Le sermon sur la montagne est probablement la prédication la plus populaire au monde! Il s'agit d'un enseignement de Jésus que l’on trouve dans Matthieu 5 à 7. Voici quelques clés pour bien le comprendre.
Le sermon sur la montagne contient de nombreux dictons célèbres qui ont fait leur chemin dans le langage populaire: "tendre l’autre joue" (Mt 5.39), "à chaque jour suffit sa peine" (Mt 6.34), "qui cherche trouve" (Mt 7.7), "faites aux autres ce que vous voulez qu’ils fassent pour vous" (Mt 7.12).
Plusieurs réactions sont possibles face au sermon sur la montagne. D’un côté, on peut le voir comme un idéal de vie impossible à atteindre. On peut admirer ce que Jésus enseigne, tout en se disant que c’est bien trop exigeant pour que l’on puisse vivre selon ce qu’il demande. De l’autre côté, certains peuvent être choqués par les exigences morales que Jésus met en avant: elles semblent extrêmes par rapport à la manière dont le monde vit aujourd’hui. Comment Jésus ose-t-il exiger cela!?
J’aimerais nous encourager à avoir la bonne réaction face au sermon sur la montagne. Cet article vise à donner quelques clés pour nous aider à le comprendre et à l'apprécier de la bonne manière.
Une mauvaise manière de comprendre le sermon sur la montagne serait de penser qu’il est semblable à une offre d’emploi. Une offre d’emploi décrit les conditions nécessaires à remplir pour obtenir un poste en termes de compétences, d’expérience, et de qualités. Il faut simplement cocher les cases.
Il serait tentant de voir le sermon sur la montagne comme l’offre d’emploi d’un disciple: Jésus y décrit le niveau à atteindre afin d’être véritablement un de ses disciples, les conditions à remplir pour faire partie du royaume des cieux. Cependant, une telle manière de penser est bien loin de la pensée biblique. Le royaume des cieux n’est pas quelque chose que l’on obtient, mais quelque chose que l’on reçoit par grâce. Le but de Jésus n’est pas de nous charger d'un lourd fardeau, mais plutôt d’apaiser ceux qui sont fatigués et chargés (cf. Mt 11.28-30).
Il est plus utile de considérer le sermon sur la montagne comme la "fiche de poste" d’un disciple. Une fiche de poste décrit ce qui est attendu d’un employé une fois qu’il a déjà obtenu le travail. C’est cela qu’est le sermon sur la montagne pour nous.
Voici comment le sermon sur la montagne est introduit:
1 Voyant la foule, Jésus monta sur la montagne, il s'assit, et ses disciples s'approchèrent de lui. 2 Puis il ouvrit la bouche et se mit à les enseigner...
Matthieu 5.1-2
L'enseignement de Jésus dans ce sermon s'adresse premièrement à ses disciples. Comme un commentateur l’écrit:
Le sermon sur la montagne parle du caractère, des devoirs, des attitudes et des dangers du disciple chrétien. C'est un manifeste qui expose la nature de la vie dans le royaume des cieux.¹
Le sermon sur la montagne décrit ce à quoi ressemble la vie au sein du royaume des cieux, comment vivre maintenant que l’on est disciple de Jésus. Autrement dit, il ne présente pas une liste de cases à cocher pour être acceptés par Dieu (comme si une telle liste existait!), mais s’adresse à ceux qui font déjà partie du royaume, à ceux qui ont déjà eu un cœur changé par la grâce.
Il est possible de voir le sermon sur la montagne comme une collection de phrases importantes dites par un philosophe de qualité. Cependant, penser cela reviendrait à passer à côté de l’essentiel…
Beaucoup veulent l’éthique que Jésus a enseignée tout en rejetant Jésus lui-même. Mais on ne peut pas dissocier ce qu’il a dit de qui il est. Jésus n’est pas un simple philosophe qui aurait prononcé quelques belles phrases pour créer un monde meilleur. Ou quelqu’un dont on peut lire le livre, en piocher ce qu’on veut et mettre le reste de côté. Non, Jésus est le Seigneur de son peuple, qui appelle des disciples à le suivre.
C’est ce que l’on voit depuis le tout début de l’évangile de Matthieu. Jésus est celui qui sauvera son peuple de ses péchés (Mt 1.21). Il appelle à se repentir, parce que le royaume est venu (Mt 4.17). Dans la fin du chapitre 4, il appelle ses disciples à le suivre et fait des miracles en abondances. Il ne s’agit pas de n’importe qui!
De plus, le sermon sur la montagne présente Jésus comme "plus grand que" Moïse. Il monte sur la montagne, comme Moïse l’a fait (Mt 5.1, voir Ex 19.3; 24.18; 34.4). Mais contrairement à Moïse, la révélation vient de lui-même!
Bref, avant tout, ce que le sermon sur la montagne nous présente, ce n’est pas une liste de règles, mais une personne: le roi sauveur de son peuple.
Il peut être tentant de voir le sermon sur la montagne comme un idéal de vie impossible à atteindre, réservé aux plus matures.
Pourtant, le sermon sur la montagne termine avec des images qui encouragent à entrer par la porte étroite, à suivre le bon chemin, à construire sa vie sur le roc (Mt 7.13-27). Cette conclusion nous encourage à mettre en pratique le sermon sur la montagne. Cela signifie qu’il n’est pas réservé aux super-chrétiens (qui d’ailleurs n’existent pas), mais adressé à chaque chrétien.
De plus, les premiers mots du sermon sur la montagne montrent l’attitude fondamentale du disciple:
Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux!
