Comment interpréter la mort d'Ananias et Saphira?

ActesCroissance spirituelle

La mort de ce couple est le premier récit faisant mention de la mort de chrétiens dans le livre des Actes (Ac 5.1-11).
Nous pourrions nous attendre à ce qu’elle soit le fait des Romains ou des religieux Juifs, mais non. C’est une autre personne qui en est responsable. Ce récit est aussi surprenant que dérangeant pour nous…

Je l’ai prêché récemment. Voici la vidéo et mes notes retravaillées qui résume ce que j’ai dit:

Interpréter l’évènement dans son contexte:

L’aube d’un nouveau Temple.

Ce récit fait suite à la première arrestation des Apôtres par les autorités religieuses du Temple (Ac 4. 1.31). Elles les accusent de n’avoir aucune instruction et légitimité pour parler de religion contrairement à eux.

Pierre accuse, les autorités religieuses, d’avoir crucifié le Messie promis alors « qu’il n’y a de salut en aucun autre, car il n’y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés » (Ac 4.12).

Pierre entérine par sa prédication la fin des sacrifices et du Temple. Le judaïsme devient l’Ancien Testament… Le Temple fait de pierres n’est plus là où Dieu réside. Il est obsolète.

L’Esprit de l’Eternel réside dans son peuple, le nouveau Temple du Dieu vivant, constitué de tous ceux qui ont placé leur foi en le Messie promis par l’Ancien Testament.

Dans la foulée de la prédication de Pierre, Luc (l’auteur du livre des Actes) fait un portrait de l’Eglise, ce nouveau Temple (Ac 4.32-35). Ce qu’il met en avant, c’est le changement de coeur qui se produit dans l’Eglise.

La vraie foi en Christ crée un nouveau désir d’aimer son prochain et de prendre soin de lui. L’intérêt personnel s’efface devant celui de l’autre. C’est dans ce contexte que Barnabas est cité comme exemple positif d’un homme rempli de l’Esprit.

Luc désire donc mettre en contraste l’exemple d’attitude positive de Barnabas avec celle d’Ananias et Saphira.

Étaient-ils des non-croyants?

Le reproche qui leur est fait est d’avoir menti au Saint-Esprit (Ac 5. 3,9). S’ils n’ont pas l’Esprit, la récrimination de Pierre devient incompréhensible.

Au contraire, c’est parce qu’ils sont chrétiens qu’ils sont punis si sévèrement.
Dieu ne leur a pas retiré son pardon ni leur Salut, mais les a livrés aux conséquences de leur péché. Il les a ôtés du milieu de son peuple.

Quel était leur péché?

Ils n’ont tué personne, volé personne, mis en danger la vie de personne. Aucune chose grave. Leur faute: avoir voulu se montrer sous un meilleur jour. Ce que Barnabas a fait en pensant aux autres, ils l’ont fait en pensant à eux.
Leur seul péché est l’hypocrisie, c’est tout.
Et c’est largement suffisant!
Pourquoi?

C’est avant tout le Saint-Esprit qu’ils ont offensé, et c’est à lui le premier qu’ils ont menti. Ils se sont dit: « Nous pouvons cacher à Dieu, et même s’il voit ce n’est pas bien grave. Il n’y aura pas de conséquences. »

Ils ont ainsi méprisé le Saint-Esprit qui leur avait révélé le prix de la grâce. Tout péché, même anodin à nos yeux, doit nous horrifier quand on sait que Jésus est mort pour ça.

Les péchés que nous considérons comme « acceptables », explique Jerry Bridges, sont subtils, car ils nous trompent en nous faisant croire qu’ils ne sont « pas si graves que ça, » ou qu’ils ne sont pas vraiment des péchés. Et parfois, ce qui est encore pire, nous n’avons même pas conscience que ce sont des péchés! En effet, certains sont si subtils que nous les commettons sans y penser, ni sur le moment ni après coup. Nous vivons ainsi souvent dans un déni inconscient de nos péchés dits « acceptables ». (…) Pensons par exemple à l’impatience, à l’orgueil, à la rancune, à la révolte et à l’apitoiement sur nous-mêmes. Ces péchés-là nous semblent-ils odieux et pernicieux? Ils le sont. Les tolérer est aussi dangereux que de laisser une tumeur cancéreuse faire son œuvre dans notre corps. Car des péchés qui paraissent petits à nos yeux peuvent conduire à des péchés plus graves.

