J’espère vous avoir convaincu, avec l’article précédent de cette série, de l’importance de lire la Bible. Si vous n’avez l’occasion de lire qu’un seul livre, alors n’hésitez pas, lisez la Bible. Mais il y a un extrême à éviter: ne lire que la Bible.
Cet article propose 9 arguments pour nous encourager à lire des livres écrits par des chrétiens et traitant de la Bible.
Avant d’entrer dans cette liste d’arguments, je dois juste faire une remarque: on entend parfois l’expression « livre chrétien ». Je ne l’utiliserai pas dans cet article et préfèrerai l’expression « livre écrit par un chrétien ». J’estime, en effet, que l’adjectif « chrétien » ne peut pas s’attribuer à un objet, mais uniquement à une personne. La Bible pourrait faire exception à cette règle car Christ est la Parole faite chair, on pourrait donc dire que la Bible est un livre chrétien.
Le premier argument est un argument moral, les deux suivants sont des arguments théologiques, les six derniers sont des arguments pragmatiques.
La Réforme a crié haut et fort que la seule source d’autorité absolue pour le chrétien est la Bible. Mais reconnaître l’autorité de la Bible ne signifie pas brûler tout le reste. Par exemple, la confession de foi helvétique postérieure stipule ceci, au sujet des écrits des Pères (c’est-à-dire, des théologiens anciens):
Nous ne méprisons pas les Saints-Pères de l’ancienne Église, tant de la grecque que de la latine, ni les explications qu’ils nous ont laissées de la Sainte-Écriture. Nous ne rejetons pas non plus leurs autres travaux et les ouvrages qu’ils ont écrits sur des matières de foi, lorsqu’ils s’accordent avec l’Écriture
confession de foi helvétique postérieure, chapitre 2, paragraphe 2
Nous devons reconnaître que nous dépendons tous de l’influence de personnes plus matures. Le chrétien n’est pas seul sur une île déserte, il appartient à un corps qui s’appelle l’Église. Lire des livres écrits par d’autres chrétiens est une marque d’humilité. C’est reconnaître que les autres ont aussi réfléchi à la Bible, qu’ils ont pu comprendre des choses que nous ne comprenons pas.
Si on le dit dans l’autre sens, cela signifie que le fait de vouloir se débarrasser de tout ce qui n’est pas la Bible est une marque d’orgueil. Cela signifie que nous nous croyons au-dessus de milliers d’hommes et de femmes qui ont réfléchi sérieusement et qui ont écrit leurs réflexions pour que d’autres puissent les lire.
Au même titre que nous devons être prêts à recevoir les remarques d’autres chrétiens pour grandir dans notre vie chrétienne, nous devons aussi être prêts à lire ce que d’autres ont écrit pour grandir dans notre connaissance de la Bible.
L’argument moral cité plus haut est important, mais il doit être appuyé par des arguments théologiques. Je vois deux arguments théologiques qui devraient nous pousser à lire des livres écrits par des chrétiens: le premier vient de la théologie de la révélation, le deuxième vient de la pneumatologie (doctrine du Saint-Esprit).
Lors que nous réfléchissons aux questions fondamentales liées à la Bible, nous devons nous poser les questions suivantes:
Les évangéliques ont souvent répondu à ces trois questions en disant que le chrétien était le destinataire, le lecteur et l’interprète normal de la Bible. D’un côté, cette réponse est correcte, mais elle omet un aspect important: Dieu n’a pas accordé sa révélation à des individus, mais à un peuple. L’Église (dans son ensemble) est celle qui reçoit, celle qui devrait lire et celle qui doit comprendre la Bible. Cela ne signifie pas que l’Église fait toujours cela. Cela ne signifie pas non plus qu’elle le fait toujours correctement. Mais on peut s’attendre à ce que l’Église lise et comprenne correctement, de manière collective, le message que Dieu lui a envoyé.
Cela a des implications importantes. Par exemple, cela implique que nous ne pouvons pas bâtir un système théologique en restant seul. Nous avons besoin de l’apport des autres.
