7 choses à savoir pour mieux interpréter la prophétie dans l'Ancien Testament

Textes difficilesLivres prophétiques

Cet été, nous avons parcouru dans mon Église le livre du prophète Michée. En le relisant pour préparer les prédications, je me suis redit qu'il n'était parfois pas évident d'interpréter la prophétie dans la Bible. Comment interpréter un texte avec autant d'images (souvent bizarres ^^)? Peut-on se l'appliquer directement? Voilà quelques conseils pour nous aider dans notre compréhension des livres prophétiques de l'Ancien Testament.

1. Par définition biblique, les prophètes sont des porte-parole de Dieu.

Si vous regardez la définition de « prophète » dans un dictionnaire, il est fort probable que vous tombiez sur une définition du genre: « Un personne qui annonce l’avenir ». Mais dans la Bible, un prophète n’est pas avant tout celui qui prédit l’avenir, mais celui qui parle au nom de Dieu. Il est un intermédiaire entre Dieu et son peuple. Moïse est l’archétype du prophète (Ex 4.12; Dt 34.10), celui qui transmet au peuple la Parole de Dieu, sa volonté. Jésus, le second Moïse, est le prophète par excellence (Hé 1.1-2).

2. Les prophètes ont pour fonction de rappeler ce que le peuple devrait déjà savoir.

Les prophètes avaient pour fonction de rappeler à chaque génération les conditions de l’alliance de Dieu avec son peuple et les conséquences si le peuple obéit ou au contraire désobéit. Il n’y a rien de fondamentalement nouveau dans ce qu’ils déclarent. L’alliance conclue avec le peuple au temps de Moïse comprenaient des termes précis, des bénédictions en cas d’obéissance (Dt 28.1-14) et des malédictions en cas de désobéissance (Lé 26; Dt 28.15-66).

3. Les prophéties s’adressent au peuple de manière communautaire.

Un des problèmes que nous rencontrons est dû à notre manie de sauter les étapes et de vouloir appliquer directement des textes à notre situation. C’est parfois possible, mais souvent non. Nous devons faire l’effort de nous demander à qui parlait l’auteur de ce que nous lisons. Dans le cadre des prophéties vétéro-testamentaires, les bénédictions et malédictions sont à comprendre dans une visée collective et pas individuelle. Les prophéties étaient données dans le cadre de l’alliance et de ses termes entre Dieu et son peuple. Par exemple, toutes les prophéties de prospérité sont 1) communautaires et 2) conditionnelles. Si le peuple obéissait, alors il allait prospérer dans le pays que Dieu lui avait promis. Nous ne pouvons pas prendre ces prophéties et dire par exemple: « Si j’obéis à Dieu, alors il me bénira. »

4. Les livres prophétiques sont des collections d’oracles qui n’étaient pas écrits pour être lus de façon linéaire.

On a souvent de la peine à distinguer le début et la fin des oracles et parfois à distinguer leur enchaînement logique. Il faut alors chercher à isoler les oracles pour mieux les comprendre. Bruce Waltke l’illustre bien: « C’est un peu comme lire les sermons non triés d’un prédicateur délivrés à différentes occasions […] Lire les prophètes, c’est comme regarder des photos plutôt qu’un film.  » Les prophètes n’ont pas forcément prononcé les oracles dans l’ordre présenté dans la Bible, ni même à la même période. Nous devons essayer d’interpréter chaque oracle séparément et à la lumière du livre en entier.

5. Quand les prophètes parlent d’avenir, c’est pour changer le comportement présent.

La majorité du temps, quand les prophètes parlent de l’avenir, il s’agit de l’avenir proche de leurs contemporains, qui pour nous est passé. Le but n’est pas de dévoiler le futur, c’est de transformer le présent et de ramener le peuple à l’obéissance à Dieu. Des fois même, les prophètes parlent d’un futur hypothétique, dépendant de la réponse du peuple aux conséquences de leurs actes, énoncées par la prophétie.

Nous avons une certaine tendance à vouloir discerner l’avenir dans les prophéties. Mais les prophéties concernaient plutôt l’avenir du peuple, déjà passé pour nous. Dans leur livre « Un nouveau regard sur la Bible », Fee et Stuart ont noté que, sur les prophéties de l’AT, moins de 2% des textes évoquent le messie, moins de 5% décrivent l’ère de la Nouvelle Alliance et moins de 1% concernent des évènements encore à venir aujourd’hui! Même si ces chiffres sont discutables, ils devraient nous amener à considérer les textes prophétiques avec prudence.

6. Dans les prophéties, il existe une tension (pas contradiction)  entre le jugement et le salut.

Matthieu Sanders nous rappelle qu’il faut distinguer « le caractère inconditionnel des promesses de Dieu et le caractère conditionnel de ses bénédictions temporelles ». Dans Michée par exemple, les malédictions sont prononcées parce que le peuple a violé l’alliance et va subir les conséquences de cette désobéissance. Mais la promesse de Dieu subsiste: il délivrera un reste et suscitera un berger qui rassemblera le troupeau (Mi 2.12; 7.14), un Roi qui marchera à sa tête (Mi 2.12; 5.1). Les prophètes soulignent donc que « ses échecs sont dus à sa désobéissance à l’alliance et que sa sécurité est due à la fidélité de Dieu à l’alliance. » Cette tension existait déjà dans les termes mêmes de l’alliance (Lé 26.44-45). Si on oublie cette tension, on ne comprend plus pourquoi Dieu déporte son peuple alors qu’il avait promis de lui donner le pays promis ou encore pourquoi Dieu ramène un reste de son peuple rebelle alors qu’il avait annoncé qu’il le déporterait en cas de désobéissance à sa Parole.

7. Les prophéties manquent de 3D.

Les prophéties de la Bible sont comme les sommets d’une chaîne de montagnes. Quand on les regarde de loin, on a l’impression qu’ils se trouvent côte à côte alors qu’une vallée les sépare. Ou comme un ciel étoilé: on a l’impression que les étoiles sont sur un même plan alors que des millions de kilomètres les séparent. Les prophéties manquent de perspectives et se présentent souvent sur le même plan. Un prophète peut parler dans une même phrase d’un évènement qui s’est produit dans le futur proche de ses contemporains et d’un autre qui ne s’est pas encore réalisé. Quand on lit une prophétie qui semble parler de l’avenir, nous devons nous demander si cette prédiction concerne: 1) l’exil et la destruction du temple, 2) la personne et l’œuvre du Christ ou 3) le Jugement dernier et la nouvelle Création. Il nous faut être prudents dans notre tendance à sauter directement au point 3!

Comme le reste de la Bible, si on « ratisse le sol, on ne ramasse que des feuilles mortes; mais si on creuse, on trouve des pépites. » (John Piper). Je prie que ces quelques points nous aident à trouver les pépites contenues dans la Parole du Dieu vivant et vrai.

Matthieu Giralt

Matthieu Giralt est le directeur de ToutPourSaGloire.com. Il est pasteur dans l’Est de la France. Il est titulaire d’un DNSEP de l’École des Beaux-Arts de Bordeaux, et d’un Master de recherche de la Faculté Jean Calvin. Il est le mari d’Alexandra, ils ont deux fils.

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COCA: une méthode simple pour comprendre et appliquer la Bible

Découvre ce replay du webinaire de Stéphane Kapitaniuk enregistré le 13 octobre 2016.

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S. Kapitaniuk