Pas si grave, J. Bridges

Ce qu’il souligne, c’est que Dieu n’a pas plusieurs lois qui auraient des degrés de gravités différentes à ses yeux. Petits et grands péchés sont la transgression de sa loi (Jc 2.10).
À ses yeux, il n’y a pas de transgression de sa loi qui soit acceptable.

Pourquoi un jugement si sévère?

Mais tout de même, pourquoi un tel jugement?
Nous pouvons penser à de nombreuses figures bibliques qui ont fait des choses biens plus graves qu’être hypocrite, mais que Dieu n’a pas jugé si sévèrement.
Pierre, vient d’accuser les autorités religieuses d’avoir tué le Messie, mais ils n’en sont pas morts… Alors pourquoi un tel jugement?

Aux moments décisifs de l’histoire de son peuple, alors que Dieu accorde des grâces et fait progresser considérablement son plan de Salut pour son peuple, il veut lui rappeler à quel point il est saint et ne tolère pas le péché. On n’abuse pas de la grâce du Dieu Saint.

  • Début de la lignée des prêtres, jugement des fils d’Aaron qui ont pris un feu étranger.
  • Début de la conquête de Canaan, jugement d’Acan qui a volé un manteau et de l’or chez l’ennemi (Luc utilise le même verbe que celui de la Septante).
  • Début de la lignée du roi David, jugement d’Uzza qui toucha l’arche pour qu’elle ne tombe pas dans la boue.

Le point commun de ces jugements?

Dans chacun de ces cas, c’est pour un « petit » péché que Dieu a exécuté sa sentence. Et c’est là que l’on comprend la pédagogie de Dieu: avec un grave péché on ne comprendrait pas la leçon!
En étant si sévère avec des « petits » péchés, le Dieu de grâce nous rappelle à quel point il est saint et ne tolère aucun péché.

Avec le début de l’Église, nous sommes dans une nouvelle étape décisive du plan de Dieu, la dernière avant le retour de Jésus.

Ne le savez-vous pas? Votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous et que vous avez reçu de Dieu. Vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes, car vous avez été rachetés à un grand prix. (1Co 6.19–20)

L’Église est le vrai temple de Dieu. L’ancien Temple était caractérisé par l’hypocrisie religieuse, tant condamnée par Jésus.
Dieu ôte Ananias et Saphira du milieu des chrétiens pour leur rappeler que l’hypocrisie n’a pas sa place dans l’Église.

Quelle est la conséquence de leur mort?

Une grande crainte s’empara de toute l’Église et de tous ceux qui apprirent ces événements. (Ac 5.11)

C’est la première mention dans le livre du mot Église (Ekklēsia) dans le texte grec. Intéressant. Ce qui caractérise l’Église, c’est qu’elle doit aspirer à la sainteté et craindre l’Eternel.

3 enseignements importants pour nous

1. La mort D’Ananias et Saphira nous apprend à quel point nous sommes dépendants de la grâce infinie de Dieu

Si on se place du point de vue de Dieu, ce qui nous semble extraordinaire pour Ananias est, en fait, tout à fait normal.

Le salaire du péché, c’est la mort. (Rm 6.23)

Ce qui est tout à fait extraordinaire c’est que nous puissions vivre en méprisant le Saint-Esprit et que Dieu se montre si patient envers nous !

Dieu sait tout de nous. Il connait nos péchés, nos pensées les plus inavouables. Quelle grâce de vivre encore parmi nos frères et soeurs!
Nous ne méritons pas d’appartenir à son Église.

Ce texte nous rappelle avec force l’immensité de la grâce de Dieu parce que l’on n’est pas tous morts foudroyés.

Là où le péché s’est multiplié, la grâce a surabondé. (Rm 5.20)

Si nous ne sommes ni sanctionnés ni condamnés, c’est parce que Christ l’a été à notre place à la croix. Le Père a déversé sa colère et son jugement sur lui car il a porté la culpabilité de tous nos petits péchés « acceptables » sur la croix.

2. La mort d’Ananias et Saphira nous rappelle que nous devons craindre Dieu et haïr notre péché

Cet épisode nous rappelle que le moindre petit péché est très sérieux. Si nous méprisons le péché, nous méprisons la sainteté de Dieu, nous mépriserons l’infini prix de la grâce. Nous ne devons jamais oublier que le Dieu de grâce est le Dieu Saint.

