Le gaslighting spirituel consiste à faire croire à quelqu’un des mensonges d’ordre spirituel.
Peut-être (ou sûrement) que vous n’avez jamais entendu parler du gaslighting. C’est une forme d’abus psychologique dans lequel un auteur tente de détourner ou déformer une information, en la présentant sous un autre angle. Le but étant de faire douter la victime quant à ses compétences cognitives comme sa mémoire, sa santé mentale, sa compréhension des choses, ou son fonctionnement cognitif.
Cette appellation un peu étrange (« Hantise » en français) provient d’un thriller psychologique, adapté d’une pièce de théâtre, dans lequel un mari accuse son épouse de perdre la tête, et la convainc d’une instabilité mentale. Il lui fait croire qu’elle est folle, et celle-ci se laisse persuader de cela.
Malheureusement, ce phénomène n’est pas seulement cantonné à la fiction, mais c’est une technique immorale et nocive que l’on retrouve parfois dans les couples, ou dans des sphères relationnelles proches.
Parfois, la manipulation ne va pas forcément vers la santé mentale et la folie, mais va plutôt pointer vers le péché et le salut des individus. À l’occasion d’accompagnement de couples, j’ai pu observer à trois reprises un procédé dans lequel le conjoint va tenter de persuader son épouse:
Je sais que certains se méfient des catégories « victime » et « auteur ». Généralement, dans un conflit nous sommes toujours entre les deux. Mais dans cette situation, il y a l’auteur de la manipulation, et celui qui la subit. Dans les cas que je connais, c’est unilatéral. Cela ne veut pas dire qu’il y a un pécheur et un saint. L’utilisation de ces termes est là pour préciser le sens des interactions et de la relation, dans ce type d’abus, j’observe que c’est toujours une personne qui assujetti une autre à cette pratique
Cette manipulation est particulièrement perverse, et j’aimerais pouvoir m’arrêter sur ces quelques réflexions pratiques:
Il est notamment avéré, et les conjointes le confessent, qu’elles ont eu un comportement inapproprié. Généralement, ces confessions sont accompagnées de demandes de pardon. Mais cela peut aller encore plus loin, quand le conjoint remet en cause la sincérité et la « pureté » des demandes de pardon qu’il -n’accepte pas-. Dans tous les cas, les faits relatés par les auteurs sont rarement inventés ou construits de toutes pièces.
Bien évidemment, il y a souvent une modification ou une manipulation des intentions. Parfois, il peut y avoir une réduction du contexte ou de la temporalité. Par exemple, l’auteur peut se plaindre que son épouse l’ait agressé verbalement en lui proférant du mépris et de l’énervement, sans souligner qu’il l’avait déjà harcelée pendant un long moment pour obtenir telle ou telle chose, ou encore qu’il lui avait reproché la qualité ou le goût du repas.
Oui la victime a eu un comportement inapproprié et non-intègre devant Dieu, mais souvent les auteurs tentent de manipuler la réalité afin de se faire passer pour la victime unilatérale, en omettant certains détails de la réalité. Cela leur permet également de se placer comme « juste », tout comme Jésus-Christ subissant les assauts de l’ennemi. Cela semble caricatural, mais malheureusement ça ne l’est pas.
C’est une situation difficile pour le conseiller. D’un côté, il y a une grande partie de lui qui voudrait prendre la défense de la victime, mais devant Dieu, il veut être juste en considérant aussi son péché.
Dans cette position, nous avons un sentiment d’injustice, mais qui ne devrait pas nous faire taire quant aux péchés éventuels de la victime. Le but n’est pas de faire une expiation humiliante et rabaissante, mais de se placer à la lumière de la Loi de Dieu. C’est extrêmement difficile, mais c’est aussi une démonstration pour la victime de ce qu’est la vie de disciple. Il s’agit alors de ne pas utiliser le contexte comme prétexte pour développer un victimisme qui ne serait pas intègre devant Dieu.
L’auteur peut développer un argumentaire en apparence solide sur la sanctification, estimant que si la victime était réellement régénérée, elle ne ferait pas telle ou telle chose. « Si tu aimais vraiment Jésus-Christ, alors tu ne me parlerais pas ainsi. » – « Si tu étais vraiment soumise comme une femme chrétienne, alors tu ferais ce que je te demande. »
Ce qui est particulièrement astucieux ici, c’est qu’il y a une partie de vérité biblique. Notre amour pour Jésus-Christ devrait nous pousser à la patience et la douceur. La soumission au mari devrait amener les femmes à un certain comportement (tout comme le sacrifice des époux vis-à-vis de leur épouse). Mais ces déductions ne devraient pas être isolées de tout autre élément. Dans le premier exemple, ce serait omettre notre cœur pécheur qui restera corrompu par le péché jusqu’à la fin de notre existence. La régénération du Saint-Esprit change radicalement notre direction de cœur, mais elle n’enlève pas nos mauvais désirs pécheurs que nous devons combattre jusqu’à la fin de notre existence.
De même, la soumission est d’abord vis-à-vis de Dieu, avec le discernement par la Parole de Dieu. Les femmes ne doivent pas accepter de se soumettre à n’importe quelle demande de leurs maris, sous le prétexte ou la pression de la soumission. Elles doivent le faire avec joie, tout en ayant à l’esprit qu’elles sont d’abord soumises à Dieu.
Enfreindre la loi de Dieu, par prétexte de la soumission au mari, doit être clairement refusé.
La sanctification est un processus long et parfois difficile qui demande du temps, et le salut de notre âme n’est conditionné que par l’œuvre parfaite de Christ, et non par nos propres œuvres. Nous devons refuser ce salut conditionnel.
Je vais encore reprendre un adage coutumier du site: En tant que conseillers, soyons particulièrement formés en théologie, afin de répondre à ce type d’accusation et de rassurer les personnes qui viendraient nous voir.
Justice serait faite, soit pour la victime qui subira le châtiment de Dieu, soit envers l’auteur qui sera « révélé comme saint » (et j’exagère à peine). Ce type de parole peut faire douter la victime. Elle peut douter de son propre discernement: « Finalement, qui suis-je pour juger s’il est mauvais ou non, si la situation est juste ou non, ou juger ce qu’il dit ou fait? »
Elle peut mettre en doute sa position dans la situation: « Est-ce que je ne suis pas trop dure avec lui? » – « Est-ce que je ne juge pas trop hâtivement? » – « Est-ce que c’est à moi de lui dire telle ou telle chose? »
Cette technique permet à l’auteur de s’extirper de toute évaluation humaine, et de dire certaines choses comme: « Dieu le sait » – « Je prends Dieu à témoin » – « Dieu connaît mon cœur… » Mais ce sentiment d’impunité ne devrait pas être un prétexte pour ne pas chercher à discerner le péché dans sa propre vie.
Ce premier article a permis de définir le concept, tout en donnant quelques exemples appliqués à la vie spirituelle du gaslighting. La semaine prochaine, nous reprendrons quelques éléments parmi les trois grandes thématiques données en exemple, pour les illustrer dans l’accompagnement biblique des victimes.
webinaire
Pornographie: comment accompagner les addicts?
Découvre ce replay du webinaire de Nicolas Frei a été enregistré le 7 mai 2020.
Orateurs
N. Frei