Le Sabbat chrétien (1/5)

Théologie de l’allianceSabbat

La circoncision n’est rien, l’incirconcision n’est rien, mais l’observation des commandements de Dieu est tout. (1Co 7.19)

Celui qui appartient à Christ a donc les commandements de Dieu écrit, non par sur une table de pierre, mais sur son cœur. L’Esprit lui a donné vie et le rend capable, dans cette vie, d’obéir à cette loi. Chacun des dix commandements est écrit sur notre cœur pour que nous lui obéissions.

Dans l’absolu, nous pourrions dire que cela n’est pas vraiment contesté dans le monde évangélique. Si je disais que Christ m’avait affranchi de la loi dans son ensemble et qu’il m’était permis d’adorer un autre dieu, de tuer, de voler, de commettre un adultère, beaucoup verraient que cela est une insulte à Christ.

Pourtant, dire que l’on respecte le sabbat ne provoque pas la même réaction. Cette déclaration provoque le plus souvent d’abord de la surprise. Puis, quelques fois, les mots d’insulte ultimes du monde évangélique: « pharisien » et « légaliste », s’ils ne sortent pas de la bouche de celui qui entend cela, sont présents dans son cœur.

En général, le chrétien évangélique accepte et trouve nécessaire de prendre un jour de repos, mais il ne lie pas ce repos à un jour particulier de la semaine. Tous les jours seraient égaux selon Romains 14 et Colossiens 2, chacun peut donc choisir le sien et peut même le changer selon ses obligations et envies du moment. Le sabbat était un signe de l’Ancienne Alliance, Jésus nous en aurait libéré parce qu’il nous a acquis le repos. De toute manière, s’il fallait prendre un jour particulier, il n’y aurait aucune base biblique pour que ce soit le dimanche, le sabbat serait le samedi.

J’aimerais dans les deux prochains articles répondre à deux objections, celle du légalisme et celle qu’il n’y aurait pas de base biblique pour que le jour du sabbat soit le dimanche dans la Nouvelle Alliance. Les articles suivants – qui traiteront du sens et de l’application du sabbat – répondront aux affirmations que Jésus nous aurait libéré du principe du sabbat.

Légalisme?

Commençons par l’accusation de légalisme. Elle est de plus en plus souvent utilisée à tort et à travers dans le monde évangélique. L’usage le plus triste que ce mot prend est qu’il sert d’insulte pour désigner quelqu’un qui serait minutieux dans l’obéissance à la loi de Dieu.

Mais rappelons nous ce que Paul disait:

La circoncision n’est rien, l’incirconcision n’est rien, mais obéir aux commandements de Dieu est tout.

Si Dieu nous commande quelque chose, nous devons le faire, c’est notre vie. Être chrétien ne nous en affranchit pas. Au contraire, il nous rend encore plus responsable d’y obéir car Christ est mort à cause de notre désobéissance et pour nous graver les commandements de Dieu dans le cœur.

Le légaliste n’est pas celui qui observe minutieusement les commandements de Dieu. Si cela était la définition d’un légaliste, notre Seigneur, qui disait que de convoiter dans mon cœur était un adultère, serait le pire des légalistes.

Le légaliste est celui qui considère que la loi de Dieu est un moyen de salut mais qui, ne pouvant l’atteindre, crée d’autres lois. De plus il impose aux autres la loi qu’il s’est ainsi créée.

Notre Seigneur a dit que celui qui supprimerait l’un de ces plus petits commandements, et qui enseignerait aux hommes à faire de même serait appelé le plus petit dans le royaume des cieux; mais celui qui les observerait et qui enseignerait aux autres à faire de même serait appelé le plus grand dans le royaume de Dieu (Mt 5.19-20).

La position défendue ici n’est pas de dire que respecter le sabbat nous envoie au ciel. Christ est mort parce que je n’ai jamais respecté ce sabbat. Christ est mort pour me graver ce sabbat dans le cœur. Certains seront sauvés bien qu’ils auront enseigné à ne pas observer le sabbat, mais dans sa grâce, Dieu leur offrira le royaume quand même.

La position défendue ici n’est pas donc pas du légalisme. Une seule question est importante: Est-ce un commandement de Dieu? Est-ce que la Nouvelle Alliance nous commande d’obéir à ce commandement? Est-ce que le maître du sabbat considère que c’est un des commandements qu’il nous faut obéir?