La Bible nous exhorte à ne jamais l’oublier:

Si tu tenais compte de nos fautes, Eternel, Seigneur, qui pourrait subsister ? Mais le pardon se trouve auprès de toi afin qu’on te craigne. (Ps 130.3–4)

Tout homme qui prononce le nom du Seigneur, qu’il se détourne du mal.(2 Tm 2.19)

3. La mort d’Ananias et Saphira nous rappelle la présence réelle de l’Esprit en nous

Personnellement, je crois en sa présence théorique et théologique dans ma vie, mais je n’en fais pas assez l’expérience. J’ai tendance à le dépersonnaliser.

Pourtant, il entend chaque pensée, voit chaque imagination de mon cœur. Et il y en a beaucoup qui l’attriste…

Notre capacité à détecter et lutter contre les péchés du quotidien est proportionnelle à notre relation intime avec l’Esprit Saint. Nous avons besoin d’être remplis de sa présence et de sa force. Nous devons marcher par lui. Nos propres forces ne suffirons jamais à résister aux séductions de Satan.

Quel espoir pour nous?

Si comme moi vous luttez et êtes souvent découragés par l’état de votre cœur et par votre manque de considération pour l’Esprit Saint, je veux vous encourager.

L’un des meilleurs signaux de notre bonne santé spirituelle, c’est quand nous sommes conscient et attristés de voir notre cœur rempli de ces péchés dits « acceptables ».

Si nous ressentons la tristesse de l’Esprit, c’est parce qu’il veut également nous conduire au pied de la croix pour être lavé et avoir votre cœur renouvelé.

Si nous reconnaissons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous les pardonner et pour nous purifier de tout mal. Si nous disons que nous n’avons pas péché, nous faisons de Dieu un menteur, et sa parole n’est pas en nous. (1Jn 1.9–10)

Quel danger d’oublier Ananias et Saphira?

Contrairement à Ananias, Pierre a offert une opportunité à Saphira:

Pi_erre lui adressa la parole: « Dis-moi, est-ce bien à ce prix que vous avez vendu le champ? » « Oui, répondit-elle, c’est à ce prix-là. »_ (Ac 5.8)

C’était une occasion de se repentir. Elle ne l’a pas saisie. Elle n’a pas écouté le Saint-Esprit. Elle en est morte.

Nous devons saisir les opportunités de nous repentir quand elles se présentent, elles sont des cadeaux immérités.

En effet, le désir de nous repentir est une grâce qui nous vient de Dieu, pas une vertu morale que nous avons en nous.

(Le serviteur de Dieu) doit redresser avec douceur les contradicteurs, dans l’espoir que Dieu leur donnera la repentance. (2 Ti 2.25–26) 

L’examen de soi et la repentance sont des besoins aussi importants qu’urgents!

Quand Dieu touche notre cœur et qu’il pointe du doigt l’hypocrisie, la médisance, la colère, la cupidité, l’amertume, l’impatience, c’est qu’il vous fait le cadeau de pouvoir vous détourner de votre péché.
Trois fois, l’Auteur de l’Épitre aux Hébreux rappelle : « Aujourd’hui, si vous entendez ma voix, n’endurcissez pas vos cœurs. »

Demain, il sera peut-être trop tard. Dieu ne nous livrera probablement pas à la mort, mais pourra nous endurcir.
On n’abuse pas de la grâce du Dieu Saint.

Pour aller plus loin:

Raphaël Charrier

À 17 ans, Raphaël s’engage dans l’armée dont il est renvoyé moins de deux ans après. Il reprend alors l’école et obtient le bac à 23 ans. C’est à ce moment qu’il découvre la personne et l’œuvre de Jésus-Christ et place sa foi en lui pour être sauvé. Il poursuit ses études et devient Éducateur Spécialisé. Il s’oriente ensuite vers des études de théologie à l’Institut Biblique de Genève, puis à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-Sur-Seine, afin de se consacrer au service de l’Évangile.

Raphaël a été pasteur de l'Église Chrétienne Évangélique de Grenoble pendant 9 ans. Il sert désormais l'Église comme enseignant. Il est marié à Marion et ils ont deux enfants. Il est auteur du livre Vivre pour Jésus, qui a pour objectif d'aider les chrétiens à poser les bons fondements de la vie chrétienne, et coauteur de L'Évangile.net: 7 signes, une ressource d'évangélisation basée sur l'Évangile selon Jean.

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Orateurs

R. Charrier