Matthieu 5.3
Les disciples sont ceux qui sont pauvres en esprit, reconnaissant leur pauvreté spirituelle et leur besoin profond de Dieu en toute chose. C’est là que commence l’obéissance au sermon sur la montagne.
Il est utile de considérer le sermon sur la montagne comme un texte de sagesse, c’est-à-dire un texte qui nous montre une manière de vivre qui honore Dieu, afin de nous inviter à vivre de la même manière. Jésus met en avant la bonne manière de vivre, ce qui est juste, afin d'encourager la poursuite de la vertu chez ceux qui l’écoutent. Autrement dit, il faut regarder au-delà des règles et voir quel type de personne Jésus nous encourage à être.
Voici trois exemples de cela:
Premièrement, la conclusion du sermon sur la montagne (Mt 7.13-27) met en avant deux manières de vivre, avec deux issues possibles: la destruction éternelle ou le salut éternel. Le sermon sur la montagne nous encourage à choisir le bon chemin, un peu comme le Psaumes 1 le fait, ou encore le contraste entre le juste et le méchant qui se retrouve dans les Proverbes.
Deuxièmement, les béatitudes (Mt 5.1-12) présentent un portrait du disciple. Il ne s’agit pas de qualités différentes que différents disciples auraient, et il ne s’agit pas non plus de qualités que nous possédons à 100 %. Dans leur ensemble, elles montrent à quoi ressemble un disciple: il est caractérisé par ces choses (pauvreté d’esprit, douceur, miséricorde, cœur pur, etc.) – un peu comme le fruit de l’Esprit dans Galates 5.
Troisièmement, des passages comme Matthieu 5.39-42 nous mettent en garde contre une approche "littéraliste". Il faut lire la Bible de manière littérale lorsque c’est là l’intention de l’auteur, mais aussi reconnaître que ce n’est pas toujours le cas (comme lorsque Jésus dit: "Je suis la porte"). C’est pareil dans ce passage: Jésus ne donne pas de règle absolue qui s’appliquent de manière identique à chaque situation. Il nous montre plutôt quel type de personne être, quelles qualités poursuivre. Il transmet une sagesse générale qui s’appliquera différemment à différentes situations.
Dans le sermon sur la montagne, Jésus transmet la sagesse à ses disciples. Cependant, ce n’est pas n’importe quelle sagesse: c’est la sagesse du royaume prononcée par le Roi Jésus, qu’il faut écouter et mettre en pratique, car c’est là le chemin de la vie (Mt 7.13-27).
L’un des versets clés du sermon sur la montagne se trouve dans Matthieu 5.20. Voici ce que Jésus dit à ses disciples:
Car je vous le dis, si votre justice n'est pas supérieure à celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux.
Le mot "justice" peut avoir plusieurs sens. Souvent, nous pensons à la justice que Paul décrit dans ses lettres: nous sommes déclarés justes devant Dieu, revêtus de la justice de Jésus. La justice a alors un sens judiciaire: la perfection, le fait d’être libre de la culpabilité du péché, en règle avec Dieu.
Ce n’est pas le sens du mot "justice" dans le sermon sur la montagne. Ici, la justice est personnelle, dans le sens de la pratique de bonnes œuvres. C’est ce que Jésus dit dans Matthieu 6.1: il parle de "pratiquer la justice" comme synonyme de faire des choses qui honorent Dieu.
Dans Matthieu 5.20, Jésus encourage donc ses disciples à avoir une justice (une manière de pratiquer ce qui est juste) qui est supérieure à celle des scribes et des pharisiens. Est-ce vraiment possible de surpasser ces professionnels de la religion? Ne sont-ils pas tout en haut de l’échelle de la justice?!
Jésus montre cependant que la justice des pharisiens est seulement extérieure: c’est de l’apparence religieuse. Au chapitre 6, Jésus dénonce les hypocrites qui font de bonnes choses (donner, prier, jeûner) mais simplement pour être vus par les hommes. Ces hypocrites, ce sont les scribes et les pharisiens, comme Jésus l’explique plus tard (Mt 23).
Ainsi, avoir une justice supérieure à celle des scribes et des pharisiens, c’est avoir une justice intérieure et extérieure. C’est le cœur qui compte. On le voit à plusieurs reprises:
Ainsi, les belles œuvres du disciple ne doivent pas juste être extérieures: elles doivent provenir de l’intérieur. Sans une telle justice, dit Jésus, ils ne pourront pas entrer dans le royaume des cieux.
À la suite de plusieurs commentateurs, il est utile de repérer l’encadrement qui se trouve entre Matthieu 5.20 et Matthieu 7.12, avec la répétition du terme "la loi et les prophètes". C’est ce qui détermine le début et la fin du cœur du discours de Jésus. Avant cela, nous avons une introduction (Mt 5.1-16), et après cela, une conclusion (Mt 7.12-29).
1. R. T. France, Matthew: An Introduction and Commentary, vol. 1, Tyndale New Testament Commentaries (Downers Grove, IL: InterVarsity Press, 1985), p.111.
2. Je m’appuie ici sur les remarques de Jonathan T. Pennington, The Sermon on the Mount and Human Flourishing: A Theological Commentary, Paperback edition (Grand Rapids, Michigan: Baker Academic, 2018).
webinaire
1h pour comprendre Matthieu
Cet épisode d’1h pour comprendre… de Matthieu Giralt et de Pascal Denault enregistré le 11 décembre 2019, te fait (re)découvrir les l’Evangile de Matthieu. Laisse-toi surprendre par la cohérence, la profondeur et la richesse de la Parole de Dieu. L’objectif, c’est que tu puisses comprendre l’ensemble pour mieux vivre l’essentiel.
Orateurs
P. Denault