Rencontrez Tom, Joe, Cal et Martina: les 4 grandes écoles d'apologétique

Religions du monde

Lors de notre cours d’Apologétique à l’Institut biblique de Genève, Paul Harrison a traité des principales méthodes apologétiques. Je reproduis ici sa synthèse des 4 grandes écoles d’apologétique et sa traduction d’un extrait de livre expliquant comment les 4 écoles se distinguent.

Paul Harrison:

Il y a différentes manières de faire de l’apologétique et ce n’est pas toujours aisé de classifier les méthodes. Voici une tentative:

tableau-ecoles-apologetique

Tiré de Kenneth Boa et Robert Bowman: Faith Has Its Reasons: An Integrative Approach to Defending Christianity; An Apologetics Handbook.

En résumé:

  1. Classique: L’école classique s’appuiera sur la raison pour argumenter la véracité du christianisme.
  2. Évidentialiste: L’école évidentialiste s’appuiera sur diverses « attestations », soit l’histoire (ex: la présence de l’Église à ce jour encore), le miraculeux (ex: la résurrection), le cosmos (ex: la complexité de l’existence), la morale, la philosophie, l’expérience religieuse.
  3. Présuppositionaliste: L’école présuppositionaliste s’appuiera sur la cohérence de la révélation des Écritures pour mettre en évidence les incohérences dans la vision du monde de l’interlocuteur.
  4. Fidéiste: L’école fidéiste s’appuiera sur le témoignage personnel ou l’invitation à lire la Bible.

Comment argumentent ces 4 écoles d’apologètes?

Comment quatre défenseurs de ces approches répondraient aux défis apologétiques posés par Sarah et Murali, nos deux non-chrétiens hypothétiques?

Rappelons que Sarah est une sceptique qui s’est écartée de la foi chrétienne en raison de ses exigences morales. Elle est troublée par le problème du mal. Murali est un hindou non pratiquant vivant aux États-Unis qui croit que toutes les religions sont fondamentalement les mêmes. Nos quatre apologètes représentent les quatre approches: Tom (classique), Joe (évidentialiste), Cal (présuppositionaliste) et Martina (fidéiste).

Tom (classique)

L’approche de Tom vis-à-vis de Sarah et Murali suivrait une méthode en deux étapes courantes dans l’apologétique classique. D’abord, il exposerait l’incohérence logique de leurs positions. Il pourrait expliquer à Sarah que le concept du mal sur lequel elle fonde son rejet de l’existence de Dieu implique logiquement une norme morale absolue, qui ne peut venir que d’un Créateur transcendant. Tom dirait probablement à Murali qu’il est logiquement impossible pour les religions aux visions du monde si différentes – le panthéisme (hindouisme) et le monothéisme (judaïsme, l’islam et le christianisme) – d’être toutes vraies.

Deuxièmement, Tom offrirait des réponses soigneusement construites aux objections non-chrétiennes vis-à-vis du christianisme. Il répondrait probablement au problème du mal de Sarah en expliquant que Dieu a un but plus élevé en permettant le mal et qu’Il finira par vaincre le mal par le bien. Il insisterait probablement aussi sur le fait que si Dieu a permis le mal, il n’en est pas la cause; les êtres humains ont causé le mal par l’exercice de leur libre volonté. En réponse à l’affirmation de Murali (Dieu doit approuver les différentes religions puisqu’il leur a permis de prospérer), Tom attribuerait également les différentes religions à la liberté des êtres humains à suivre leur propre chemin. Il proposerait alors l’examen des visions du monde de chaque religion pour déterminer laquelle d’entre elles, le cas échéant, a offert une vision cohérente du monde.

Joe (évidentialiste)

L’approche évidentialiste de Joe serait de présenter des faits dont il croit qu’ils soutiennent la position chrétienne et sapent les objections non-chrétiennes. Il montrerait sans doute à Sarah les preuves abondantes en faveur d’un Dieu créateur, bon et puissant et affirmerait dans le même temps que ces évidences l’emportent sur la question du mal coexistant avec Dieu.

Les faits que Joe apporterait pourraient être variés, mais il est susceptible d’inclure des preuves scientifiques concernant les origines de l’univers, un dessein intelligent à son origine ainsi que la preuve historique des signes miraculeux de Dieu dans la Bible. Joe présenterait les mêmes faits à Murali comme preuve à l’encontre des religions non théistes et à l’appui de l’affirmation que le Dieu de la Bible est en fait le vrai Dieu.

