J’ai vraiment apprécié cet article de mon ami Frédéric Mondin, rédacteur de la revue Promesses et secrétaire d’édition aux éditions BLF. Il a accepté que son article soit publié ici en intégralité.
Le monde regorge de fanatiques aveuglés par leur « zèle pour Dieu, mais sans intelligence » (Rm 10.2; cf. Jean 16.2). Leur but est terrestre: ils ciblent des hommes. Ceux qui pensent différemment d’eux. À l’inverse, la Bible prône une religion intelligente parce que dirigée vers le haut.
Qu’avons-nous de commun avec eux? Selon le Maître, nous sommes meurtriers lorsque nous provoquons des querelles, empêtrés dans nos discussions folles et inutiles (Mt 5.21-22; 2 Tm 2.23). Dieu nous en garde lorsque nous nous décentrons de nous-mêmes pour concentrer nos priorités sur un seul intérêt: la gloire de Dieu. Combien de temps me faut-il encore pour saisir que la finalité n’est pas l’homme, mais Dieu?
Serions-nous des fanatiques qui s’ignorent, lorsque nous utilisons nos connaissances théologiques comme des armes? À quoi bon connaître la vérité si ce n’est pas pour combattre le mensonge dans l’Église? Comment défendre « la vérité de l’Évangile » (Ga 2.5, 14) selon le Seigneur?
Dieu recherche des adorateurs en vérité (Jn 4.23): la connaissance vraie de Dieu nourrit la vérité de l’adoration. Chaque fois que nous en apprenons davantage sur Dieu, donnons-nous la liberté et le privilège de prendre le temps de nous arrêter et de tomber en adoration. La vraie théologie mène à l’adoration. Le croyant qui ouvre sa Bible entrebâille la porte du temple céleste, et doit s’attendre à entrer dans la présence du Dieu saint. Qu’est-ce qui me motive à ouvrir ma Bible? Mon attitude spirituelle fera de ce moment une lecture aussitôt oubliée, un savoir cumulé mais stérile… ou une rencontre qui me transformera encore un peu plus.
Comment ne pas adorer Dieu quand nous entrons dans sa présence sainte? Chaque ligne de la Bible, chaque phrase, sont marqués du sceau de la divinité (2 Tm 3.16; 2 P 1.21). Inspiré par l’Esprit saint en lui, l’apôtre Paul ne rédigeait pas de la théologie pour remplir les têtes de ses lecteurs, mais pour transformer leurs cœurs (1 Co 14.20; Col 4.12; etc.). Les épîtres de Paul ne sont certes pas faciles d’accès. Toutefois, la complexité harmonieuse de leur architecture et la solidité des vérités qu’elles révèlent ne saurait masquer toute l’adoration, toute l’émotion, et l’intense spiritualité qui en émanent.
Pour écrire à propos de Dieu, Paul puise dans cette intense communion qu’il cultive avec son puissant Sauveur et Seigneur. Ses écrits sont régulièrement ponctués de prières. Il lui est même arrivé de s’arrêter au beau milieu d’un raisonnement (Ép 3.1 est une phrase inachevée, peut-être reprise au verset 14), émerveillé par « les richesses incompréhensibles de Christ » (v. 8), et finissant, débordant de reconnaissance, par s’agenouiller dans une prière prodigieusement émouvante (v. 14-21).
La théologie de Paul révèle aussi bien son intelligence que ses émotions. Il veut connaître Dieu pour mieux le célébrer et l’adorer. Pour mieux être bouleversé par ce qu’il apprend de son Créateur. C’est cette connaissance vivante qu’il tente de transmettre, par toutes sortes de figure de styles, de métaphores, de mots tirés à l’extrême, en en appelant à la raison, aux émotions, etc.
Les écrivains sacrés, peuvent différer dans l’expression de leur théologie, mais tous, après avoir palpé l’Ineffable, ne peuvent se contenir en cherchant leurs mots. Leur cœur reconnaissant commence par exprimer une louange vibrante qui finit par éclater à la gloire de Dieu. Cette prière particulière, les théologiens l’appellent une doxologie (litt.: discours sur la gloire).
– Lorsque Moïse célèbre la délivrance que Dieu opère en engloutissant les Égyptiens dans la mer Rouge (Ex 15), il conclut ainsi: « L’Éternel est roi pour toujours et à jamais! » (v. 18 – transcription libre).
