Luther et les 95 thèses de la Réforme protestante

Pour comprendre ce geste, il faut revenir à ce que Luther observe et vit à Wittenberg à cette époque.

Le déclencheur

Martin Luther comprend très vite que le système des indulgences est une erreur. Il est d’autant plus outré que leur vente scandaleuse se répand, portée par des propagateurs toujours plus zélés. L’un d’eux, nommé Johann Tetzel (1465-1519), arrive à Wittenberg¹. C’est à la criée qu’il propose ses lettres d’indulgence ! La population accourt en masse pour les acheter.

Or, Luther réside à Wittenberg et vient de découvrir la justification gratuite en Dieu. Mais à deux pas de chez lui, on vend des indulgences censées délivrer les âmes du Purgatoire. Luther s’indigne. Il éprouve une sainte colère contre cette escroquerie spirituelle. Il regagne alors ses appartements et rédige les 95 thèses.

La réaction de Luther

Le 31 octobre 1517, vers midi, il affiche sur la porte principale de l’église de Wittenberg les désormais célèbres 95 thèses. Rédigées en latin, elles dénoncent les erreurs de l’Église catholique, notamment la prétention au salut par les œuvres et la vente des indulgences. Ce placardage marque le début de la Réforme.

Luther, prieur du couvent de Wittenberg, maître ès arts, prédicateur et docteur en théologie, n’a alors que 34 ans. Il maîtrise l’hébreu, le grec et le latin. Il est connu dans les cercles ecclésiastiques catholiques, mais reste un inconnu pour le grand public.

L’affichage de thèses n’a rien d’une provocation: c’est une pratique courante à l’époque. Chacun peut exprimer ses idées de cette manière et les soumettre à la discussion. Les professeurs d’université organisent volontiers des disputes publiques. Luther offre ainsi à ses collègues l’occasion d’un débat sur les indulgences.

L’intention de Luther

En publiant ses thèses, Luther n’a pas l’intention de quitter l’Église catholique. Il n’envisage pas un instant de se détacher définitivement de Rome. Pourtant, contrairement à ce qu’il espère, aucun débat contradictoire n’a lieu. Personne n’ose exprimer publiquement son avis sur les indulgences.

Le contexte est significatif: le lendemain, 1er novembre, c’est la Toussaint. Selon la coutume, on expose alors des reliques censées procurer des grâces. En se rendant à l’église, les fidèles découvrent les thèses de Luther. Celles-ci se répandent aussitôt, d’abord par le bouche-à-oreille, dans la ville, puis dans toute la Saxe, et bientôt au-delà. Rapidement traduites en allemand et en d’autres langues, elles sont imprimées et largement diffusées. En deux semaines, toute l’Allemagne en prend connaissance ; en un mois, c’est au tour de l’Europe.

Ces thèses provoquent un électrochoc considérable, d’abord spirituel, puis politique.

1. Certains historiens estiment que Tetzel ne s’est jamais rendu directement à Wittenberg, mais ses prédications sur les indulgences étaient bel et bien connues dans la région.

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