Cal (présuppositionaliste)

Tout d’abord, Cal dirait que Sarah et Murali présupposent leur autonomie propre ou “autonomie » de juger par eux-mêmes de ce qui est vrai et juste. L’affirmation de Sarah que Dieu ne doit pas être bon s’il permet le mal présuppose qu’elle est en mesure de déterminer pour elle-même, à partir d’elle-même, la norme de bonté à laquelle Dieu lui-même doit se conformer. L’affirmation de Murali que Dieu n’aurait pas permis tant de religions différentes, s’il voulait que l’on croie en un seul Dieu présuppose aussi sa compétence à juger ce que Dieu doit ou ne doit pas faire. Alors, Cal leur rappellerait ce qu’ils savent déjà dans leur cœur: qu’ils ne sont pas Dieu et que leurs prétentions à l’autonomie sont symptomatiques de leur positionnement ainsi que celui du reste de l’humanité : leur rupture avec Dieu.

Deuxièmement, Cal ferait valoir que c’est seulement sur la base du présupposé que le Dieu des Écritures est réel que nous pouvons rendre compte avec cohérence des concepts de bonté et de justice; des concepts auxquels Sarah et Murali s’appuient dans leurs arguments contre le christianisme. L’objection de Sarah face au problème du mal présuppose qu’il y a une norme de bonté par laquelle le mal est jugé. Pourtant, en niant l’existence de Dieu, elle est laissée sans aucune base rationnelle pour juger quoi que ce soit. Murali soutient que si Dieu a permis à de nombreuses religions de prospérer, c’est donc que c’est un Dieu juste et équitable. Mais cette idée ne peut être justifiée que sur la base d’un Dieu qui est à la fois Créateur personnel et juge. Cela encore nous ramène à Dieu tel que les Écritures nous le présentent.

Martina (fidéiste)

Notre quatrième apologète, Martina, adopterait une approche très différente de celle des trois autres. Selon elle, les arguments directs de Tom et Joe et l’argument indirect de Cal sont problématiques parce qu’ils traitent Dieu comme un objet d’argumentation rationnelle plutôt que comme une personne avec qui Sarah et Murali ont besoin d’avoir une relation.

Martina mettrait elle-même l’accent sur la relation qu’elle a avec eux plutôt que sur des arguments. Elle essaierait d’apprendre à les connaître et à les aider à voir les problèmes personnels sous-jacents à leurs questions et leurs objections. Par exemple, elle essaierait d’amener Sarah à se rendre compte qu’elle s’est déjà interrogée sur Dieu avant que son professeur de philosophie lui aie donné des munitions intellectuelles contre le christianisme. Était-ce Dieu qui semblait indifférent ou certains chrétiens qu’elle connaissait? Martina soulignerait probablement la compassion et l’amour de Dieu, qui sont bien plus importants que tout sentimentalisme humain. Dieu veut vraiment notre bien, même si ce bien est atteint par le biais de la souffrance.

Martina pourrait demander à Murali pourquoi, s’il pense que toutes les religions sont de bons moyens pour le même but, il ne semble pas suivre l’une d’eux sérieusement. La seule chose sur laquelle la quasi totalité des religions insiste, c’est un engagement personnel profond, et Murali ne semble pas l’avoir. Martina pourrait le mettre au défi d’examiner les différentes religions avec la question: dans laquelle peut-il s’engager pleinement? Martina, quant à elle, dirait probablement qu’elle refuserait de s’engager de manière absolue à toute autre philosophie ou religion. Dieu – le Dieu personnel qui parle, agit et nous a aimé en Jésus – est le seul digne de notre confiance et d’un engagement absolu.

Traduit par Paul Harrison. Tiré de Kenneth Boa et Robert Bowman: Faith Has Its Reasons: An Integrative Approach to Defending Christianity; An Apologetics Handbook

Stéphane Kapitaniuk

Pécheur et disciple sauvé par la mort de Jésus à ma place. Mari de Hanna, papa de Noah (8 ans), Théa (3 ans), Marie (1 an). Pasteur de formation et directeur général de BLF Éditions depuis 2021. J’aime bien lancer de nouvelles initiatives. Découvrez BLFKids.com, un projet spécial parents, ainsi que BLFAudio.com, la première librairie chrétienne de livres audio. Avec Hanna, nous avons aussi fondé ChezCarpus.com, la première librairie chrétienne de livres d’occasion. Je propose également plusieurs formations créées pour le logiciel biblique Logos.

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