la vie éternelle. Dans ce passage, porter du fruit est notre manière de vivre, qui témoigne de notre maitre.
Avec Jean 15, c’est probablement le passage qui nous vient en tête quand on parle de « porter du fruit ». Comme dans Rm 6.15-23, ce passage décrit deux façons de vivre: marcher par l’Esprit ou marcher par la chair (Ga 5.16-17). Marcher par la chair se voit par les dérèglements qui en découlent (Ga 5.19-21). Mais ceux qui marchent par l’Esprit porte le fruit de l’Esprit: l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la foi, la douceur et la maîtrise de soi (Ga 5.22). Ici encore, le fruit est associé à une disposition intérieure, à la transformation de cœur que produit l’Esprit de Dieu qui habite en nous. On retrouve la même idée en Éphésiens 5.9: le fruit de la lumière consiste en toute sort de bonté, de justice et de vérité. Le passage en général (Ép 5.3-21) dresse aussi le contraste entre les enfants de lumière (Ép 5.8) qui sont remplis de l’Esprit (Ép 5.18) et les enfants de ténèbres qui vivent dans la débauche (Ép 5.3, 15, 18).
Ces passages relatent la même parabole qu’on appelle la parabole du semeur. Certains ont dit que « porter du fruit » (Mt 13.23) se rapporterait au moins en partie à l’idée de multiplication à cause de l’expression « un grain en donne cent, un autre soixante, un autre trente ». Même s’il est vrai qu’un disciple doit faire des disciples, je ne pense pas que Jésus avait cela en tête.
Pour plusieurs raisons:
On ne peut donc pas être catégorique sur l’interprétation exacte de « un grain en donne cent, un autre soixante, un autre trente ». Mais, notre préférence va dans le sens d’une compréhension harmonieuse du reste du livre et de la Bible: porter du fruit signifie, a minima, que l’Évangile nous transforme et que cela se voit.
Nous l’avons vu, dans la Bible, porter de bons fruits signifie:
On doit bien sûr se demander si une personne fait des disciples. Un disciple fait des disciples, la Parole l’atteste. Mais attention quand on emploie l’expression « porter de bons fruits » ou « porter du fruit » parce que, dans la Bible, cette expression a une signification particulière. Comme nous l’avons vu, cette expression est d’abord en relation avec la marche chrétienne de la personne et non avec ses activités.
Mais là encore, faire des disciples n’est pas gage de « bons fruits ». Il faudrait encore voir quelle sorte de disciple on forme: Est-ce que, eux portent de bons fruits à leur tour? Est-ce que leur vie témoigne de l’action de l’Esprit en eux? Mais ça, c’est un autre article!
Finalement, dans la Bible, les deux critères qui nous permettent d’évaluer un enseignant sont:
Cet article fait partie d’une série publiée en collaboration avec les blogs La Rébellution et LeBonCombat.
webinaire
Comment améliorer son culte personnel?
Ce replay du webinaire de Raphaël Charrier a été enregistré le 10 janvier 2019.
Orateurs
R. Charrier