Bien entendu, toute interprétation héritée de l’Histoire de l’Église peut et doit être remise en question, mais si nous devons la rejeter, cela doit être pour de bonnes raisons. La Bible reste l’autorité absolue, mais c’est lorsque l’Église la lit et essaie de la comprendre que Dieu lui parle.
On a parfois l’impression que les Réformateurs ont inventé les notions de salut par la foi et par la grâce. Mais en réalité, les Réformateurs avait conscience qu’ils n’avaient rien inventé, mais que d’autres théologiens, bien avant eux, avaient déjà compris ces doctrines en lisant la Bible.
Le deuxième argument théologique découle d’une bonne théologie du Saint-Esprit. Si nous croyons que Dieu (le Saint-Esprit) habite dans ses enfants, qu’il les habite tous depuis le jour de leur conversion, et qu’il agit en tous (pas nécessairement de la même manière, ni avec la même intensité), alors nous devons prêter attention à ce que d’autres chrétiens disent ou écrivent.
Nous le savons, nous vivons une période étrange de tension entre des réalités que nous vivons déjà, mais qui seront pleinement abouties dans des temps à venir. Donc, le fait d’être habité du Saint-Esprit ne signifie pas que tout ce que dit ou écrit un chrétien soit correct. Nous devons faire preuve d’esprit critique. Mais nous sommes nous-mêmes faillibles. Nous devons donc, dans ce monde marqué par le péché, prêter attention à ce que d’autres disent et écrivent. En particulier, nous devons lire des livres écrits par des chrétiens.
Quittons le monde de la morale et de la théologie pour nous attaquer à quelques arguments plus pragmatiques. Lire des livres écrits par des chrétiens a de nombreux avantages au quotidien, en voici quelques exemples.
Le premier argument vient des auteurs. Certains auteurs du passé ainsi que certains auteurs contemporains, font partie des esprits les plus brillants de leur époque. Leur faculté d’analyse, leur érudition, leurs découvertes et leur méthodologie sont des bienfaits, non seulement pour le monde académique, mais pour l’Église entière. Si nous négligeons leurs écrits, nous passons à côté de ressources inestimables que le Seigneur nous donne pour notre édification.
Un autre argument très terre à terre est que les livres écrits par des chrétiens peuvent nous préserver de l’hérésie. De nombreuses branches hérétiques sont sorties du christianisme orthodoxe (orthodoxe signifie ici « conforme à l’enseignement de la Bible ») en deux millénaires. Si vous examinez les sectes issues du christianisme telles que les Témoins de Jéhovah ou les Mormons, vous vous rendrez compte qu’ils lisent peu de livres écrits par des chrétiens. Vous me direz que nous lisons peu de livres écrits par des Mormons. Mais nous lisons des livres écrits par des chrétiens datant d’avant la fondation de l’Église des Saints des derniers jours (dont les membres s’appellent des Mormons). Si ces mouvements hérétiques lisaient les écrits chrétiens datant d’avant leur propre création, ils seraient obligés de réfléchir à leur théologie.
Dans cet article, je parle, bien entendu, de livres écrits par des chrétiens au sujet de la Bible ou de la vie chrétienne. Un chrétien pourrait très bien écrire un roman profane (nous devrions en écrire davantage à mon avis) ou un manuel de mécanique, mais je me concentre ici sur les livres à propos de la Bible ou de la vie chrétienne. Il existe plusieurs livres de ce type: des commentaires de la Bible, des manuels de théologie systématique (généraux ou spécialisés), des livres sur l’Histoire de l’Église, des livres d’édification, des manuels d’ecclésiologie, des biographies ou des livres sur des sujets spécifiques (par exemple des livres présentant d’autres religions ou des livres de méthodologie).