La présence du sabbat sur les tablettes de pierre nous l’impose. L’Ancienne Alliance contenait deux types de commandements:

  1. ceux que Dieu a dit à tout le peuple du haut de la montagne au milieu des éclairs, qu’il a écrits sur des tables de pierre et
  2. ceux qu’il a confiés à Moïse seulement, qui ont été écrits dans le livre de l’alliance.Les commandements sur les tables de pierre ont été écrits sur notre cœur, les autres ont été annulés par la mort de Christ qui a mis fin à l’ancienne alliance pour en établir une nouvelle. (Dt 4.10-14; Dt 5; Dt 6.1-4; Dt 10.1-5; Dt 12.1; Dt 31.24-26; Jé 31.29; 2 Cor 3; Hb 7.11-12; Hb 9.1-2, 16-26; Ac 10.9-16, 28-29; Ac15; Ga 3.6-18).

Puisqu’aucun passage ne nous dit que la loi de Dieu a été modifiée, que le sabbat n’en fait plus partie, le sabbat en tant que tel n’a pas cessé.

Puisque le chrétien doit toujours obéir au sabbat, comment doit-il le faire? Quand doit-il le faire? L’Église qui a, historiquement, célébré le dimanche se trompe-t-elle? Devrions nous respecter le sabbat le samedi? Sommes nous libres du jour? Nous voulons montrer maintenant qu’il est nécessairement contenu dans l’écriture que le sabbat, dans la Nouvelle Alliance, a lieu le dimanche.

Les doctrines contenues de façon nécessaire dans l’Écriture

Tous nos enseignements doivent être expressément consignés dans l’Écriture ou y être contenues nécessairement. L’expression « contenues nécessairement » décrit les doctrines qui sont contenues dans l’Écriture, non pas de manière explicite, mais qui sont imposés par ses autres enseignements.

Les femmes peuvent elles prendre la Cène? Il n’est écrit nul part qu’elles le peuvent, ni qu’elles ne le peuvent pas. Et les enfants? Nous sommes dans la même situation. Que fait-on des enfants des chrétiens? Faut-il les baptiser bébé? Si oui, quand? Faut-il attendre qu’ils deviennent chrétiens? Cela n’est explicitement dit nulle part.

Comment répond on à ces questions? Nous commençons par développer une théologie de l’Église et des sacrements avec les données du Nouveau Testament.

Cette théologie nous dit que l’Église est composée de ceux qui appartiennent à la Nouvelle Alliance. Nous nous apercevons que le baptême et la Cène sont à administrer à ceux qui font partie de la Nouvelle Alliance. Le baptême remplace la circoncision de l’Ancienne Alliance (c’est la porte d’entrée dans l’Alliance), la Cène remplace la Pâque (en tant que célébration de la délivrance permise par l’Alliance déjà conclue).

Par contre, si dans l’Ancienne Alliance le peuple de Dieu était composée de familles de croyant, dans la Nouvelle, c’est une seule famille de croyant. De plus, la circoncision était un sceau, pour Abraham, de sa foi existante mais, dans la Nouvelle Alliance, ce sceau est l’Esprit lui-même (Ép 1.14). Dans l’Ancienne Alliance, le peuple était constitué de descendants physiques d’Abraham circoncis de corps, dans la Nouvelle, il est constitué de ceux qui sont en Christ, circoncis de cœur (Ép 2.11-22; Rm 2.29). Si nous entrions dans l’Ancienne Alliance par la foi ou la naissance physique, nous rentrons dans la Nouvelle Alliance uniquement par la foi créée par la nouvelle naissance. Nous pouvions être dans l’Ancienne Alliance si nous avions Abraham pour père, nous ne pouvons rentrer dans la nouvelle que si nous avons Dieu pour Père.

Nous en concluons donc que les femmes croyantes font parties de la Nouvelle Alliance mais que les enfants des croyants n’en font pas parties de naissance. Ainsi, nous accordons la Cène aux femmes croyantes qui font parties du peuple de Dieu mais pas aux enfants qui ne manifestent pas de foi. Nous faisons de même pour le baptême. Nous accordons la Cène et le baptême à ceux qui, autant nous pouvons en juger, possèdent l’Esprit qui marque le peuple de Dieu.

Ainsi, dire que nous pouvons permettre aux femmes de prendre la Cène et même que nous  péchons si nous leur interdisons n’est pas expressément dit dans l’écriture mais y est contenue nécessairement à cause de la théologie explicite du baptême et de l’Église.

Nous voulons montrer que la doctrine d’un sabbat chrétien qu’il faudrait célébrer le dimanche est nécessairement contenue dans l’Écriture.

