Récemment, j’ai étudié le livre du prophète Joël pour un devoir. Le thème central du livre est le jour du Seigneur, qu’on voit décliné dans deux réalités dans le livre: une réalité historique (ch 1-2) et une réalité eschatologique (ch 3-4). J’ai beaucoup aimé ce passage du commentaire de Sylvain Romerowski qui pose la question de la relation entre catastrophes naturelles et jugements de Dieu.
Des catastrophes naturelles s’abattent en tous temps sur l’humanité avec leurs conséquences tragiques et douloureuses. Sont-elles l’empreinte d’un hasard absurde gouvernant pour ainsi dire le monde? Joël nous invite à les considérer comme l’expression de la sainte et juste colère du Seigneur, et donc comme révélation de Dieu. D’autres textes bibliques interprètent divers fléaux, cataclysmes ou catastrophes comme des châtiments divins dirigés contre le peuple de Dieu ou contre le monde (les écrits des prophètes, l’Apocalypse…).
Ces jugements ont un caractère partiel et imparfait: si dès à présent la colère divine se manifeste du ciel contre toute impiété et toute injustice humaine (Rm 1.18), en même temps s’amasse un capital de colère en vue de la manifestation finale du jugement de Dieu (Rm 2.5). De plus ces jugements atteignent inégalement les individus, de sorte qu’il arrive souvent aux justes d’être traités selon le fait des méchants et inversement (Ec 8.14). Nous ne voulons donc commettre l’erreur des amis de Job, qui énonçaient comme une règle absolue que la souffrance a pour cause le péché de celui qui souffre. « Ce n’est pas que lui ou ses parents aient péché » répondait Jésus à ses disciples au sujet d’un aveugle de naissance (Jn 9.3).
Cependant l’histoire a un sens. Elle n’est pas livrée à l’arbitraire. Le malheur est entré dans le monde par la désobéissance au Seigneur et il reste lié à la désobéissance, de manière ambiguë cependant: il peut manifester le caractère mauvais à l’extrême, scandaleux, du mal, lorsqu’il frappe des « innocents » – mystère incompréhensible de la souffrance – ou révéler la colère du Seigneur qui exerce ses jugements et règle déjà une partie de ses comptes.
« Si un Dieu d’amour existait, il n’y aurait pas tant de souffrance dans le monde. » Celui qui raisonne ainsi a-t-il bien saisi la réalité de la culpabilité humaine? A-t-il su lire l’expression de la colère du Dieu saint? Il est vrai cependant que cette lecture est rendue difficile par le fait que la colère divine sur le monde se manifeste souvent globalement plutôt qu’au cas par cas. Et il reste vrai surtout que le problème de la souffrance tient en échec nos efforts de rationalisation.
L’amour divin se manifeste par contre en ce que le monde subsiste malgré le péché et les désordres qu’il engendre. La subsistance du monde n’est-elle pas d’ailleurs une indication de la volonté de salut du Seigneur? L’amour divin se manifeste justement encore par l’ouverture d’une voix de salut, celle de la repentance. D’ailleurs les prophètes soulignent bien que les châtiments divins ont un but pédagogique, et visent à ramener son peuple à lui (Os 2.1-23; Am 4.6-8), ou interpellent le monde pour qu’il se repente (Ap 9.21; 16.11).
Dieu murmure dans nos plaisirs, il parle dans notre conscience, mais il crie dans nos souffrances: c’est son mégaphone pour faire sortir de son indifférence un monde sourd. (CS Lewis, The problem of pain, NY: Mac Millan, 1962, p. 93)Saurons-nous écouter la parole du Maitre commentant deux catastrophes ayant causé plusieurs morts?Ceux qui sont morts n’étaient pas de plus grands pécheurs que les autres. Mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous de même. (Lc 13.1-5)