Ces livres sont une source inépuisable d’encouragement. Certains plus que d’autres bien évidemment. Je pense en particulier aux livres d’édification et aux biographies. Lorsque vous passez par l’épreuve, surtout si cette épreuve est inhabituelle, vous trouvez difficilement un soutien spécifique dans votre entourage. Vos frères et sœurs seront là pour vous écouter et pour vous donner des conseils généraux, mais vous aurez probablement besoin de sortir de ce cercle pour trouver des conseils avisés. Vous n’aurez pas forcément la possibilité de rencontrer une personne qui a vécu et/ou qui a étudié l’épreuve par laquelle vous passez, mais vous trouverez probablement un auteur qui aura écrit un livre sur le sujet. Ce livre ne sera pas meilleur que les conseils de vos frères et sœurs, mais il sera complémentaire.
Je pense ici, par exemple, à certaines difficultés typiques du ministère pastoral. La solitude, la surcharge, la difficulté liée à son propre péché ou le difficile constat du péché des autres personnes, le poids des épreuves subies par les autres, les problèmes d’organisation ou de gestion du temps, la précarité (parfois), le manque ou l’excès d’autorité sont vécues de manière plus ou moins intenses par bon nombre de pasteurs. Les pasteurs manquent, bien souvent, dans leur entourage, de personnes pouvant les encourager et les conseiller. Les livres écrits par d’autres pasteurs qui ont vécu et/ou réfléchi à ces problématiques deviennent de vraies bénédictions.
Si un jeune chrétien vous pose des questions sur un sujet spécifique, vous avez deux options simples: vous pouvez lui répondre, ou vous pouvez l’orienter vers un livre (ou un article de blog). Il existerait d’autres options comme, par exemple, lui proposer de suivre des cours de théologie, mais ces deux options sont les plus simples. Ces deux ne sont pas à mettre en opposition, mais sont complémentaires. L’avantage de votre réponse est que vous pourrez être interactif avec votre interlocuteur. L’avantage du livre est que la réponse sera probablement plus fouillée.
Je vous encourage à lire des livres pour votre formation et à donner des livres à lire à de jeunes chrétiens. C’est un excellent moyen de vous permettre et de leur permettre de progresser.
Lorsqu’on me pose une question de théologie systématique, d’éthique ou même une question biblique, je me tourne généralement vers un ou plusieurs livres. En quelques minutes, je peux me faire une idée de ce que d’autres pensent sur le sujet.
Il est impossible de maîtriser toutes les questions liées à la Bible. Lorsque quelqu’un vous posera des questions techniques, les livres pourront vous faire gagner un temps précieux.
Lorsque je parle de ministère, je ne m’adresse pas spécifiquement aux pasteurs ou aux personnes qui travaillent à plein temps dans une organisation chrétienne, je parle de l’orientation d’une vie au service de Dieu. Chaque chrétien est appelé à servir Dieu en servant son peuple. Mais chaque chrétien est appelé à servir le peuple de Dieu dans des domaines spécifiques pour lesquels Dieu l’a équipé. Comment discerner la manière dont Dieu nous a équipé pour servir? Normalement, ce processus s’effectue dans une Église locale. Les anciens devraient vous pousser à découvrir vos domaines de service. Puis, des grands frères et grandes sœurs qui ont des services similaires aux vôtres devraient vous prendre sous leurs ailes pour vous aider à avancer. Mais les livres pourront vous aider. Ils vous feront découvrir des auteurs qui servent dans des domaines variés. À la lecture de leurs livres, une corde va peut-être raisonner en vous et vous vous rendrez compte que vous devriez explorer cette voie de service.
Mais les livres ne sont pas uniquement utiles pour découvrir de nouveaux lieux de services, ils sont aussi utiles pour peaufiner une orientation. Après quelques années dans un service donné, vous aurez acquis de l’expérience, vous serez entré dans une routine. La lecture de livres peut changer cette routine et vous donner de nouvelles idées. Cela peut aussi modifier certains accents de votre ministère. Vous vous rendrez compte que vous avez négligé certains aspects et vous pourrez ajuster le tir.
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Comment améliorer son culte personnel?
Ce replay du webinaire de Raphaël Charrier a été enregistré le 10 janvier 2019.
Orateurs
R. Charrier