– David, après la révélation du prophète Nathan sur sa future dynastie, tombe en adoration et délivre une magnifique prière, dont une doxologie (2 S 7.22);
– La louange du psaume 146 se conclut ainsi: « L’Éternel règne éternellement; Ton Dieu, ô Sion! subsiste d’âge en âge! Louez l’Éternel! » (v. 10).
– Une doxologie conclut chacune des quatre parties du psautier: Ps 41.13; 72.19; 89.52; 106.48, et Ps 150.1, sans compter que ce dernier semble servir de conclusion finale, une doxologie à elle seule pour la collection des quatre livres des psaumes.
– Jésus en personne enseigne à conclure nos moments avec Dieu par une doxologie: « »Car c’est à toi qu’appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen! » (Mt 6.13).
– Les doxologies concluent (ou ponctuent) plusieurs livres du NT: Rm 16.27; Ph 4.20; 1 Tm 6.16; 2 Tm 4.18; Hé 13.21; 1 P 5.11; 2 P 3.18; Jd 1.25;
– Les doxologies figurent aussi en bonne place dans l’Apocalypse (Ap 1.6; 4.8; 5.13; 7.12).
De toute évidence, la plupart des doxologies concluent un passage, voire un livre entier. Pourquoi ? Eh bien, finalement, quoi de plus normal que de tomber à genoux dans l’adoration après avoir rencontré Dieu? Après l’avoir connu un peu mieux? L’adoration est une conclusion toute légitime. En ce sens, la théologie a pour but la doxologie.
La célébration du Dieu glorieux est le but de toute connaissance sur Dieu. Et c’est au sein de cette gloire que les hommes retrouveront des relations harmonieuses (cf. Ép 2.14-18). Nous avons besoin de suivre le modèle de ces hommes de la Bible qui ponctuent leurs écrits de doxologies.
Comme l’écrit le puritain anglais du 17e s. John Owen, ils méditent Dieu avec Dieu. Ils ne manipulent pas des concepts théologiques abstraits, mais tout en eux respire Dieu: leurs mots, leurs méditations, leurs chants, leurs psaumes et leurs exhortations. Les écrivains sacrés ne font pas qu’enseigner des doctrines. Ils excitent notre appétit spirituel, raniment la flamme de l’Esprit en nous, stimulent son ardent désir de nous révéler plus amplement une Personne infinie et infiniment aimable. Leur objectif est celui de l’Esprit divin planté en nous : toujours mieux connaître Dieu pour toujours mieux l’adorer et lui rendre gloire. Y a-t-il plus noble activité que la lecture des écrivains sacrés dans un esprit bien orienté, désireux d’apprendre toujours davantage à mieux célébrer la gloire de son Créateur?
La connaissance sans une vraie relation enorgueillit (1 Co 8.1); elle peut alors s’exprimer dans des discussions folles et inutiles, provoquant des querelles, voire des divisions. Le zèle sans intelligence affaiblit l’œuvre de Dieu. Or, la théologie a pour but la doxologie. Désirons-nous « combattre » le mensonge? Faisons-le en défendant la vérité. Théologien ou non, nous avons tous l’arme absolue: notre vie à la gloire de Dieu. La louange vivante que nous sommes (en paroles et en actes) vaut bien quelques traités doctrinaux. Comment devenir une louange vivante? En plongeant nos regards dans les merveilles de la Parole avec ce seul objectif en tête : apprendre à mieux célébrer la gloire de notre Créateur, Sauveur et Seigneur. Demandons à Dieu ce discernement lorsque nous ouvrons la Bible (Ps 119.18). Demandons-lui de le rencontrer dans notre lecture, et d’être si émerveillés que notre cœur se mette à le glorifier à travers des prières de louange et d’adoration (prions pour des… doxologies !)
Alors, cette connaissance ne sera pas « meurtrière ». Au contraire, dans la douceur du Christ qui bâtit son Église, nous saurons répondre de façon à édifier (Col 4.6; 2 Tm 2.25; etc.).
webinaire
Comment organiser des cultes pour chrétiens et non chrétiens?
Ce replay du webinaire de Stéphane Kapitaniuk et Franck Godin a été enregistré le 3 juillet 2018.
Orateurs
F. Godin et S. Kapitaniuk