Nous procéderons en deux étapes. Aujourd’hui, nous allons observer ce qu’est le Sabbat dans l’Ancienne Alliance: une célébration de Dieu comme créateur et rédempteur. Le prochain article nous montrera que le Nouveau Testament nous impose de croire que le Sabbat continue mais que la résurrection de Christ change le jour de ce sabbat. En effet, sa résurrection est le début d’une nouvelle création et d’une nouvelle rédemption qui ont eu lieu, non pas le dernier jour de la semaine (le samedi), mais le premier (le dimanche).

Le sabbat juif: Une célébration de la Création et de la Rédemption d’Égypte par le peuple assemblé

Lévitique 23 nous enseigne quelles étaient les fêtes qui devaient être célébrées par le peuple de l’Ancienne Alliance. Ces fêtes sont des « saintes assemblées » (Lv 23.2). La première de ces fêtes qui soit nommées est le sabbat (Lv 23.3-4). Par rapport à la Pâque, par exemple, le sabbat ne nécessitait pas que tout le peuple se rassemble à Jérusalem. C’était donc une fête qui se célébrait dans chaque localité.

Nous pouvons donc en déduire que dans l’Ancienne Alliance:

  • Le sabbat est quelque chose dans lequel le peuple de Dieu doit se réjouir, c’est une fête, au même titre que la fête des moissons. Respecter le sabbat, c’est le considérer comme un plaisir (Es 58.13).
  • Le sabbat est quelque chose de collectif, une assemblée en tant que peuple de Dieu. Quand le peuple de Dieu s’assemblait le jour du sabbat, celui qui n’assistait pas au rassemblement désobéissait à Lévitique 23.3-4.

Deux autres passages sont intéressants pour notre propos. Ce sont les deux versions du 4ème commandement:

Tu travailleras six jours, et tu feras tout ton ouvrage.Mais le septième jour est le jour du repos de l’Éternel, ton Dieu: tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bétail, ni l’étranger qui est dans tes portes. Car en six jours l’Éternel a fait les cieux, la terre et la mer, et tout ce qui y est contenu, et il s’est reposé le septième jour: c’est pourquoi l’Éternel a béni le jour du repos et l’a sanctifié.

– Ex 20.8-11

Tu travailleras six jours, et tu feras tout ton ouvrage. Mais le septième jour est le jour du repos de l’Éternel, ton Dieu: tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton boeuf, ni ton âne, ni aucune de tes bêtes, ni l’étranger qui est dans tes portes, afin que ton serviteur et ta servante se reposent comme toi. Tu te souviendras que tu as été esclave au pays d’Égypte, et que l’Éternel, ton Dieu, t’en a fait sortir à main forte et à bras étendu: c’est pourquoi l’Éternel, ton Dieu, t’a ordonné d’observer le jour du repos.

– Dt 5.13-15

Nous voyons donc que, dans ces passages, deux raisons nous sont données pour observer le sabbat:

  1. C’est une fête pour nous rappeler le Dieu Créateur.
  2. C’est une fête pour nous rappeler le Dieu Rédempteur.

La Création a été terminée le 7ème jour, Israël est sorti d’Égypte un quatorzième jour du mois, c’est à dire le deuxième « 7ème jour », le deuxième sabbat de ce mois (Ex 12). Chaque sabbat célèbre ces deux événements dans l’Ancienne Alliance.

Pour ces actes qui concernent toute la communauté, toute la communauté devait se rassembler pour célébrer, faire la fête, en l’honneur du Dieu créateur et rédempteur, de celui qui a créé la terre, le ciel, la mer et tout ce qui s’y trouve et de celui qui les a sortis de l’esclavage d’Égypte pour les amener vers un pays où coulent le lait et le miel.

Le Sabbat est donc, dans l’Ancienne Alliance, un jour qui célèbre, en même temps, la création et la rédemption du peuple de Dieu, le peuple juif. Notre prochain article montrera que la résurrection de Jésus transforme ce Sabbat. Il est le jour qui célèbre la nouvelle création et la rédemption du nouveau peuple de Dieu, l’Église.

anonyme

Emmanuel Hechon

Ancien informaticien, Emmanuel a quitté son travail pour se former à l’Institut Biblique de Genève, et en est ressorti diplômé en 2014. Marié à Hélène, il est aujourd’hui pasteur d’une Église à Marchiennes (Nord de la France). Lorsqu’il n’est pas en train d’étudier la théologie, il aime cuisiner et jouer aux échecs.

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