Grâce à la fameuse illustration d'Oscar Cullmann, le débarquement de Normandie (D-Day) revêt une signification toute particulière pour les chrétiens, engagés dans un combat spirituel.
Oui, les chrétiens ont aussi leur D-Day. Certes, une petite mise en contexte s’impose.
L’apôtre Paul dépeint ainsi la réalité quotidienne invisible de tous les chrétiens:
Car nous n’avons pas à lutter contre des êtres de chair et de sang, mais contre les Puissances, contre les Autorités, contre les Pouvoirs de ce monde des ténèbres, et contre les esprits du mal dans le monde céleste.
Éphésiens 6.12
À la lecture de ce verset, une question se pose immanquablement: pourquoi le combat spirituel est-il si rude alors que Christ a clairement été déclaré vainqueur par sa mort, sa résurrection, son exaltation et sa session à la droite de Dieu? Sa victoire est proclamée, on ne peut plus clairement, en Éphésiens 1.19-22:
Cette puissance, en effet, [Dieu] l’a déployée dans toute sa force 20en la faisant agir en Christ lorsqu’il l’a ressuscité et l’a fait siéger à sa droite, dans le monde céleste. 21Là, Christ est placé bien au-dessus de toute Autorité, de toute Puissance, de toute Domination et de toute Souveraineté: au-dessus de tout nom qui puisse être cité, non seulement dans le monde présent, mais aussi dans le monde à venir. 22Dieu a tout placé sous ses pieds, et Christ qui domine toutes choses […]
Éphésiens 1.19-22
L’explication est simple: comme beaucoup d’aspects de notre salut, la victoire de Christ participe à la tension entre le déjà et le pas encore de l’œuvre rédemptrice de Dieu.
Christ est déjà victorieux. Nous le constatons en lisant Éphésiens 1.19-22. Suite à sa résurrection, il siège à la droite de Dieu dans le monde céleste, au-dessus de toute Autorité, de toute Puissance, de toute Domination et de toute Souveraineté. D’après Éphésiens 1.22, tous ses ennemis ont été placés sous ses pieds.
Pourtant, en Éphésiens 6.10-20, Paul nous rappelle que les chrétiens ont à lutter contre les esprits du mal dans le monde céleste – ces esprits mêmes qui ont été défaits par Christ. Ainsi, les fruits de la victoire de Christ ne sont pas encore complètement apparents.
Une célèbre illustration nous aidera à mieux apprécier la situation. C’est Oscar Cullmann, professeur de Nouveau Testament aux universités de Strasbourg et de Bâle entre 1930 et 1972, qui l’a proposée. En référence à la Seconde Guerre mondiale, Cullmann a rappelé la différence entre le jour J (en anglais D-Day) et le jour V (plus précisément le V-E Day, Victory in Europe Day, le « Jour de la Victoire en Europe »).
Le 6 juin 1944, qui a marqué le début du débarquement des forces alliées en Normandie, fut appelé le « jour J ». Une fois le débarquement réussi, la victoire était déjà certaine. La Seconde Guerre mondiale avait pris un nouveau tournant. Son issue imminente était irréversible.
Pourtant, la victoire complète n’était pas encore établie au vu et au su de tous. Il fallut attendre le 8 mai 1945, le « jour V » (pour victoire) – et de nombreuses batailles sanglantes, dont certaines parmi les pires de toute la guerre –, pour que les hostilités prennent fin définitivement et que le succès de l’intervention fût totalement manifeste.
Dans le combat spirituel, l’Église a déjà vécu son jour J – celui de J**ésus, pour ainsi dire: le jour de la résurrection, le « début de la fin » pour le Diable. Néanmoins, le jour V – associé au retour de Christ (« V**iens, Jésus! ») – n’a pas encore eu lieu. En cette période intermédiaire, les batailles font rage.
Or, nous connaissons par avance l’issue de la guerre. L’ennemi combattu est un opposant déjà vaincu. Notre responsabilité n’est pas de remporter la victoire (cette dernière est acquise); c’est simplement de « tenir ferme » et de « résister » (Ép 6.11, 13). Nous combattons à titre de vainqueurs officiels, en vertu de notre union avec Christ.
Ndlr: billet publié pour la première fois le 4 juin 2019 et remis en avant le 3 juin 2023 avec une mise à jour des liens.